Cazarre (L'Equipe)

À lire dans France Football, le dernier tacle de Julien Cazarre : Ramos à la Pléiade

Comme chaque semaine, Julien Cazarre glisse son tacle à retardement dans France Football. Il revient cette fois sur l'Espagnol Sergio Ramos.

Qu'on soit espagnol, français ou chinois, qu'on soit parisien, barcelonais ou madridiste (comme Kevin de Grenoble ou Tariq de Montfermeil), on est obligé de s'incliner devant «le guerrier de la Casa Blanca». Avec son récent look de barbu tout droit sorti de Game of Thrones, le père Ramos a cloué définitivement le cercueil des sceptiques en entrant au panthéon du football européen.
 
Entre ici, Sergio, avec ton terrible cortège... (Cette phrase marche mieux avec Jessy Moulin, mais bon.) Je sais ce que vous pensez : «Il est mignon le André Malraux de comptoir, mais Sergio Ramos, il a tout gagné en club et avec l'Espagne ; donc t'arrives après la bataille, on dirait Willian qui entre à la 70e minute de Brésil-Allemagne en 2014.» Bon, premièrement, je ne suis pas un André Malraux de comptoir pour la simple et bonne raison qu'il n'y a plus de comptoir dans ce triste pays depuis le reconfinement. Et faudra pas s'étonner s'il y a un trou générationnel en termes de philosophes, on n'aurait jamais eu Voltaire et Diderot sans le Café Procope. Secundo, si je veux mettre en lumière le gardien du temple de Bernabeu, c'est parce qu'il vient de faire tomber un record, celui du joueur le plus capé d'Europe avec 177 sélections. Le record appartenait avant lui au grand Gigi Buffon, celui qui stoppa d'une main ferme la tête imprenable de Zizou en finale de Coupe du monde, pas celui qui avait des gants en peau de banane contre Manchester.

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Je ne vais pas vous mentir, les chiffres et les stats en général, ça m'éclate autant que les Chevaliers du fiel sur Télé Toulouse et, depuis que j'ai appris que Giroud avait dépassé Platoche au nombre de buts chez les Bleus et que Zambo Anguissa était meilleur dribbleur de Premier League, je prends ça avec des pincettes. Ce qui m'intéresse chez Sergio Ramos, c'est que c'est l'un des derniers dinosaures du foot qui fait vibrer les réacs du ballon rond comme moi. Sergio, c'est le mec qu'on aime détester et que tu as envie d'envoyer à Guantanamo quand il est contre toi, mais que tu rêves d'avoir dans ton équipe. Rien que pour me faire plaisir il a troqué son petit style métrosexuel à la Guti et échangé la crème de soin contre l'eau de Cologne, laissant proliférer une broussailleuse barbe digne des Vikings. Ramos, c'est la garce qui va mettre la pression sur l'arbitre à la moindre touche sifflée dans le mauvais sens et qui va jurer sur la tête des quatre générations de ses ancêtres qu'il jouait le ballon et que, si l'attaquant adverse avait la clavicule encastrée dans les côtes flottantes, c'était dû à une glissade.
 
Alors, bien sûr, des équarrisseurs y en avait déjà et y en aura toujours, sauf que lui, en plus, c'est le gars qui peut te faire une transversale de cinquante mètres les yeux fermés dans les pieds de l'attaquant et te sauver d'une débâcle à la dernière minute par un but à l'arrache. Le mec a marqué cent buts avec le Real en étant défenseur, un nombre qui doit faire frémir pas mal d'attaquants et je ne vise pas spécialement Christophe Dugarry (oui, je sais, les stats, na, na, ni, na, na, na), sauf que lui ne met pas des triplés contre Gijon ou Valladolid, il plante quand ça compte en mode «bon, les gars, je vais encore devoir faire votre boulot».
 
Là où c'est un pur génie, c'est qu'à l'instar de Zidane qui a marqué le coup de sa fin de carrière par un coup de boule, il a célébré son record en loupant deux penalties dans le même match, dont une panenka foirée. Ça, c'est une légende !

Ce qui m'intéresse chez Sergio Ramos, c'est que c'est l'un des derniers dinosaures du foot qui fait vibrer les réacs du ballon rond comme moi. Sergio, c'est le mec qu'on aime détester et que tu as envie d'envoyer à Guantanamo quand il est contre toi, mais que tu rêves d'avoir dans ton équipe.