cornet (maxwell) oudin (remi) (N.Luttiau/L'Equipe)

De Sarreguemines à Reims en passant par Santiago Bernabeu : Portrait de Rémi Oudin, la révélation du Stade de Reims

Pour sa première saison dans l'élite, Rémi Oudin est co-meilleur buteur du Stade de Reims (4 réalisations). Peu connu du grand public, le joueur de 22 ans fait partie des révélations de la saison en Ligue 1. Portrait.

«Il est jeune, il a encore une grosse marge de progression. Il entame tout juste sa carrière...» Même s'il est encore perfectible, Rémi Oudin est, à l'instar de son équipe, le Stade de Reims, l'une des sensations de la saison en Ligue 1. Né à Châlons-en-Champagne, c'est en Moselle qu'il foule pourtant ses premières pelouses. «On a joué au foot ensemble quand on était gamin, et depuis on n'a jamais perdu contact. Un peu comme tout le monde, il était sérieux. On aimait aussi aller jouer au foot dehors, vous savez quand on avait un ballon, on était content», se souvient un proche du joueur, qui a préféré garder l'anonymat. «J'avais un jardin, où mon père m'avait fait un grand but avec un pare-ballon, une petite entrée et un petit tunnel. On avait des rétroprojecteurs, on jouait la nuit et on s'imaginait faire des matches de Ligue des champions», ajoute-t-il. A douze ans, la puberté à peine entamée, Rémi Oudin est repéré par le FC Metz. «On a joué ensemble que de quatre à six ans, ensuite il est parti plus sur Sarreguemines, moi j'ai continué là où j'étais. Mais il me semble qu'on l'a repéré, du coup il a fait des détections et il a été pris à Metz», raconte ce proche. Son père ayant déménagé à Reims alors qu'il était âgé de 15 ans, Rémi Oudin se voit obligé de quitter la Moselle pour la Champagne.

Franck Chalençon, qui a accueilli Rémi Oudin au Stade de Reims, raconte l'arrivée du jeune homme au club : «Il est venu avec son papa quand il avait quinze ans, ils m'ont expliqué la situation. A l'époque j'avais en charge les U17, et, je sais pas, sans même lui avoir fait passer de tests, je lui ai dit "on te prend".» Mais malgré des capacités techniques déjà évidentes, Rémi Oudin met du temps à s'imposer dans les équipes de jeunes du Stade de Reims. «En première année de U19, il ne jouait pas. Il lui manquait quelque chose sur le plan mental. C'était un joueur d'entraînement. On voyait des qualités, on voyait plein de choses mais quand il jouait, il ne se passait rien. Du moins, il n'y avait ni de passe décisive, ni de but. C'était neutre», explique Franck Chalençon. Un manque que le jeune joueur n'a pas tardé à combler. «L'avantage, c'est que c'est quelqu'un qui était à l'écoute, qui prenait les messages. Je pense que le déclic a été la deuxième année de U19, où il a vraiment pris conscience de certaines choses. Il s'est mis à avoir ce petit côté tueur, plein de sang-froid. Ça a été un des grands artisans du titre de champion de France U19 en 2015», ajoute son ancien entraîneur.

Auréolé de ce titre, Rémi Oudin est lancé dans le grand bain par Michel Der Zakarian face à Valenciennes, en 2016-17. Son premier but, il l'inscrira trois jours plus tard... sur la pelouse du Real Madrid, à l'occasion de la 37e édition du trophée Santiago Bernabeu. Un souvenir dont il se rappellera toute sa vie. «Le match à Bernabeu, c'est son souvenir le plus important. C'est sa première préparation avec le groupe pro, il y a le match à Madrid qui tombe, il se retrouve sur le terrain à la mi-temps et il marque. On n'avait pas fait le déplacement à Madrid, mais moi personnellement j'en avais les larmes aux yeux», raconte Franck, un ami d'enfance de Rémi Oudin. «Sur le coup, il n'a pas réalisé ce qui lui arrivait, c'est surtout le lendemain. Mais quand il a compris qu'il avait inscrit son premier but sur la pelouse du Bernabeu, ça lui a fait très plaisir. C'est quelque chose qu'il n'oubliera pas», ajoute notre premier témoin.

