Foto IPP/alberto sabattini verona 19-08-2017 Calcio Campionato di Serie A 2017/2018 hellas verona-napoli nella foto Thomas Heurtaux *** Local Caption *** (alberto sabattini/IPP/PRESSE S/PRESSE SPORTS)

Thomas Heurtaux : «En Italie, on trouve que les supporters du PSG sont complètement fous»

Défenseur central français de Salernitana en Serie B, Thomas Heurtaux vit l'état d'urgence en Italie de l'intérieur. Des entraînements adaptés à la vie quotidienne en passant par la vision italienne des supporters parisiens, il se confie à FF.

La vie pendant le confinement : «C'est tout le pays qui est à la maison»

«Dès les premières semaines, à Milan, ils ont commencé à fermer les écoles, puis ils ont tout fermé. Et là, depuis mardi, tous les bars et autres activités sont fermés. Il ne reste que les pharmacies et les magasins pour faire les courses. Vu que ça se propage assez rapidement, c'était la meilleure solution d'étendre ça à toutes les régions. Au début, ils disaient que les activités devaient être fermées à partir de 18 heures. Et après ils ont annoncé qu'ils fermaient tout, et qu'il fallait juste sortir en cas de nécessité. Moi j'habite en plein centre-ville de Salerne. J'ai vraiment la rue piétonne de la ville sous mon balcon. Et il n'y a plus personne qui passe. Il y a ceux qui baladent leur chien, comme moi, mais le moins possible. Et puis la police qui passe pour rappeler les règles de sécurité et faire des contrôles pour savoir qui sort et pourquoi. Du coup c'est tout le pays qui est à la maison. Je sais qu'il y a quelques usines qui continuent, mais ils parlent de faire des grèves car ils ne trouvent pas normal de continuer à travailler alors que le pays est à l'arrêt.»

Les mesures prises en club : «Peut-être qu'un de mes coéquipiers est infecté et on ne le sait pas»

«À Salernitana, on n'a pas fait le test. En Italie on appelle ça le "tampon". Mais on prend la température tous les jours. Tant que personne dans notre entourage ou dans le staff ne présente pas de symptômes, ça va. Après, peut-être qu'un de mes coéquipiers est infecté et on ne le sait pas. C'est compliqué à gérer. On a eu quatre jours de repos à la maison et on a repris les entraînements aujourd'hui (NDLR : L'interview a été réalisée ce samedi). Ils ont divisé l'entraînement en petits groupes. On était par six, en horaires différents. On a fait le maximum de travail dehors pour éviter d'être dans une pièce fermée. On a fait de la force, un peu de musculation dedans et après du travail sur le terrain. C'était du travail de passes mais pas de duel ni de contact, pour éviter d'être trop proches. D'ailleurs, le syndicat des joueurs italiens a fait un communiqué pour dire que ce n'était pas normal que les joueurs continuent à s'entraîner malgré l'état d'urgence. Les bureaux sont fermés. Mais les médecins, kinés, intendants, le coach et son staff sont là. On va reprendre l'entraînement un jour sur deux. Après, je sais qu'aujourd'hui ils parlaient éventuellement de nous laisser à la maison. Mais je ne sais pas qui prendra cette décision et quand ce sera fait. À l'Udinese, ils sont chez eux jusqu'au 22 mars parce qu'ils ont joué la Fiorentina où il y a des cas avérés.»

Les mesures à prendre pour la suite de la saison : «Ça va être un vrai bordel»

«Je ne suis pas resté longtemps chez moi, je suis resté quatre jours. Mais je suis quand même allé m'entrainer parce que je sortais d'une période où j'avais besoin de continuité. Les autres jours, juste un peu d'abdos et de musculation à la maison mais sans poids. Juste du travail, de la mobilité articulaire. J'avais acheté un vélo aussi, il m'a servi. Si ça se prolonge, le club nous fera sûrement un programme à la maison. On est vraiment enfermé, on ne peut pas aller faire un tennis ou aller à la piscine, donc la condition tu la perds. Après, il y aura le temps de la récupérer car on ne va pas reprendre le Championnat maintenant. Normalement, la reprise est prévue pour le week-end du 3 avril. Mais c'est quasiment sûr qu’avant mi-avril, il ne se passera rien. Mais je peux comprendre qu'un club qui a des ambitions ou qui doit jouer le maintien veut vouloir maintenir au maximum un entraînement pour garder la condition physique. Il faut voir combien de matches il y aura à récupérer. Ça va être compliqué, sauf s'ils décalent l'Euro, on jouera peut-être jusqu'à fin juin. Ça va être un vrai bordel. Ça va surtout dépendre de combien de temps on va s'arrêter.»

La situation en France vue d'Italie : «Quand je vois que les boîtes de nuit étaient encore ouvertes»

«Je parle beaucoup avec ma famille et mes amis en France qui sont préoccupés par la situation en Italie. Quand je leur dis que ça va arriver en France, ils y croient sans trop y croire. C'est un peu compliqué de leur faire passer le message. Et pourtant… Moi je vois de l'extérieur, heureusement que les Championnats ont été suspendus. Mais quand je vois que les boîtes de nuit étaient encore ouvertes, je me dis qu'ils n'ont pas pris conscience de la vitesse de propagation. Mieux vaut rester à la maison, parce que ça concerne tout le monde. La tante de ma femme travaille à l'hôpital à Milan. Elle nous raconte que ça touche même des jeunes.»

Sur le rassemblement des supporters parisiens : «On se dit qu'ils sont complètement fous»

«Ce qui est dangereux, c'est que tout le monde, même moi, on est peut-être contaminé sans le savoir. Pour PSG-Dortmund c'est beau ce qu'ont fait les supporters. Mais en Italie, ça a été mal vu. On se dit qu'ils sont complètement fous. Mais ce n'est pas de leur faute, ils n'ont pas pris conscience assez tôt. Par exemple, j'ai un ami qui a pris un vol Paris-Rome vide à l'aller. Quand il a demandé comment c'était possible, on lui a dit que le vol retour était complet. Les Français exilés revenaient à Paris, alors qu'ils étaient peut-être contaminés sans le savoir...»

Emile Gillet