Luca Waldschmidt (Deutschland) u000dMoenchengladbach, 16.11.2019, Fussball, EM-Qualifikation, Deutschland - Weissrussland 4:0 (Thorsten Wagner/WITTERS/PRESSE/PRESSE SPORTS)

Luca Waldschmidt : «Je mange vegan la majorité du temps, et c'est bénéfique»

Attaquant atypique, encore méconnu, Luca Waldschmidt, 23 ans, gagne à jouer un rôle important pour l'Allemagne. Tout jeune international convoité, sensation du dernier Euro Espoirs, il a accordé un entretien à FF où il évoque la reprise, ses inspirations ou encore son mode de vie.

«La Bundesliga est de retour ce week-end, comment vous vous sentez ?
Je suis ravi de pouvoir jouer à nouveau, forcément. Je pense que ça va être particulier en raison de l'absence de supporters car ce n'est pas le football que l'on connaît. Mais retrouver ces sensations, sur le terrain, au stade, se battre pour gagner des points, la compétition et pas seulement l'entraînement, cela fait du bien. Même si ç'a été spécial de se préparer à nouveau dans ce contexte, avec toutes les précautions nécessaires.

Ç'a été difficile d'être coupé dans votre élan ?
Évidemment, surtout que l'on avait bien débuté notre saison avec pas mal de points. Ce n'est pas toujours facile mais on jouait bien, je jouais bien également et on a enchaîné en montrant qu'on était une bonne équipe.

Votre papa était footballeur, vous avez commencé tôt. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
J'ai commencé à jouer au football dès l'âge de 4 ans dans ma ville natale, avec mes amis. J'ai changé deux fois de clubs chez les jeunes avant d'arriver à l'Eintracht Francfort. J'avais 15 ans. J'y suis resté jusqu'au niveau professionnel, en vivant à l'académie à temps plein, avec l'école et le football. Un sport-étude, en quelque sorte. Ç'a duré 4 ans, avant que je signe mon premier contrat professionnel à mes 18 ans. La première année n'a pas été celle à laquelle je m'attendais, ensuite... (rires) J'ai été blessé pour 8 mois (une ostéite du pubis, ndlr), avec une grosse rééducation nécessaire. C'était la première fois que j'étais coupé du football alors que c'était ma vie depuis petit. Il a fallu remonter les marches, d'abord avec les U19 puis pour revenir petit à petit. En fin de saison, j'ai fait mes débuts chez les professionnels face à Dortmund. C'était un grand bonheur, surtout après tout ce chemin. Derrière, je jouais, mais pas énormément, j'avais un rôle de joker. J'ai quitté Francfort pour Hambourg, avec un peu plus de temps de jeu encore mais avec une relégation. Ç'a été un moment triste pour nous. J'étais très heureux avec l'équipe, le club, les fans. Puis j'ai signé à Fribourg. J'y ai trouvé de la régularité, des minutes et de quoi montrer ce que je peux faire.

«S'il y a un événement particulier, comme l'anniversaire de ma maman, je vais faire un écart...»

Il paraît que vous avez une diète spécifique...
Je suis vegan. J'essaye toujours de m'améliorer, de trouver de nouvelles choses. Je m'entraîne toujours avec mon papa, par exemple, et la nutrition fait partie de tout ce processus. C'est un aspect très important pour un athlète et pour un footballeur également. Ce sont des choses qui font qu'on s'améliore. J'ai lu pas mal de livres, j'ai parlé avec des spécialistes de la nutrition, et j'ai essayé pour voir comment je me sentais ensuite sur le terrain. Le feeling fut très bon et j'ai voulu garder ce régime car je me sentais bien avec. Donc je mange la grande majorité du temps vegan. Sans lait, oeufs ou viande. C'est bénéfique pour moi. Après, je mentirais en disant que je suis vegan à 100%... S'il y a un événement particulier, comme l'anniversaire de ma maman où elle cuisine quelque chose de vraiment bon (rires), je vais faire un écart. Mais la plupart du temps je suis vegan car je sens que c'est bon pour mes performances.

