Jul 4, 2019; Carson, CA, USA; LA Galaxy forward Zlatan Ibrahimovic (9) celebrates after scoring a goal in the second half at Dignity Health Sports Park. The Galaxy defeated Toronto FC 2-0. Mandatory Credit: Kirby Lee-USA TODAY Sports (L'Equipe)

Zlatan, superstar and stripes : comment Ibrahimovic a conquis les Etats-Unis et la MLS

Il est l'un des rares joueurs que l'on n'a pas perdu de vue lorsqu'il a traversé l'Atlantique. En même temps, difficile de le manquer, avec son mètre quatre-vingt-quinze de muscles et de douce arrogance. Et à la veille du quatrième derby de Los Angeles, tous les regards sont à nouveau braqués sur lui. Mais derrière les interviews provocantes et l'avalanche de buts, comment se passe vraiment le mariage entre le Z et les States ?

C’était il y a un peu plus d’un an, le 31 mars 2018. Toute première édition du Tráfico, derby de Los Angeles entre les Galaxy et le nouveau-né LAFC. L’affiche en elle-même avait de quoi susciter l’intérêt des Américains, toujours friands d’une bonne rivalité régionale. Mais les 27 000 paires d’yeux présentes au StubHub Center étaient rivées sur le banc de touche, où avait pris place la grande silhouette de Zlatan Ibrahimovic. Arrivé quelques jours auparavant en provenance de Manchester United, l’attaquant suédois entrait en jeu à la 71e minute et foulait pour la première fois la pelouse de son nouveau jardin sous les hourras angelenos. Une énième star vieillissante qui rejoint la MLS ? Que nenni. Six minutes et une reprise de volée de 30 mètres propulsée dans le but de Tyler Miller avaient alors suffi au Z pour balayer cette idée. Non, il n’a certainement pas fait 8 500 kilomètres pour faire de la figuration. Même à 36 ans.

Sur le terrain, devant les caméras

Un peu plus d’un an après ces débuts en fanfare, le géant suédois va retrouver, ce samedi, le LAFC pour le quatrième Tráfico de l’histoire. Et en bon showman qu’il était déjà avant d’arriver aux States, il a fait monter la sauce avec une bonne dose de trash talk (provocation verbale propre au monde du sport). «Carlos Vela a 29 ans, il est à l’apogée de sa carrière et il joue en MLS. Où j’étais, moi, à 29 ans ? Voilà», propulsait le Suédois à l’encontre de l’attaquant mexicain, autre star de la ville et de la MLS, comme pour prouver que, malgré la belle forme de l’ancien d’Arsenal, il reste de loin le meilleur joueur du continent.

Voilà comment Zlatan entretient sa flamme américaine. Punchline après punchline, but après but, le Suédois marque la MLS de son empreinte comme il l’a fait avec tous les clubs pour lesquels il a joué. Et efface la concurrence des anciens d’Europe qui jouent actuellement là-bas, ou qui l’ont précédé : «C’est encore un peu tôt pour comparer mais, même sans s’être qualifié pour les play-offs la saison dernière, il a déjà fait plus sportivement que les autres stars qui sont venues en MLS», affirme Antoine Latran, rédacteur en chef de Culture Soccer, site spécialisé sur le football nord-américain. Des précédents qui se nomment, mine de rien, David Beckham, Thierry Henry, Frank Lampard, Steven Gerrard, Andrea Pirlo ou encore Wayne Rooney. Mais aucun n’a allié l’influence de leurs noms à des performances de haut niveau comme le fait Zlatan. Avec 35 buts et 10 passes décisives en 43 matches, il est, en plus d’être un véritable hit de l’autre côté de l’Atlantique, l’atout sportif majeur d’une franchise qui veut revenir dans la lumière. «C’est lui le boss des Galaxy, poursuit Latran. Cette équipe est bâtie autour de lui et ça, c’est étonnant dans la MLS d’aujourd’hui qui mise de plus en plus sur les jeunes. Mais sportivement, ça fonctionne. Pour son âge, il a un impact incroyable.»

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«C'est lui le boss des Galaxy. Cette équipe est bâtie autour de lui et ça, c'est étonnant dans la MLS d'aujourd'hui qui mise de plus en plus sur les jeunes»

Joue-la comme Beckham

Un impact qui dépasse largement le terrain. Dès son arrivée à Los Angeles, la machine médiatique Zlatan était lancée : «Il y avait bien au-delà de 200 journalistes présents à se première conférence de presse, qui était traduite en trois langues, se souvient Kevin Baxter, journaliste au LA Times, dans un entretien à la Columbia Journalism Review. Et le nombre de personnes en zone mixte lors de son premier match, c’était du jamais-vu». Il est invité sur les plateaux de Jimmy Kimmel ou James Corden, et s’offre même une pleine page de publicité dans le très sérieux Los Angeles Times pour annoncer son arrivée : «Los Angeles, you’re welcome». Des espaces médiatiques rarement dédiés au football, et une excitation que la MLS n’avait pas connue depuis David Beckham.

Bien évidemment, il n’y a plus 200 journalistes aux conférences de presse de Zlatan Ibrahimovic. Mais force est de constater que, contrairement à d’autres joueurs venus d’Europe, Zlatan Ibrahimovic arrive à conserver une aura inédite dans l’histoire de la MLS. «La hype autour de Beckham a fini par s’évaporer, du moins dans les cercles du journalisme sportif, écrit Jon Allso pour la CJR. Ses performances étaient quelconques, et certains journalistes disent qu’il était plus préoccupé par le fait de se mettre en avant lui et sa femme auprès du gratin d’Hollywood (...) Zlatan est une toute autre bête, capable de combiner une image publique démesurée avec un véritable appétit sportif.» Un appétit sportif que le Suédois n’a, pour le moment, pas réussi à assouvir. Sa première saison en MLS, malgré ses stats folles, s’est soldée sur un relatif échec avec la non-qualification du Galaxy pour les play-offs. Cette année, à mi-saison et avec un Zlatan on fire, le club angeleno est 2e de conférence Ouest. Alors oui, Zlatan a conquis l’Amérique avec sa personnalité et son talent. Mais une victoire collective finirait certainement de convaincre tout le monde que c’est bien lui, l’étoile la plus brillante d’Hollywood.

Zlatan est une curiosité qui fascine, et il attire sur lui et sur le soccer la focale médiatique d’un pays où, si ce sport reste mineur, on sait apprécier le show et ses showmen. «La Ligue l’a surutilisé en termes de marketing, il est partout, note Latran. S’il n’était pas connu aux États-Unis avant d’arriver, la MLS a fait en sorte qu’il le soit. Un peu comme avec Pelé, quand il a signé au New-York Cosmos : personne ne l’a vu jouer, mais tout le monde sait que c’est l’un des meilleurs du monde.» Conséquence : où les Galaxy et Zlatan vont, le public suit. En octobre 2018, le Minesotta United battait ainsi un record d’affluence vieux de plus de 40 ans avec la réception du Galaxy, qui a vendu plus de 50 000 billets. Et bien sûr, le Suédois domine le classement des ventes de maillot en MLS, loin devant Carlos Vela, Josef Martinez et Wayne Rooney.

«S'il n'était pas connu aux États-Unis avant d'arriver, la MLS a fait en sorte qu'il le soit. Un peu comme avec Pelé, quand il a signé au New-York Cosmos : personne ne l'a vu jouer, mais tout le monde sait que c'est l'un des meilleurs du monde»

Alexandre Aflalo