Soccer Football - Premier League - Aston Villa v Manchester United - Villa Park, Birmingham, Britain - July 9, 2020 Manchester United's Paul Pogba celebrates scoring their third goal with Bruno Fernandes, as play resumes behind closed doors following the outbreak of the coronavirus disease (COVID-19) Shaun Botterill/Pool via REUTERS EDITORIAL USE ONLY. No use with unauthorized audio, video, data, fixture lists, club/league logos or "live" services. Online in-match use limited to 75 images, no video emulati (Reuters)

Lien vertical, complémentarité, influence à parfaire : comment fonctionne l'association Paul Pogba - Bruno Fernandes à Manchester United ?

C'était l'une des grandes curiosités de la reprise de la Premier League : Ole Gunnar Solskjaer allait enfin pouvoir associer Paul Pogba et Bruno Fernandes au milieu. Quelques semaines plus tard, le résultat est plutôt prometteur et Manchester United rayonne.

Un lien essentiel entre défense et attaque

En six rencontres débutées ensemble avec Manchester United, Paul Pogba et Bruno Fernandes ont enchaîné cinq victoires et un nul en Premier League. Depuis le 24 juin et leur première titularisation commune, aucune équipe n'a pris plus de points que les Red Devils (16), personne n'a autant marqué (18), et seul Burnley a encaissé moins de buts (3 contre 4). Si l'équipe dirigée par Ole Gunnar Solskjaer est portée par la réussite indécente de son trio offensif Greenwood-Martial-Rashford (13 buts inscrits pour seulement 5,9 xG cumulés sur la période !), les deux milieux de terrain sont évidemment au coeur de la forme étincelante des Mancuniens en Championnat. Comme attendu, l'arrivée du Portugais puis le retour de blessure du Français ont apporté un liant qui manquait cruellement depuis le début de la saison.

Entre une défense solide (la deuxième de Premier League) et une attaque qui ne demandait qu'à être mise sur orbite, le duo Pogba-Fernandes crée du lien, apporte de la maîtrise et de la créativité. MU a vu sa moyenne de possession de balle augmenter sensiblement (de 55 à 61%) et ses difficultés face aux blocs bas ressemblent désormais à de vieux souvenirs. Avant l'arrêt des compétitions, les partenaires du champion du monde 2018 n'avaient remporté que trois matches sur dix lorsqu'ils affichaient au moins 60% de possession (pour 1,2 point récolté en moyenne). Ils en sont à quatre sur cinq depuis la reprise (2,6 points par match) ! Envolées, la stérilité frustrante et l'identité fluctuante de la première partie de saison. Désormais, en grande majorité, Manchester United est capable de dicter le tempo grâce à ses deux playmakers, même si l'absence d'adversaires classés dans le top 6 invite à la prudence.

Des rôles complémentaires bien définis

Impatients de voir (enfin) les deux coéquipiers à l'oeuvre, supporters et observateurs ont eu l'agréable surprise de constater que les deux hommes ne se marchent pas dessus. Loin de là. Au contraire, les rôles sont clairement définis et habilement répartis : Paul Pogba est l'homme de la construction, qui vient soulager ses défenseurs centraux à la relance, fait remonter le bloc et exploite la qualité de son jeu long ; Bruno Fernandes est l'homme du dernier tiers, des prises de risque, des passes qui tuent... et des coups de pied arrêtés (déjà cinq penalties et un coup franc direct transformés depuis ses débuts en février).

L'ancien capitaine du Sporting CP bat des records de précocité depuis son transfert au mois de janvier (9 buts et 8 passes décisives en 18 matches). Un rendement qui soulage grandement, aussi, un Paul Pogba qui a longtemps dû être au four et au moulin dans une équipe dysfonctionnelle. Ce n'est pas parce que l'ancien Turinois sait tout faire qu'il doit être obligé de tout faire, et ç'a régulièrement été le cas depuis son retour dans le nord de l'Angleterre il y a (déjà) quatre ans. Sa place dans le onze de départ retrouvée après une très longue absence, la Pioche brille à la récupération (seuls Maguire et Lindelöf ont gratté plus de ballons depuis six matches) comme à la création (10 passes clés délivrées, seulement devancé par... Fernandes, 16).

Matic, l'indispensable troisième homme

L'influence du duo franco-portugais est grandement facilitée, il faut le dire, par le retour en grâce de Nemanja Matic dans l'entrejeu. Le milieu de terrain serbe, 32 ans, avait perdu la confiance d'Ole Gunnar Solskjaer, qui misait régulièrement sur la paire McTominay-Fred, mais s'est révélé comme étant le parfait gage d'équilibre aux côtés de Pogba et Fernandes. En 4-2-3-1 sur le papier, la formation du stratège norvégien s'articule régulièrement comme un trident au milieu, Matic apportant la sécurité nécessaire à la liberté positionnelle de ses deux partenaires.

Sa discipline, sa lecture du jeu, sa propreté technique comme son aptitude à s'insérer au niveau de ses centraux pour faciliter la relance ont rappelé récemment quel type de joueur est l'ancien de Chelsea : une valeur sûre, solide, fiable, intimidant et déterminant. Si Scott McTominay a été (ré)intégré à Crystal Palace lors de la précédente journée (2-0), il n'incarne pas encore une alternative de même niveau, puisqu'on a régulièrement vu Paul Pogba décrocher très bas et devoir porter le ballon jusqu'au rond central pour démarrer les actions à Selhurst Park.

Le duo majeur est en fait un trio, Nemanja Matic venant idéalement compléter les qualités de Paul Pogba et Bruno Fernandes. (Reuters)

Une relation à parfaire, malgré tout

Rarement mis en difficulté en Championnat depuis la reprise, par des adversaires de bas de tableau (Brighton, Bournemouth, Aston Villa, Crystal Palace) ou peu agressifs sans ballon (Tottenham, Sheffield), Manchester United a en revanche été sérieusement bousculé la semaine passée par Southampton (2-2). Le pressing intense et réputé des hommes de Ralph Hasenhüttl a notamment mis en difficulté un Paul Pogba qui n'a pu délivrer que 24 passes, contre 65 en moyenne sur ses cinq autres titularisations ! Idem pour Bruno Fernandes (25 passes réussies contre 44 en moyenne). Ce soir-là, les deux hommes n'ont réussi à échanger que quatre passes en 64 minutes, soit trois fois moins que leur moyenne. Réussir à déjouer ce genre d'opposition dans des matches à haute intensité sera une clé de la viabilité du duo à plus long terme.

Quelques séquences verticales entre les deux hommes face aux Saints ont d'ailleurs pu donner des indices positifs en ce sens. Quoi qu'il en soit, si leur relation technique apparaît naturelle, qu'ils apprécient combiner ensemble et que trois buts ont été inscrits ces dernières semaines sur une passe de l'un à l'autre, Pogba et Fernandes ne forcent rien. Lorsqu'il initie les actions dans sa propre moitié de terrain, le Français recherche très rarement son compère portugais, qui sait se faire oublier pour être servi plus haut, entre les lignes et face au jeu. Le numéro 18 reste néanmoins un relais privilégié de son numéro 6, et vice-versa, sans que le total (82 passes échangées en 458 minutes en commun sur les six rencontres étudiées) ne soit pharaonique. Preuve que si leur entente est une clé de la réussite actuelle des Red Devils, ils n'en sont pas les seuls garants.