Ce n'est pas commun mais beaucoup d'athlètes, à l'image de Novak Djokovic en tennis, adoptent un nouveau style d'alimentation. Comment se passe la transition ?
Au début, bien sûr que ce n'est pas facile. Et parfois, ça l'est encore. Notamment lorsque je ne suis pas à la maison et que je ne peux pas décider de ce que je mange et cuisine. Quand tu es au restaurant ou que tu joues à l'extérieur, par exemple, ce n'est pas évident. Mais au fil du temps, tu expérimentes, tu sais ce que tu peux manger ou non. Parfois, j'amène mes propres repas. Tout ça, c'est de l'adaptation qui se met en place au fur et à mesure.

Il y a d'autres choses qui vous passionnent que le football ?
C'est simple à dire, mais ma famille et mes amis restent les choses les plus importantes pour moi. Après, je lis beaucoup de livres et je suis touche-à-tout. J'aime faire beaucoup de trucs qui me sortent un peu du football. C'est important de ne pas être connecté sans cesse. J'adore le football, j'adore jouer, je recherche la moindre amélioration, je regarde énormément de vidéos, mais il faut savoir en sortir un peu. Comme lire des livres, comme je le disais, ou pouvoir parler d'autres choses que du jeu avec ses amis et sa famille.

Comment vous définiriez votre style de jeu ?
Je ne suis pas un numéro 9 typique, disons. Je suis... (il réfléchit et sourit) Ce qu'on peut appeler parfois un 9 et demi ou presque un numéro 10. Je pense surtout que j'ai besoin de liberté sur le terrain pour trouver des espaces et surtout en créer. J'aime avoir le ballon, j'aime attaquer, j'aime participer au jeu. Et bien sûr marquer et donner des passes décisives. Mon objectif, c'est de créer du danger et de l'incertitude chez l'adversaire.

Luca Waldschmidt face à l'Argentine, pour sa première sélection chez les A. (Tim Groothuis/WITTERS/PRESSE S/PRESSE SPORTS)

En France, on a un joueur dans ce style, c'est Antoine Griezmann. Et de ce qu'on voit, c'est que c'est toujours agréable d'évoluer à côté de joueurs dans ce profil...
Oui ! J'ai d'ailleurs souvent dit que Griezmann était un joueur que j'aimais beaucoup et que j'essaye de regarder. Quand j'étais petit, j'adorais Ronaldo, le Brésilien, mais aujourd'hui, c'est Griezmann. Sa discipline et son activité sur le terrain, c'est exemplaire. C'est vraiment mon joueur. J'aime son style de jeu. Je ne dirais pas qu'on a le même, mais il y a des choses dans lesquelles je me retrouve et je m'identifie. C'est un top joueur. J'apprends beaucoup à le voir jouer.

Avez-vous le sentiment qu'aujourd'hui, un numéro 9 doit davantage réfléchir ?
Oui mais il n'y aura jamais de solution unique. On peut dire qu'un numéro 9 peut évoluer comme un numéro 10 mais il y a des joueurs avec un jeu très typique d'avant-centre qui sont excellents à la fois pour marquer, jouer en pointe, et faire le jeu. Cela dépend aussi de l'entraîneur et du plan avec le ballon. L'exemple de Pep Guardiola rentre dans cet aspect-là. Il veut tout le temps jouer avec le ballon, faire des passes, des passes, des passes, mais il aligne Sergio Agüero. Ce n'est pas un joueur imposant physiquement mais c'est un joueur de surface qui va également participer au jeu. C'est un peu la même chose pour Robert Lewandowski au Bayern, avec des schémas qui sont mis en place pour que le ballon lui arrive.

Il y a d'autres qualités requises, comme le jeu sans ballon, ou ce qu'on appelle en Allemagne le gegenpressing, cette pression à la perte de balle. C'est quelque chose d'important ?
Bien sûr que ça l'est ! Je pense que beaucoup d'équipes exécutent aujourd'hui ce gegenpressing. On le fait également à Fribourg, et c'est une évolution très positive avec cet objectif de récupérer le ballon le plus rapidement possible. Et surtout, de mettre l'adversaire dans une mauvaise posture.

