Foto IPP/Felice De Martino Napoli 19/07/2020 Calcio Campionato italiano serie A 2019/2020 Napoli - Udinese Nella foto: Arkadiusz Milik festeggia il gol del 1-1 Italy Photo Press World Copyright (Felice De Martino/IPP/PRESSE S/PRESSE SPORTS)

Pologne, Leverkusen, Augsbourg, Ajax, Naples, Marseille... La story d'Arkadiusz Milik

Après des passages en Allemagne, aux Pays-Bas et en Italie depuis le début de sa carrière, le Polonais de 26 ans va découvrir la Ligue 1 à l'OM. Avec un double objectif en tête : retrouver son niveau de jeu et prendre part à l'Euro prévu cet été. FF retrace le parcours du nouveau fer de lance marseillais.

L'histoire d'Arkadiusz Milik avec le football démarre dans le sud de la Pologne. Né à Tychy en février 1994, il est formé au Rozwoj Katowice. En octobre 2010, le jeune Milik est lancé avec l'équipe réserve en quatrième division polonaise. Cette jeune carcasse d'1,86m pour 80 kilos attire les regards du Legia Varsovie et de prétendants internationaux comme Reading et Tottenham. Mais c'est finalement le Gornik Zabrze, club voisin, qui reçoit sa bénédiction à l'été 2011. A 17 ans, le joueur se voit offrir un vrai rôle au plus haut niveau national. Une aubaine qu'il peine à concrétiser sur le plan statistique. Passeur décisif pour sa toute première rencontre en juillet, il faut attendre le mois d'avril 2012 pour le voir inscrire ses deux premiers buts en pro. En fin d'exercice, le bilan est malgré tout honorable pour son âge. Et après une première saison à prendre la température, le buteur va très vite hausser le ton. Avec six buts et une passe décisive après huit journées, il démarre la saison 2012-13 pied au plancher et intègre la sélection polonaise. De quoi convaincre le Bayer Leverkusen de s'offrir le jeune Polonais au cœur d'une saison qui voit un certain Robert Lewandowski empiler les pions avec le Borussia Dortmund.

Décollage retardé

«Arkadiusz Milik est considéré comme probablement la plus grande étoile montante de Pologne du moment. Il est déjà international polonais à seulement 18 ans.» Directeur sportif de Leverkusen, Rudi Völler ne manque pas d'enthousiasme au moment d'accueillir celui que beaucoup considèrent déjà comme le «nouveau Lewandowski» en Pologne. Mais entre son inexpérience et ce très lourd héritage, l'intégration en Allemagne est laborieuse. Arrivé à l'hiver, Milik doit se contenter de six petits matches et 55 minutes de jeu entre janvier et mai. Barré par Stefan Kiessling, l'horizon semble bouché au Bayer. Pas plus utilisé au moment d'entamer la saison 2013-14, il est envoyé en prêt à Augsbourg. Un bol d'air frais. A défaut de flamber, Milik profite de ce passage en Bavière pour retrouver un peu de rythme. Dans un club maintenu sur le fil la saison précédente, il prend part à 18 journées de Bundesliga, dont six comme titulaire. En manque flagrant de confiance et de réussite, il n'inscrit que deux petits buts mais Augsbourg achève la saison à une très belle huitième place du Championnat. L'expérience aura eu le mérite de lui dégourdir les jambes mais pas de convaincre Leverkusen de le conserver. Pire, devant le faible rendement du Polonais, le club s'offre les services de Josip Drmic en provenance de Nuremberg à l'été 2014. Milik est à nouveau envoyé ailleurs. A Amsterdam cette fois.

