Ruben Dias (City)Dortmund, 14.04.2021, Fussball, Champions League, Viertelfinale, Rueckspiel, Borussia Dortmund - Manchester City 1:2 *** Local Caption *** (TimGroothuis/WITTERS/PRESSE SP/PRESSE SPORTS)

Manchester City : La story de Ruben Dias

De sa longue histoire au Benfica à cette arrivée fracassante à Manchester City, retour sur le parcours de celui qui n'a pas eu besoin de temps pour s'imposer comme le patron incontesté de la meilleure défense d'Europe cette saison.

68 millions d’euros. La somme déboursée par Manchester City pour se payer les services de Ruben Dias était celle d’un défenseur de très haut standing. Mais le passif des opérations des Citizens dans ce secteur obligeait à la retenue. Eliaquim Mangala, John Stones, Nicolas Otamendi, Aymeric Laporte ou même Nathan Aké : les dirigeants mancuniens ont accumulé, en vain, les achats astronomiques ces dernières années. En quête d’un défenseur central capable de stabiliser une défense trop souvent prise à revers. L’arrivée du Portugais fin septembre 2020 s’inscrivait dans cette logique. Et il a suffi d’une poignée de matches pour constater que le défenseur, alors âgé de 23 ans, n’était pas taillé dans le même bois que ses décevants prédécesseurs. Huit mois plus tard, Manchester City peut se targuer d’être la meilleure défense d’Angleterre et d’Europe. Une ascension exceptionnelle pour Dias qui trouve sa source à Lisbonne et au Benfica, club qui a vu grandir le garçon.

Leader en gestation

Ses premiers ballons, Ruben Dias les touche à Amadora, sa commune de naissance, au nord de Lisbonne. A quelques encablures de l'Estadio da Luz, il intègre l’Estrela da Amadora, son tout premier club. Deux ans lui suffisent pour taper dans l’œil du grand voisin Benfica dont il intègre l’académie en 2008, à 11 ans. Le début d’une formation de plus d’une décennie, au cours de laquelle Dias progresse constamment et s’affirme comme un patron en devenir. En 2014, il participe à l’Euro U17 à Malte avec sa sélection. La compétition s’arrête au stade des demi-finales contre l’Angleterre. Deux ans plus tard, Ruben Dias est cette fois capitaine des Portugais à l’Euro U19. Là encore, l’aventure prend fin aux portes de la finale, contre les Bleuets d’un certain Kylian Mbappé auteur d’un doublé. Pour la saison 2016-17, les jeunes du Benfica signent une magnifique campagne en Youth League. Après s’être offert le PSV en huitièmes, le CSKA Moscou en quarts et le Real Madrid en demi-finales, les Portugais rejoignent le RB Salzbourg en finale. Mais ils manquent la dernière marche et s’inclinent contre les Autrichiens. Dans la foulée de cette déconvenue, Dias est de nouveau capitaine de la sélection pour le Mondial U20. Le Portugal quitte la compétition sur une cruelle séance de tirs au but contre l’Uruguay en quarts. Peu importe. Fort de ce statut de leader de sa génération et d’un bagage déjà riche dans toutes les catégories, le défenseur de 20 ans intègre le groupe pro du Benfica pour entamer la saison 2017-18.

Dias, en 2017, époque Benfica. (Marc Atkins/OFFSIDE/PRESSE SPO/PRESSE SPORTS)

Taulier du Benfica

A peine arrivé chez les plus grands, Ruben Dias s’impose sans aucune contestation. Le 16 septembre 2017, Rui Vitoria le lance dans le grand bain. Titulaire en défense, il ne peut empêcher la défaite des Lisboètes contre Boavista (1-2). Un mois plus tard, le jeune espoir monte encore en grade. Son entraîneur l’aligne d’entrée pour la réception de Manchester United en Ligue des champions (0-1). En dehors d’une absence d’un petit mois à cause d’une blessure entre novembre et décembre, Dias devient un titulaire indéboulonnable au Benfica. Il ne manque que neuf minutes de jeu sur l’ensemble des dix-neuf dernières journées de Liga NOS. Entre février et mars, il plante même à trois reprises dans une superbe série de victoires qui voit les Aigles prendre les commandes du Championnat. Malheureusement, le duel décisif contre le FC Porto se solde par une défaite (0-1) et une fin de saison très moyenne les relègue à la deuxième place. La première année professionnelle de Ruben Dias reste malgré tout un immense succès. A 21 ans, il est élu meilleur espoir de Liga NOS. Et, surtout, il est appelé par Fernando Santos pour intégrer la sélection à la Coupe du monde en Russie. Une surprise pour lui qui ne compte encore aucun match avec les A et qui sera le plus jeune du groupe portugais au Mondial. Le 28 mai 2018, Dias dispute ses toutes premières minutes avec les champions d’Europe en titre, à l’occasion d’un match de préparation contre la Tunisie (2-2).

