Haller

Sébastien Haller : «Mettre une telle somme, c'est très flatteur...»

Avec son transfert record à West Ham (50M€), Sébastien Haller a changé de statut. Avec une certaine tranquillité, mais une réelle envie de s'imposer en Premier League, il s'est livré pour FF.fr.

«Depuis votre premier contrat professionnel en 2011, beaucoup de choses ont changé... Que retenez-vous de vos premières années ?
J'ai beaucoup appris de ma première partie de carrière ! J'ai eu une formation à Auxerre assez linéaire, ça s'est toujours bien passé avec mes coaches. Sur et en dehors du terrain, ma formation s'est bien déroulée. Après, quand je suis arrivé en pro, c'était plus difficile, je suis arrivé dans un club qui n'était pas très stable à ce moment-là. Les entraîneurs et l'effectif changeaient assez souvent et moi j'étais jeune. J'avais 17-18 ans et je cherchais à m'imposer en pro. C'était une de mes premières expériences, ça m'a beaucoup appris mais ça reste quand même un échec.

Vous avez décidé de partir aux Pays-Bas, ce qui est assez atypique pour un jeune espoir français...
Je ne voyais pas de débouchés en termes de jeu et de progression. Et Didier Martel, un recruteur qui a suivi un de mes matches à Nîmes, m'a bien aimé. Il ne m'a pas lâché, il voulait absolument que je signe à Utrecht (Eredivisie). Il pensait que j'avais toutes les qualités requises pour briller dans ce club-là. Et au début, avec ma femme, on n'était pas forcément très chaud à l'idée de débarquer dans un pays qu'on ne connaissait pas du tout. Mais au fur et à mesure, quand on a vu que la situation se dégradait et comme on aime le chalenge, on a voulu essayer des choses. Je n'avais pas le profil de joueur qui convenait à Vannuchi (NDLR : son entraîneur à Auxerre), il était même parti chercher un joueur de mon âge pour me concurrencer, j'ai senti qu'on n'allait pas me faire confiance, alors j'ai préféré partir.

Lire aussi : Haller rejoint West Ham

C'est un choix risqué pour un jeune joueur de s'exiler dans un Championnat comme l'Eredivisie...
À Utrecht, j'étais livré à moi-même, soit ça passait, soit ça cassait. Je n'étais pas dans un cocon comme à Auxerre, où tout le monde était gentil avec moi et où tout le monde allait dans mon sens parce qu'ils pensaient que j'avais du talent. On ne savait pas ce qui allait se passer derrière. J'étais obligé d'avancer. Mais j'ai reçu un accueil génial, et après quelques semaines, j'ai réussi à m'imposer et à faire du bon boulot. Au bout de six mois à Utrecht, j'avais déjà des propositions. À chaque mercato, c'était possible de partir... Mais c'est clair que la bonne étape, c'était l'Allemagne. Quand Francfort est arrivé, c'était une superbe opportunité. On a tout regardé, on s'est renseigné, et on a apprécié le projet en lui-même.

Votre association avec Jovic a très bien marché. Qu'est-ce que vous avez appris avec lui ?
La première année, quand on jouait tous les deux, c'était catastrophique ! Ça ne marchait pas du tout. Mais la saison dernière, ç'a bien fonctionné, on a appris l'un de l'autre et on a essayé de bosser ensemble. Il connaissait mes qualités, je connaissais les siennes. C'est un jeune joueur et les qualités, il les avait, mais il a aussi progressé mentalement. On a tous les deux su profiter des qualités de l'un et de l'autre.

Vous êtes la recrue la plus onéreuse de l'histoire de West Ham. Est-ce un véritable changement de statut pour vous ?
C'est un peu comme dans tout changement. On sait ce qu'on quitte, mais on ne sait pas forcément ce qu'on va retrouver. À Francfort aussi, je suis arrivé pour sept millions et on m'avait déjà mis la pression parce que j'étais le transfert record. Pour moi, c'est un truc de journaliste pour les papiers. Moi je suis surtout flatté par l'intérêt du club pour moi. Mettre une telle somme... C'est très flatteur !

