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Moussa Saïb, l'homme tranquille

L'ancien milieu offensif de l'AJ Auxerre se partage entre un rôle de consultant télé et sa famille.

C’est un joli pavillon situé en bordure de forêt, un pied en Seine-Saint-Denis et l’autre en Seine-et-Marne. Le calme voisinage respire la tranquillité. Rien ne manque : de la verdure, un salon de jardin, un petit coin barbecue. C’est là que Moussa Saïb, quarante-six ans, a élu domicile avec sa petite famille. Celui qui fut l’un des cadres d’Auxerre lors du doublé Coupe-Championnat en 1996 y mène une existence simple et heureuse auprès des siens depuis plus d’un an déjà. Car, après des expériences à l’étranger de juin 1997 à janvier 2001 en Espagne (Valence), en Angleterre (Tottenham) et au Qatar (Al-Nassr Riyad) et un retour en France, l’ancien maître à (bien) jouer de l’Algérie (30 capes) a pris du recul avec le football de son pays après un long passage sur le banc.
Expérience mitigée mais arrêtée sans regret. «J’ai stoppé ma carrière en 2004 à la JS Kabylie, puis j’en suis devenu l’entraîneur en 2007. Entre les deux, j’ai fait un break ! J’ai gagné le Championnat mais, à la suite d’un désaccord, je suis parti en Arabie saoudite, diriger Al-Watani, un club qui venait de monter en L1. Après une demi-saison, nous nous sommes séparés à l’amiable. Je suis rentré en Algérie pour prendre en main l’ASO Chlef, mais ça n’a pas collé. J’ai dit stop au bout de quelques mois. La JSK m’a encore rappelé, comme si j’étais le pompier de service ! Le club était engagé en Ligue des champions et nous nous étions mis d’accord avec le président pour faire l’impasse sur cette compétition, car nous ne disposions pas de l’effectif pour la jouer dans de bonnes conditions. Mais, entre-temps, il a changé d’avis. J’ai décidé de tout arrêter avant la reprise du Championnat 2013. Depuis, j’ai pris la décision de ne plus entraîner.»

Des matches pour les bonnes causes

Pas question cependant de renoncer à cette dévorante passion. De temps à autre, l’artiste, dont la silhouette s’est –un peu– enrobée, mais qui conserve un toucher de ballon inimitable, rechausse les crampons à l’occasion de matches caritatifs, comme dernièrement à Saint-Arnoult-en-Yvelines, pour une association d’aide aux handicapés. «Ce sont des rencontres entre amis. Je joue aussi avec les Black Stars d’Albert Couriol. Ce n’est que du plaisir. D’abord, parce que ça ne me dérange pas dans la conduite de mes affaires. Ensuite, parce que ça fait toujours plaisir de retrouver les anciens comme Patrick Mboma et tant d’autres !» Les habitués du stade de Rungis ont également pu l’apercevoir, parfois, s’égayer avec les super vétérans. Attention, transfert ! «Ce sont des compatriotes et il est question que je prenne une licence pour la saison prochaine», rigole le natif de Theniet el-Had.

Pas de langue de bois !

Aujourd’hui, Moussa Saïb partage équitablement son temps entre deux activités distinctes : ses proches et la télévision. «Mais priorité à ma famille ! J’ai trois beaux enfants, dont deux petites filles et croyez-moi, c’est un vrai job.» Papa Moussa est un homme comblé, et le football complète son bonheur. Comme consultant désormais, puisqu’il a renoncé à exercer sur un banc. «Tant qu’il n’y aura pas un dirigeant qui tient parole et résiste aux pressions extérieures», explique-t-il. «J’ai débuté comme consultant sur Orange Foot lors de la CAN 2012 aux côtés de Pape Diouf, Claude Le Roy, Rigobert Song et Kaba Diawara. Maintenant, je travaille avec une boîte de production qui vend des contenus à la chaîne algérienne privée Echorouk TV. Je me déplace plusieurs fois par mois pour enregistrer des émissions, et j’y dis ce que je pense. Ça plaît ou ça ne plaît pas.»

Naturellement, il y parle de football algérien mais aussi de l’équipe nationale, dont il fut un cadre pendant une douzaine d’années. Jusqu’à remporter le titre majeur, la Coupe d’Afrique des nations 1990, à Alger. Un quart de siècle après cette conquête, il regrette le peu de respect dont jouit la génération des champions. «Parfois, j’ai l’impression que, pour les gens, cela ne représente rien ! Et pourtant, depuis, personne ne l’a fait. En Algérie, seul le présent compte et ce passé-là n’intéresse pas. Comme si l’étoile sur notre maillot était tombée du ciel...» Une pointe d’amertume perce chez celui qui demeure un éternel amoureux d’El-Khedra (la verte) et a suivi avec une grande fierté le parcours brésilien en 2014 ponctué par un huitième contre l’Allemagne (1-2 a.p.). «En revanche, j’ai été déçu par l’élimination en quarts de la dernière CAN, alors que nous étions grands favoris.»

Frank Simon (@frank_simon)