kamara (boubacar) boulaya (farid) (F.Porcu/L'Equipe)

Farid Boulaya (Metz) : «Le dribble, c'est en moi»

Acteur d'un début de saison encourageant pour les Messins, Farid Boulaya a une relation particulière avec le dribble. Il décrit cet attachement pour FF.

«Que signifie le dribble pour vous ?
Quand j’ai commencé à jouer au foot, c’est la chose qui me plaisait le plus. Dans mon quartier, on était un peu tous comme ça, on aimait bien dribbler. On faisait ça tous les jours. Moi, c’est ce qui me fait prendre le plus de plaisir.
 
Question dribbles, qui le jeune Farid Boulaya avait-il envie de copier ?
Il y avait (Zinédine) Zidane, Ronaldinho, (Hatem) Ben Arfa, Cristiano Ronaldo… Souvent, on regardait les vidéos sur YouTube, les vidéos joga bonito. Ensuite, on travaillait ça lors des matches sur les city stades ou lors de un contre un. On prenait un ballon et on s’amusait à dribbler. C’est l’une des meilleures époques du foot : on ne se prenait pas la tête.
 
Petit à petit, en grandissant, le dribble est toujours resté collé à vous…
Oui, toujours. C’est en moi. Dribbler, ça me procure du plaisir.

«On ne m'a jamais interdit de dribbler»

Un éducateur ou un entraîneur vous a-t-il déjà dit d’arrêter de dribbler ?
(Il sourit.) Il y en a eu beaucoup ! Pas forcément chez les jeunes mais plus dans le circuit professionnel. On me demandait de moins dribbler, surtout dans des zones où il ne faut pas. Après, on ne m’a jamais interdit de dribbler. Aujourd’hui, j’en parle souvent avec Frédéric Antonetti. Il me dit de conserver ce foot de rue, mais de ne pas en abuser et de ne pas le faire dans des zones où il ne faut pas, mais plutôt dans les trente derniers mètres adverses. Mais il faut le garder car tout le monde ne peut pas le faire.
 
Vous souvenez-vous d’un dribble dangereux qui a pu donner un but à l’adversaire ensuite ?
Je me rappelle avoir tenté un petit pont à l’entrée de la surface et avoir pris un but. C’était en 18 ans, quand j’étais à Istres.

Le dribble peut aussi rendre fous les défenseurs, surtout s’ils sentent que vous dribblez davantage pour humilier…
C’est vrai que ça peut les énerver. Cela dépend du genre de dribbles. Et c’est vrai que j’ai pris pas mal de coups. Avec Istres, on avait joué contre Ajaccio en U17 Nationaux. Il y avait une mauvaise ambiance : chez eux, ils nous avaient un peu fait la misère. Chez nous, comme je suis de Marseille, tout mon quartier était venu. Ça se passait bien. On gagnait 6-0. Et, c’est vrai, à la fin, j’ai fait des trucs pour un peu les énerver et pour que mes collègues de mon quartier se moquent un peu d’eux. J’ai fait prendre deux cartons rouges de suite. Je suis parti en dribbles, un joueur m’a taclé, je suis resté par terre et il a pris un carton rouge. Dès que j’ai vu qu’il l’avait pris, je me suis tout de suite relevé exprès pour les énerver. Sur le coup franc, je demande à mon coéquipier de me redonner la balle et je suis reparti tout de suite en dribbles. Un autre joueur est venu me mettre un autre gros tacle : carton rouge !
 
Quels) geste(s) technique(s) privilégiez-vous ?
J’aimais bien la virgule, comme celle de Ronaldinho. Mais, ma spéciale, c’est un seul passement de jambe avec un crochet pied gauche.
 
Avez-vous en tête le plus beau dribble que vous avez effectué sur un terrain ?
Chez les jeunes, j’avais fait une virgule-petit pont contre Saint-Étienne en U17 Nationaux. Je m’en souviens très bien. La sensation est sympa. Quand je jouais à Istres, comme je vous disais, mes amis de mon quartier venaient souvent me voir et, ensuite, on en rigolait ensemble. Souvent, et même encore aujourd’hui en pros, ils me demandent de ne faire que des dribbles (Il sourit.). Si je ne pouvais faire que ça dans un match, ça leur plairait. Chez les pros, avec Clermont, contre Le Havre, j’avais un ballon en profondeur, j’ai fait passer le ballon derrière la jambe d’appui, le joueur est venu et j’ai tapé le ballon avec l’autre pied, cela a fait un grand pont (NDLR : La vidéo du dribble à partir de 2:10 de la vidéo ci-dessous)

«Ma spéciale, c'est un seul passement de jambe avec un crochet pied gauche.»

On a aussi envie de vous parler d’un autre dribble, cette fois face à Clermont, avec Metz…
Je reçois le ballon dos au but, à l’entrée de la surface. Je vois que le défenseur arrive vite. Je fais comme si je ne l’avais pas vu et je tape le ballon un peu extérieur pour le faire monter. Cela passe au-dessus du défenseur. Il m’accroche le maillot et je ne peux donc pas continuer. Il y a eu coup franc, et je l’ai marqué.

Quelle est votre relation avec le petit pont ?
J’aime bien. Je ne le cherche pas en permanence, mais il y a des situations où tu sais que l’occasion va se présenter. Selon où est positionné le ballon et où il arrive, il y a beaucoup de chance pour que les jambes de l’adversaire soient écartées. Ce sont ces moments-là où il faut le tenter.

«De moins en moins de dribbleurs en Ligue 1»

Diriez-vous que le dribbleur est un peu trop pointé du doigt ?
C’est vrai que, certaines fois, ça doit agacer les autres joueurs et les spectateurs. Mais je trouve qu’on manque de dribbleurs, et que c’est bien d’en avoir dans une équipe pour pouvoir créer quelque chose ou débloquer une situation.
 
Dans France Football, Allan Saint-Maximin disait : "Un dribbleur doit gagner sa liberté. Parce que si tu es trop souvent en échec, tu compromets tout le monde."
C’est vrai, bien sûr. Si tu es un dribbleur et que ça ne fonctionne jamais, ça va énerver tout le monde et ça ne va plus servir à rien. Si tu fais ça, il faut au moins que ça aboutisse sur quelque chose de dangereux ou sur une action décisive la moitié du temps.
 
En tout cas, les dribbleurs doivent subsister dans le football…
Oui ! Quand je regarde un match de foot, j’aime bien regarder s’il y a au moins un joueur qui dribble. Je vais alors le regarder par rapport à ça. Aujourd’hui, forcément, il y a Neymar, qui doit être le meilleur dans ce domaine.
 
Y a-t-il assez de dribbleurs en Ligue 1 ?
Il y en a de moins en moins. Peut-être que les clubs en veulent de moins en moins…
 
Pour finir : Farid Boulaya est-il le meilleur dribbleur du FC Metz ?
(Il sourit.) Je ne sais pas… Il y en a quelques uns…
 
Qui se débrouille bien ?
Je pense à Opa Nguette et moi. On ne se lance pas de défis mais il tente et réussit pas mal de dribbles. C’est mon concurrent du dribble à Metz.»

Timothé Crépin