bahoken (stephane) (R.Perrocheau/L'Equipe)

Stéphane Bahoken (Cameroun et Angers) : «Mon attachement au pays est monté crescendo»

Tenant du titre, le Cameroun de Clarence Seedorf est forcément attendu dans cette Coupe d'Afrique des nations 2019. Auteur de onze buts en Ligue 1 avec Angers, Stéphane Bahoken va disputer sa première grande compétition avec les Lions Indomptables. Interview.

«Stéphane, quel bilan faites-vous de votre saison en Ligue 1 avec le SCO ?
C’est plutôt positif. Collectivement, on a atteint les objectifs du club. Personnellement, c’est bien, même si je pense que je peux encore faire mieux.
 
Avec onze buts, peut-on estimer que c’est votre meilleure saison ?
Oui, c’est ma meilleure saison en Ligue 1. Mais j’aurais pu mettre plus de buts. Je suis content, mais je peux mieux faire.
 
Qu’est-ce qui a fait que cela a aussi bien marché avec Angers pour une première saison après votre arrivée de Strasbourg ?
Le projet du coach (Stéphane Moulin) et du directeur sportif (Olivier Pickeu) m’a plu. C’est-à-dire m’installer comme attaquant numéro 1 et que j’allais jouer quoiqu’il arrive. Ce qui a fait que j’ai encore plus progressé que la saison précédente. À force de jouer et d’enchaîner les matches, on prend confiance, on se créé plus d’occasions et je savais que j’allais être mis dans les meilleures conditions chaque week-end. C’était à moi de progresser devant la cage.
 
Vous aviez besoin qu’on vous fasse confiance sur la durée...
Exactement, c’est ça. C’est ce qu’Angers m’a dit et m’a donné. C’est pour ça que j’ai réussi à franchir un palier.
 
Diriez-vous que vous êtes à votre meilleur niveau ?
Je peux mieux faire. Quand on regarde la saison, oui, c’est vrai j’ai mis onze buts, mais il y a certains matches où j’ai mal négocié des occasions et j’aurais pu atteindre la barre des quinze buts. C’est en ça que je pense qu’il y a une bonne marge de progression.

La saison se poursuit avec la CAN. C’est une première pour vous. Quel sentiment prédomine avant d’entrer dans la compétition ?
Je suis content, excité, j’ai hâte d’y être. C’est ma première, j’ai un petit peu la pression mais je sors d’une saison positive, j’arrive donc en confiance.
 
Vous avez connu quatre sélections avec les U20 français en 2013. Comment s’est fait ce choix du Cameroun ?
J’avais déjà en tête de faire ce choix puisque j’avais également connu les sélections de jeunes du Cameroun. Le choix s’est vite porté sur le Cameroun, d’autant plus que mon père a longtemps connu cette sélection. Cela a contribué encore plus à ma décision.
 
Votre père, Paul, ancien de Reims, Troyes, Cannes, Valenciennes ou Alès, compte en effet 75 sélections avec les Lions indomptables...
J’étais trop petit lorsqu’il était en sélection. Je n’ai donc pas pu le vivre. Mais lui et ses collègues m’ont raconté, même chose pour les dirigeants de la sélection qui le connaissaient. Maintenant, l’objectif est de pourquoi pas faire mieux que lui.
 
Quel souvenir que l’on vous a raconté vous a le plus marqué ?
Celui qui me revient, c’est lorsque le Cameroun s’est qualifié pour la première fois pour une Coupe du monde en 1982 en Espagne. Il m’a raconté tous les éliminatoires. Malheureusement, avant de partir disputer la compétition, il s’est blessé et n’a donc pas pu beaucoup jouer. À l’époque, c’était une grosse pression.
 
Vous avez grandi à Cannes. Comment avez-vous tissé votre lien avec le Cameroun ?
Dans ma jeunesse, je n’y suis allé qu’une seule fois puisque mon père, je ne sais pas trop pourquoi, ne voulait pas trop m’y emmener. Mais à partir du moment où je suis devenu majeur, je m’y rendais chaque été. Je rencontrais la famille de mon père et de ma mère. J’ai appris à découvrir le pays. Mais même plus jeune, quand je voyais Samuel Eto’o et d’autres attaquants évoluer avec la sélection, ou même le maillot, que je trouvais vraiment magnifique, c’est de là que tout a commencé. Et encore plus lorsque mon père me racontait son parcours et lorsque je suis venu découvrir le pays. Mon attachement au pays est monté crescendo.
 