«Marquer son premier but pour son deuxième match sur la pelouse du Real Madrid, ça fait plaisir»

Après un titre de champion de France de Ligue 2 glané la saison dernière, Rémi Oudin découvre la Ligue 1 à 21 ans. David Guion, entraîneur du Stade de Reims, nous explique alors comment il veut utiliser son jeune joueur. «Ce que je souhaite, c'est que Rémi soit dans le meilleures conditions pour apporter sa qualité de passe et son adresse devant le but. C'est ce que je recherche à travers sa position. Il est souvent ouvert face au jeu avec son pied gauche, de façon à, soit faire la dernière passe, soit prendre sa chance sachant que c'est un garçon adroit.» Un choix payant, puisqu'en vingt et une apparitions en Championnat cette saison, Oudin en est à quatre buts (co-meilleur buteur du club avec Mathieu Cafaro). Un chiffre qui devrait être bien plus élevé pour son entraîneur. «En toute sincérité, il le sait très bien. On en a discuté ensemble, il devrait déjà être à sept ou huit buts, même en étant raisonnable. Il y a encore un cap à franchir, ajoute Guion. Il a déjà beaucoup progressé depuis le début de la saison. Je ne suis pas inquiet pour sa marche en avant. C'est un très jeune joueur, je rappelle que la saison dernière, il n'était pas titulaire en Ligue 2, il a commencé à jouer à partir de janvier. C'est un garçon qui a saisi sa chance, qui est en train de découvrir la Ligue 1, il n'a pas encore beaucoup de matches, il faut y aller doucement, il est encore en apprentissage», termine-t-il.

«Le vestiaire est à son image»

En dehors du terrain, le jeune homme fait également l'unanimité. Arrivé au sein du groupe professionnel à l’âge de 19 ans, le jeune attaquant s’est vite intégré au sein de l’effectif champenois. «Il était dans le groupe pro avant que moi j’y sois, donc je ne saurais pas vous dire au tout début. Mais je sais que depuis deux ou trois ans, le groupe professionnel vit super bien et il est constitué de jeunes et d’anciens qui aiment rigoler, et c’est vraiment un vestiaire pour lui. Le vestiaire est à son image. Il aime bien chambrer mais toujours dans la bonne humeur, jamais dans la méchanceté», explique Nicolas Lemaître, gardien au Stade de Reims.

«On a un rituel dans le vestiaire. A tous les anniversaires ou toutes les prolongations de contrat, on se fait soit une après-midi pizza, soit une soirée restaurant. Et Rémi, il est considéré comme quelqu’un qui prolonge tous les six mois. Souvent, quand on paye le restaurant, on paye à deux ou trois, et lui il est souvent chambré parce qu’il est soi-disant passé dans une catégorie au-dessus et que maintenant le restaurant il doit le payer tout seul», ajoute-t-il. Franck, son ami d’enfance, loue aussi sa jovialité. «Il a toujours eu ce côté chambreur mais c’est aussi quelqu’un de très timide. Quand il est entouré de personnes qu’il connait, quand il se sent à l’aise, il se lâche et il est vraiment chambreur. Il est vraiment marrant. C’est quelqu’un d’expressif et de très drôle. J’imagine que dans le vestiaire, il doit donner (rires).» Une personnalité que l’on ne retrouvait pas forcément sur le terrain dans sa jeunesse. «On espère tous qu’il fera la carrière qu’il mérite. C’est quelqu’un d’intelligent, il a eu son bac. Mais plus jeune, c’était un caractériel, il boudait facilement, il remettait tout sur la faute des arbitres, de ses coéquipiers. Je pense qu’aujourd’hui il est passé de joueur caractériel à joueur de caractère. Il a muri», conclut Franck Chalençon. 

Damien Irié