L'Ajax, un déclic au haut niveau pour Milik. (Jeroen Putmans/ANP SPORT/PRESS/PRESSE SPORTS)

La destination interpelle quand on connaît le profil du bonhomme et le style de jeu pratiqué par la formation de Frank de Boer. Le directeur sportif Marc Overmars semble pourtant convaincu de ce choix : «Nous voulions signer un pivot en attaque pour la saison et je pense que Milik remplit ce rôle à merveille. C'est un joueur qui peut garder la balle grâce à ses qualités physiques. Il possède également une bonne frappe et sait se montrer dangereux dans la surface.» Avec l'Ajax, le buteur se retrouve d'abord cantonné dans un second rôle derrière Kolbeinn Sigthorsson, installé depuis plusieurs saisons à la pointe de l'attaque néerlandaise. Laissé sur le banc sur cinq des dix premières journées, il ne débloque son compteur qu'avec un doublé contre Heracles mi-septembre. Il a beau s'offrir un sextuplé en Coupe nationale, il lui faut attendre le mois de novembre pour véritablement saisir sa chance. Entre le 9 novembre et le 14 décembre, il signe cinq buts et trois passes décisives en cinq journées d'Eredivisie. Suffisant pour bénéficier de neuf titularisations consécutives dans le 4-3-3 de Frank de Boer. Sa fin de saison est tronquée par des pépins physiques et l'Ajax échoue à la seconde place du Championnat mais peu importe. Avec 11 buts et 4 passes dans un second rôle, Milik n'a pas déçu. Le club hollandais décide de lever l'option d'achat et de le conserver pour moins de trois millions d'euros.

3 millions d'euros : le montant de l'option d'achat levée par l'Ajax pour s'offrir Milik.

Très vite, la décision se révèle plus que judicieuse. Enfin en pleine confiance, Milik s'installe comme buteur numéro un de son nouveau club. Tueur létal doté d'un excellent jeu de tête mais aussi d'un pied gauche chirurgical, notamment sur coup de pied arrêté, le Polonais brille enfin. Mieux encore en cette saison 2015-16, il affiche une régularité impressionnante. Buteur à 21 reprises en 31 journées, il ajoute huit passes décisives à ce total. Tout au long de la saison, il ne passe pas plus de trois journées sans se montrer décisif et signe même une série de neuf buts en six matches entre février et mars. Avec seulement deux défaites et une différence de buts à +60, l'Ajax échoue pourtant une fois de plus à la place de dauphin du PSV. Dans la foulée de ce superbe exercice, Milik anime l'attaque polonaise aux côtés de Lewandowski lors de l'Euro en France. La Pologne accroche l'Allemagne en poules (avec Milik buteur face à l'Irlande du Nord) et sort la Suisse en huitièmes de finale. En quarts, les Polonais s'inclinent aux tirs au but contre le Portugal, futur vainqueur. Auteur d'une saison pleine en club comme en sélection, le buteur de 22 ans voit sa cote bondir. Orphelin d'Higuain parti chez l'ennemi turinois, Naples flaire le bon coup et lâche 32 millions d'euros pour se payer le buteur.

Milik célèbre lors de son but à l'Euro 2016 face à l'Irlande du Nord. (Tomasz Jastrzebowski/FOTO OLIM/PRESSE SPORTS)

Genoux en bois, mental d'acier

Pas freiné par l'intersaison, Milik s'intègre immédiatement dans le collectif napolitain. Deux doublés en Serie A contre Milan et Bologne, un autre en Ligue des champions contre le Dynamo Kiev ainsi qu'un but contre Benfica. Début octobre, son élan est stoppé net lorsqu'il est victime d'une rupture des ligaments croisés du genou gauche contre le Danemark avec la sélection. Malgré cela, l'attaquant réussit l'exploit de revenir en à peine quatre mois. Relancé contre le Chievo mi-février, il profite de la fin de saison pour jouer des bouts de matches. Sans pour autant retrouver son rythme. Le début de saison 2017-18 le confirme. S'il marque dès la première journée contre le Hellas Vérone, il perd sa place de titulaire avant de connaître le pire. Fin septembre, c'est cette fois son genou droit qui lâche contre la SPAL. Le verdict est le même : rupture des ligaments croisés et retour à la case opération. Un énorme coup dur qui ne mine pas pour autant le joueur. Cinq mois plus tard, il fait son retour sur le pré contre la Roma. Et contrairement à l'année précédente, Milik profite de la fin de saison pour retrouver un rendement positif. Le Polonais prend part à la totalité des matches restants et retrouve le chemin des filets à quatre reprises. Après deux saisons en Campanie, le bilan n'est pourtant pas satisfaisant. Auteur de dix buts en 32 matches de Serie A, l'attaquant a déjà manqué 52 rencontres toutes compétitions confondues. Frustrant quand on voit ce qu'il a pu donner en pleine possession de ses moyens.