Fribourg change régulièrement de systèmes, d'un 4-4-2 au 5-4-1.
Je crois que les deux me vont (rires). Ça me permet de jouer en pointe ou dans une position plus intermédiaire. Je suis assez flexible par rapport à ça. Ma position n'est pas arrêtée, et je ne dirais jamais que je suis un 9, un 10 ou autre... Je joue dans plusieurs positions et je me sens bien dans différents rôles. Mais toujours proche de l'axe et près du but, où je peux tirer et trouver des solutions pour nous amener au but. Le reste ne compte pas tant que cela...

On dit souvent que la Bundesliga est un Championnat offensif, avec beaucoup de buts et de rythme. En tant qu'attaquant formé en Allemagne, comment vous voyez cela ?
Je crois que la Bundesliga a déjà un très bon niveau en Europe, avec d'excellents joueurs. La grande majorité des équipes essayent de développer un jeu porté vers l'attaque. On ne voit jamais des équipes à 10 défenseurs qui jouent le contre. C'est très bien, à la fois pour les attaquants mais aussi pour les jeunes joueurs qui jouent en Allemagne. Vous pouvez le voir à Dortmund par exemple : ils pratiquent un beau football avec une équipe très jeune. C'est aussi le cas à Fribourg. Le club met en avant de jeunes joueurs et on le voit au fil des années car des joueurs s'exportent à l'étranger. La Bundesliga est un Championnat avec des possibilités de développement.

«Avec l'Allemagne, on peut faire quelque chose de grand dans les années à venir»

Vous faites partie d'une nouvelle génération de joueurs en Allemagne. Qu'est-ce que cela représente ?
En équipe nationale, je suis vraiment un petit nouveau, et il y a énormément de bons jeunes joueurs. L'idée, c'est de créer quelque chose ensemble pour faire une bonne équipe. Le bon côté, c'est que l'on a du temps pour progresser tous ensemble. C'est du long-terme et c'est important. Je veux en être. Faire partie de cette génération, c'est une bonne chose. Il y a énormément de joueurs qui sont nouveaux, l'expérience varie en fonction de chacun et l'équipe nationale a un bon mix, aujourd'hui, entre ces catégories de joueurs. On peut faire quelque chose de grand dans les années à venir.

De l'extérieur, on voit beaucoup de nouvelles choses qui viennent du football allemand : idées, tactiques, entraînements, technologie... Le pays est en avance ?
Je ne connais pas les méthodes des autres pays, mais les entraîneurs allemands sont bons et innovants. Il y a un bon accompagnement et une éducation au football qui est développée. Ce sont les raisons qui expliquent que beaucoup de jeunes entraîneurs marchent bien en Bundesliga. En Allemagne, le travail est bien fait au niveau de la formation des coaches mais également des jeunes joueurs.

Avant l'équipe nationale, il y a eu pour vous l'Euro Espoirs l'année dernière et ces 7 buts en 5 matches.
Je m'en souviens toujours. C'est quelque chose de spécial pour moi et un moment marquant de ma carrière. On avait une très bonne équipe, un très bon entraîneur, et l'atmosphère était vraiment excellente. La finale n'a évidemment pas tourné comme on l'espérait (défaite face à l'Espagne, ndlr) mais, pour moi spécialement, ç'a été un moment important et grisant. Être le meilleur buteur de la compétition et faire un bon tournoi, ç'a été une nouvelle étape de franchie dans ma carrière. J'ai gagné en confiance.

Ce fut également l'opportunité de se faire connaître un peu plus en dehors de l'Allemagne...
Comme je l'expliquais, lors mes 2-3 premières années dans le football professionnel, je n'avais pas une place de titulaire. Je jouais, bien sûr, mais sans faire parler de moi. En Allemagne, certains coaches et joueurs savaient qui j'étais, mais après ce tournoi, plus de gens m'ont vu jouer, connaissaient mon nom, et ont pu voir qui j'étais et quel était mon style de jeu. Ç'a été positif dans ce sens.

Qu'est-ce qui pourrait vous arriver de mieux désormais ?
Je crois que dans la situation actuelle, déjà, ce qui serait bien, pour moi et tout le monde, c'est d'être en bonne santé... (rires) Avec mon club, j'espère que l'on va bien finir la saison. Il faut que l'on continue sur notre rythme. Et à titre personnel, j'ai un rêve, c'est de jouer la Ligue des champions. C'est un objectif que je veux atteindre. Tout ceux qui jouent au football veulent y participer et gagner des titres.»

Antoine Bourlon

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