Soccer Football - Champions League Final - Manchester City v Chelsea - Estadio do Dragao, Porto, Portugal - May 29, 2021 Manchester City manager Pep Guardiola and Chelsea manager Thomas Tuchel Pool via REUTERS/Carl Recine (L'Equipe)

Finale de la Ligue des champions : L'épée de Pep Guardiola s'est brisée sur le bouclier de Thomas Tuchel

Dans une finale à haute intensité, Chelsea s'est offert Manchester City (0-1) pour soulever la coupe. Cette victoire, c'est aussi celle de Thomas Tuchel sur Pep Guardiola, celle d'une défense de fer face à un secteur offensif impuissant. 

L’épée contre le bouclier. Le marteau contre l’enclume. C’est ce à quoi l’on s’attendait pour cette finale opposant Manchester City à Chelsea. Une opposition de style nette, entre une équipe offensive, de possession, et une équipe à l’assise défensive, de transition. Celle-ci a tourné en faveur des Blues de Thomas Tuchel à Porto, rappelant que tout titre passe obligatoirement par une bonne défense. Ce soir, le constat a été saisissant entre une défense mancunienne perpétuellement sur la corde raide, et une arrière-garde londonienne aussi solide et souple qu’une cotte de maille. On pensait que le rythme allait être donné par l’escouade de Pep Guardiola. L’Allemand devant, lui, s’adapter, s’ajuster pour suivre la danse. L’hypothèse prenait de l’épaisseur en voyant la composition des équipes. Aligner Gundogan, Bernardo Silva, Foden, De Bruyne, Mahrez et Sterling ensemble, sans sentinelle. Le pari semblait ambitieux et clairement tourné vers l’offensif pour péter le verrou de Chelsea. Il a tourné à la débâcle lors du premier acte. 

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Les Citizens se sont cassés les dents

Véritable innovation, le cocktail guardiolesque dévoilait ses ingrédients lors des premières minutes de jeu. Sans surprise, Kevin De Bruyne occupait le front de l’attaque dans une position de 9 et demi. Riyad Mahrez et Sterling quant à eux mangeaient leur ligne. Phil Foden et Bernardo Silva alternaient leurs montées et se retrouvaient membres d’une ligne de 4 offensifs. L’objectif était limpide : étirer au maximum la défense à 5 de Chelsea pour créer une brèche dans laquelle s’engouffreraient avec joie KDB, Foden ou Silva. Il n’en a rien été. A chaque fois les Citizens se sont cassés les dents sur le mur bleu. Car à Chelsea, les défenseurs se connaissent sur le bout des doigts. Contrairement à son homologue espagnol, Thomas Tuchel n’a rien changé et s’est appuyé sur une recette de longue date : une défense à 5 courageuse, solidaire, avec énormément de cœur. Parmi les 3 centraux, César Azpilicueta et Antonio Rudiger sortaient très haut lorsque le ballon arrivait dans les 35 derniers mètres. Des sorties qui ont posé énormément de soucis aux Skyblues en phases offensives. Les seules fois où Thiago Silva et ses coéquipiers étaient mis en danger intervenaient lors de contres initiés par Ederson, lorsque le bloc londonien n’était regroupé. Comme à la 7e minute, où le portier brésilien envoyait un missile dans les pieds de Sterling, laissé trop libre par Reece James. Exactement le même cas de figure au quart d’heure de jeu, après un corner. Mais à chaque fois, soit James (7e), soit Kanté (15e), laissaient traîner une patte. 

Le bouclier devient épée

Épaules rehaussées, visages attirés par le ballon, regards concentrés. Les défenseurs de Chelsea étaient aux aguets, comme guidés par un 6e sens dans un schéma tactique qu’ils connaissent parfaitement. Coulissant aussi bien qu’un trombone, solidaires à souhait. Ils n’ont absolument rien laissé à leurs adversaires. Lorsque les mailles étaient toutes proches d’être percées, une jambe traînait, un joueur couvrait, un coéquipier taclait. Rüdiger devant Foden in-extremis et de manière magistrale (27e), le sauvetage d’Azpilicueta sur un centre chaud (67e) ou l’intervention de Christensen devant Foden en fin de match (89e), les Blues se sont jetés comme des dératés sur les ballons. Et la sortie du capitaine de la défense, Thiago Silva, blessé (39e), remplacé par le Danois, n’a en rien affaibli la solidité de Chelsea. Ni les réajustements tactiques, certes tardifs, de Guardiola, qui ajoutait un 6 (Fernandinho) et deux 9 (Agüero et Gabriel Jesus) en fin de match.

Le bouclier s’est même mué en arme offensive à la récupération. Actifs au pressing dans leurs 30 derniers mètres, les Blues se ruaient à l’attaque dès le ballon récupéré, comme N’Golo Kanté, sans réussite (36e). Les joueurs de Tuchel profitaient à merveille de l’absence de sentinelle du côté de City, et d’un schéma complètement déséquilibré à la perte de balle, qui ressemblait parfois à un 3-3-4 lorsque Zinchenko intégrait le cœur du jeu. Sur le reculoir, les champions d’Angleterre prenaient les vagues bleues de face et pliaient finalement face à Havertz (1-0, 42e). L’addition aurait pu être plus salée sans la maladresse de Werner. Si les Blues reculaient de plus en plus lors du second acte, jamais ils n’ont cédé. Bien soulagé par un Kanté encore stratosphérique devant la défense. Sabotage involontaire de Pep Guardiola ou récit tactique de Thomas Tuchel, la question se posera. L’Allemand sort dans tous les cas vainqueurs du match, fort d’un système solide, véritable ôde à la solidarité, qui a hissé Chelsea sur le toit de l’Europe. 

Corentin Richard