A l'été 2018, Carlo Ancelotti débarque à la place de Maurizio Sarri et Milik retrouve - enfin - des couleurs. Et du temps de jeu. Titulaire à quatre reprises sur les six premières journées de Serie A, il plante trois fois contre la Lazio et Parme. Jamais totalement incandescent, il retrouve une régularité qu'on ne lui avait plus connu depuis son passage aux Pays-Bas. Le Polonais prend part à 35 des 38 journées de Championnat ainsi qu'à dix rencontres européennes. En Serie A, Naples achève la saison à la seconde place et son buteur accumule 17 pions et deux passes décisives. Après deux années de galère, la satisfaction est de mise. Le club napolitain a beau se déchirer en interne en début de saison 2019-20, Milik garde maintient le cap. Gêné par des soucis physiques, il signe son retour en marquant cinq fois en quatre rencontres sur la deuxième quinzaine d'octobre. Malgré le remplacement d'Ancelotti par Gattuso et de nouveaux problèmes musculaires, il continue de marquer un match sur deux. Fin février, son compteur affiche neuf buts en 16 matches au moment de la coupure du Championnat causée par le coronavirus. Moins en jambes au moment de la reprise estivale, il achève la saison avec 11 réalisations.

Du placard à l'Euro ?

«Il est difficile pour nous de trouver un joueur meilleur que lui pour le moment», concédait Gattuso l'été dernier au sujet de son attaquant à qui il ne reste qu'une année de contrat. Une sortie qui en dit long sur l'apport de Milik. Mais quatre années dans le sud de l'Italie l'ont visiblement comblé. Le Polonais souhaite partir et refuse les offres de prolongation de ses dirigeants pour obtenir son transfert dès l'été. Mais Naples ne cède pas et préfère envoyer son joueur au placard. Si bien que le buteur n'a pas disputé la moindre minute en match officiel cette saison. Une situation que le principal intéressé regrettait auprès des médias polonais en octobre : «Je ne pense pas qu'un joueur puisse être mis à l'écart comme ça pendant tant de mois, ce n'est pas juste.» Sans pour autant changer de position vis-à-vis de son club : «J'ai 26 ans, je veux grandir et devenir un meilleur joueur. Je pense que c'est le bon moment pour tenter un nouveau défi, je suis une personne qui suit son instinct, et faire quelque chose contre sa volonté n'a aucun sens.»

Dans l'impasse en Italie, Milik sait que sa place au sein de la sélection pour l'Euro prévu l'été prochain n'est plus garantie. La fédération polonaise n'a pas manqué de le rappeler publiquement par la voix de son président il y a quelques jours. «S'il reste à Naples après la fenêtre de janvier, je pense qu'il est normal qu'il ne puisse pas prendre part à l'Euro avec la Pologne», a reconnu Zbigniew Boniek sur la radio napolitaine Kiss Kiss. Un coup de pression qui a visiblement fonctionné puisque la situation du joueur s'est rapidement décantée. Après six mois de bras de fer, le Polonais et Naples sont parvenus à un accord avec l'Olympique de Marseille. En faisant ce choix, Milik s'offre une situation idéale pour se relancer à quelques mois de son objectif. Sans autre concurrence qu'un Dario Benedetto au rendement famélique, le Polonais a tout ce qu'il faut pour s'imposer sans conteste à la pointe de l'attaque de l'OM. A bientôt 27 ans, il n'est plus à un rebond près.

Quentin Coldefy