En parlant de maillot magnifique : vous souvenez-vous de ce fameux maillot sans manche porté par le Cameroun en 2002 ?
Oui ! Je m’en souviens. Avec les griffes, ç’a marqué ce maillot. Mais malheureusement, je ne l’ai jamais eu !

La CAN ? «Je suis content, excité, j'ai hâte d'y être».

Bahoken contre le Brésil, en amical, en novembre 2018 (défaite 1-0). (EXPA/ Focus Images/ Martyn Haw/PRESSE SPORTS)

Vous parliez d’Eto’o : y a-t-il un joueur camerounais qui a été un modèle pour vous ?
Mon père. Mais un joueur que je connais vraiment, que j’ai vu jouer, oui, ç’a été Samuel Eto’o. Un attaquant qui a marqué des buts, qui a connu des grands clubs, ça ne peut qu’être un modèle pour tout attaquant.
 
Vous avez connu votre première sélection en mars 2018. Racontez-nous...
En fait, je n’ai pas trop été surpris d’être appelé puisque juste avant, Samuel Eto’o, Carlos Kameni et d’autres joueurs avaient organisé une réunion à Paris. Ils m’avaient convoqué pour nous expliquer que les problèmes connus par la sélection auparavant avaient disparu. Ils nous incitaient ainsi à la rejoindre. Donc j’avais été davantage surpris d’être convoqué à cette réunion car ensuite je savais que j’allais être appelé avec la sélection.

Aviez-vous refusé la sélection avant d’être convoqué ?
Non, même pas, personne ne m’avait appelé. Les gens connaissaient mon parcours, j’avais fait deux montées avec Strasbourg, je jouais en Ligue 1, mais ils avaient décidé de convoquer d’autres joueurs. J’ai attendu patiemment.
 
Cela a été long ?
Oui, cela a été un petit peu long, j’étais en train de progresser. J’attendais, j’attendais, mais on ne comptait pas sur moi. Tant pis ! Désormais, j’ai l’impression que les coaches actuels me font confiance.
 
Vous entrez en jeu pour la première fois le 25 mars au Koweït (3-1)...
Une énorme fierté d’enfiler la tunique verte. Mon père était content, mais il était encore plus content que je sois rappelé pour les éliminatoires de la CAN, en match officiel, et que je marque, contre les Comores (NDLR : 8 septembre 2018, 1-1, il égalise à dix minutes de la fin). Un but important, c’était le premier match du coach Seedorf.

C’est dans ce genre de moments qu’on comprend qu’un futur est possible en sélection...
Exactement, on repense à tout le travail que l’on a effectué auparavant et qui commence à payer. On se dit que c’est pas mal mais qu’il faut continuer et qu’il y en a encore plus à faire.
 
En Egypte, le Cameroun arrive en tant que tenant du titre !
Il faut qu’on essaie de conserver ce titre. Le doublé ? On verra. Chaque match sera difficile. En arrivant en demi-finales, on pourra peut-être se faire un avis... L’équipe est très suivie et très attendue au pays. Il y a beaucoup de pression sur l’équipe nationale.
 
Que pensez-vous de ce groupe F avec le Ghana, le Bénin et la Guinée-Bissau ?
Un groupe relevé ! Le Ghana, on connaît ; le Bénin est une équipe chiante à jouer ; la Guinée-Bissau est un peu moins forte, mais si on ne fait pas très attention, on peut être surpris. Nous, on a des forces partout. Toko-Ekambi, Choupo-Moting, Bassogog, Zambo, Onana... : on a une équipe très homogène. Et le fait d’avoir un coach comme Clarence Seedorf va faire qu’on peut être encore plus fort. C’est un bon sélectionneur, il nous a expliqué tout son parcours, Seedorf, tout le monde le connaît, c’est un top player donc quand il vous appelle c’est impressionnant. Il ne faut pas le décevoir. Je vais me donner à fond. À moi de montrer au coach que je peux être titulaire. Je veux jouer le plus possible et marquer le plus de buts possible pour aider l’équipe à arriver en finale.»

Timothé Crépin