Cette première année XXL chez les pros attire les regards. Et c’est l’OL qui se montre le plus offrant pour s’offrir les services du défenseur portugais. Longtemps annoncé entre Rhône et Saône, Ruben Dias ne bougera finalement pas. Les dirigeants du Benfica ne cèdent pas et l’OL ne lâche pas les 45 millions d'euros de sa clause libératoire. Si bien que fin août, le tout jeune international portugais prolonge même son contrat jusqu’en juin 2023. Décision judicieuse. Bien aidés par l’arrivée en pro de Joao Félix, les Aigles réalisent un exercice 2018-19 de haute volée. Et leur défenseur s’affirme toujours plus comme un taulier. C’est simple, Dias ne manque que deux rencontres de Championnat (pour cause de suspension) et trouve le moyen de marquer dans le derby contre le Sporting début février (4-2). Avec lui, Benfica dispose de la deuxième meilleure défense du pays et arrache le titre à Porto. En sélection aussi, le défenseur prend une autre dimension. Appelé à chaque rassemblement cette saison-là, il prend la place de José Fonte en charnière centrale aux côtés de Pepe. Une place de titulaire qu’il ne quitte pas de l’année, jusqu’à la finale de Ligue des nations remportée face aux Pays-Bas (1-0). L’exercice 2019-20 de l’enfant du club est du même acabit. 33 matches joués sur 34 possibles en Championnat, jamais remplacé en cours de match et un statut incontesté. Sur le plan collectif, Benfica glane une Supercoupe du Portugal mais cède son trône de champion. A 23 ans, Ruben Dias a montré une constance rare pour un si jeune joueur au plus haut niveau. En quête d’un défenseur central après un début de saison 2020-21 très compliqué en Premier League, Manchester City vient frapper à la porte.

La pièce manquante du City de Guardiola

«Manchester City achète un top player qui est déjà un leader. Ruben est l'un de mes jeunes défenseurs centraux préférés. Il n'a que 23 ans, mais il fait preuve d'une grande maturité. Il a une excellente éthique de travail. Il veut apprendre, il veut s'améliorer.» Interrogé par Talksport, José Fonte n’y va pas par quatre chemins pour donner son avis sur le choix des Citizens. Leurs 68 millions d’euros ont convaincu Benfica de libérer son joueur en cette fin de mois de septembre. La veille, les hommes de Pep Guardiola ont subi la foudre de Leicester sur leur pelouse (2-5). Constamment en chantier depuis le déclin de Vincent Kompany, la défense des Skyblues peine à se stabiliser malgré l’accumulation des renforts dans ce secteur. Ce n’est plus qu’une question de jours. A peine débarqué en Angleterre, Ruben Dias est installé dans l’axe de l’arrière-garde mancunienne. A juste titre. Car l’adaptation est immédiate. Peu importe le changement de dimension et le niveau plus exigeant de la Premier League, le Portugais enchaîne les titularisations et suscite déjà beaucoup d’espoirs. Il n’est pas là depuis un mois que Guardiola affiche sa grande satisfaction : «La chose la plus importante pour Ruben Dias est qu'il est un leader. Dans peu de temps, il dirigera l'équipe. Il gère la pression, à seulement 23 ans. Nous sommes ravis de ce qu'il a montré jusqu'à présent.»

Relégué par le peloton de tête en Championnat, Manchester City se remet progressivement à l’endroit grâce à son nouvel élément et aux réajustements de son entraîneur. Avant de se lancer dans une série légendaire. Entre fin novembre et début mars, les Citizens enchaînent 17 victoires en 19 journées pour seulement… six buts encaissés. Toujours aussi inspirée offensivement, l’escouade de Guardiola est devenue une forteresse difficile à bouger. A l’image de sa recrue devenue en quelques semaines la pierre angulaire de cette stabilité nouvelle. Costaud, rapide, concentré et leader vocal, Ruben Dias crève l’écran. Et répond toujours présent même dans une saison d’une densité folle. «Nous connaissions sa qualité sur le terrain. Nous connaissions sa personnalité, mais bien sûr, nous sommes impressionnés par la mentalité et le physique qu'il faut avoir pour jouer tous les trois jours», se félicite d’ailleurs son entraîneur en janvier. Tombé de son trône la saison précédente, City engloutit la concurrence en Premier League et tue le suspense. En Europe, le parcours est de la même veine. Un seul petit but encaissé dans une phase de groupes survolée. Aucun en huitièmes, deux en quarts contre Dortmund et un seul contre le PSG en demi-finales. Le total (quatre buts encaissés en 12 matches) a de quoi faire pâlir. Au match aller au Parc des Princes, Ruben Dias sort une prestation XXL pour éteindre la quasi-totalité des incursions parisiennes. Très attendu dans sa gestion de la profondeur face à Mbappé et consorts, City répond présent et se montre imperméable dans tous les domaines. En finale de Ligue des champions pour la première fois de leur histoire, dix ans après la dernière de leur entraîneur, les Skyblues pourront compter sur une défense en acier pour renverser Chelsea. Et sur un Ruben Dias qui ne surprend plus personne.

Quentin Coldefy