delev (spas) rabiot (adrien) (P.Lahalle/L'Equipe)

Équipe de France : Adrien Rabiot, l'heure de la maturité ?

De retour en équipe de France après plus de deux ans d'absence et de coups-bas, Adrien Rabiot bénéficie de l'appui de Didier Deschamps et de Noël Le Graët. Reste à prouver qu'il a bien grandi.

«J'avais toujours dit qu'il s'agissait d'une bêtise de gamin.» En une seule phrase, Noël Le Graët a passé l’éponge. Adrien Rabiot, le joueur qui avait refusé une place de réserviste à l’aube de la Coupe du monde 2018, est revenu à Clairefontaine la tête haute. «Le plus puni, c'est lui, a assuré président de la FFF à Ouest-France. On n'allait pas écarter un garçon de 21 ans.» Dans la réalité, le «gamin» se trouvait à moins de dix jours de souffler ses 23 bougies. Mais dans le cas Adrien Rabiot, la maturité ne semble pas liée à l’âge, plutôt à la liberté que veut bien lui accorder son entourage. En janvier encore, Véronique Rabiot, la mère et agent du milieu de la Juventus, fustigeait le président de la Fédération. «Aujourd'hui, tout à fait droit dans mes bottes, je vous dis : ''M. Le Graët est un menteur''.»

Août 2020, Rabiot a 25 ans, et tout a changé. Le président a même oublié. «Punir quelqu'un éternellement est grotesque, a lancé Le Graët. Je suis très content qu'il revienne. La règle qu'on avait fixée avec Didier, c'était de le rappeler, dans un délai raisonnable et si ses performances le permettaient. Sur ce point, au regard de ce qu'il a réalisé cet été, il n'y a pas de débat.» Si Rabiot a signé sa première saison depuis 2014 sans la moindre passe décisive, son impact sur le jeu turinois a prouvé son intelligence, sa vision du jeu et son expérience pour allier repli défensif et déploiement offensif. Qu’on en vienne à reparler de jeu apparaît surréaliste, au souvenir de cette situation inédite. Mais l’évolution semble satisfaire toutes les parties.

Deschamps ne demande aucune excuse

Lundi, pour la rentrée des classes des Bleus, la maman n’a pas pu tenir la main de son fils jusqu’au portail de Clairefontaine, protocole sanitaire oblige. Un premier pas vers l’indépendance, vers des choix plus judicieux et respectueux de la sélection ? Le joueur s’est adapté très facilement au groupe, comme s’il n’avait jamais quitté le château, et la puérile bataille avec Didier Deschamps a été mise de côté. Le sélectionneur y était pourtant allé fort, notamment le 7 décembre 2018, sur le plateau de beIN Sports. «Je ne ferme pas la porte, mais j’ai l’impression que vous me parlez d’un joueur qui a été très bon avec l’équipe de France. Si c’est le cas, regardez les cinq matchs (six, NDLR) qu’il a fait avec nous.» Un clash qui contraste avec le sourire (masqué) de cette semaine. «Adrien, comment ça va ?» L’accueil a été bref, cordial, avant une discussion plus intime dans la soirée.

«On discutera, on parlera, avait ainsi confié Deschamps à beIN Sports le matin même. Il aura son propre ressenti, il s’exprimera s’il a envie de s’exprimer, je lui laisse la liberté de dire ce qu’il veut. Le plus important, c’est ce qu’on se dira en tête à tête, et c’est le cas avec chaque joueur.» Le leader des Bleus le sait, le sent, cette décision le grandit, et prouve son sens du management. Désormais, chacun doit travailler de concert, en faisant fi des différends. «Depuis ce qu’il s’est passé il y a deux ans, je n’ai jamais attendu ni exigé d’excuses, qu’elles soient officielles ou publiques, de la part d’Adrien Rabiot. Il s’est passé ce qu’il s’est passé, on ne peut pas revenir en arrière. Je ne demande rien, je ne veux pas lui demander quoi que ce soit.» Si, des performances sur le terrain. Elles seront la seule preuve d’un véritable changement.

Théo Troude