Lire les précédentes interviews de Sébastien Haller pour FF :
-«À Utrecht, on m'appelle "Hallerlujah"»
-«J'essaie de faire des choix plutôt intelligents»
-«On n'est pas des cracks, mais on bosse les uns pour les autres»

«À Utrecht, j'étais livré à moi même, soit ça passait, soit ça cassait. Je n'étais pas dans un cocon comme à Auxerre»

«West Ham a une volonté d'aller de l'avant !»

Qu'est-ce que Manuel Pellegrini vous a dit pour vous convaincre ?
Déjà, pouvoir travailler avec un entraîneur pareil, dans cette équipe, c'était une belle opportunité... Il n'a pas eu à dire grand-chose pour me motiver ! Quand on a analysé la situation et cet intérêt qu'ils avaient pour moi, il y avait déjà plus de la moitié du chemin qui était fait. Mais le coach avait vraiment envie de me faire venir, il pensait que j'avais les qualités requises pour m'imposer dans le Championnat et surtout dans l'équipe. Et il était convaincu que je pouvais bien m'adapter à son jeu. Forcément, ça joue...

Malgré un solide recrutement, le club a souvent terminé en milieu de tableau ces dernières saisons...
Ils ont une volonté d'aller de l'avant ! On peut comparer à Francfort qui était dans le ventre mou avant que j'arrive, ils venaient de monter et se battaient pour ne pas descendre en deuxième division. À l'époque, même si je venais des Pays-Bas, on m'avait déjà dit que j'aurais pu viser un meilleur club, mais ce n'est pas ce genre de choses qu'il faut voir. Il faut regarder dans quelles dispositions te met le club, dans quel environnement, qu'est-ce qu'il fait pour que tu puisses performer. C'est ça le plus important !

Vous êtes prêt à prendre le leadership de cette équipe ?
Je suis prêt, bien sûr. Je ne vais pas pouvoir me cacher. J'ai été transféré pour une somme record à West Ham, j'ai une certaine responsabilité à avoir concernant le club, mes coéquipiers, les fans... C'est mon rôle de ne pas décevoir tout ce monde qui a eu confiance en moi !

Vivre à Londres a-t-il pu influencer votre choix ?
Francfort était une super ville aussi (rires) ! Peu de gens le savent mais c'est une des meilleures villes en Allemagne, il y a tout ce qu'il faut. Maintenant, c'est vrai que Londres est un niveau au-dessus. C'est aussi une belle qualité de vie pour ma famille. Je pense qu'elle va bien s'adapter. Beaucoup de choses font que ce sera simple pour que ma famille ait une belle vie, ça rentre aussi en compte dans mon transfert. Je ne suis pas seul à partir à Londres et à connaître un nouveau projet. Ça fait cinq ans que je suis à l'étranger, donc l'anglais je maîtrise. Ils étaient plutôt contents de ça vu le nombre d'étrangers qu'il y a dans l'équipe.

Avez-vous un système de jeu préférentiel ?
Parfois, on peut être à deux devant avec un bras cassé à côté de soi, ça va pas être mieux que si je suis tout seul avec des mecs derrière qui me mettent des caviars. C'est pour illustrer le fait que ça ne veut rien dire. Tant que je suis sur le terrain, ça me va. J'essaierai de m'adapter du mieux possible au système de l'entraîneur et aux joueurs autour de moi. J'espère qu'on arrivera à bien s'entendre et à bien combiner. Le coach ne m'a rien dit encore, je ne suis pas allé à la tournée en Chine, je me suis entraîné seul au club et ensuite un peu avec la nouvelle recrue, Pablo Formals (NDLR : milieu offensif en provenance de Villarreal).

Une bonne saison en Angleterre pourrait vous ouvrir les portes de l'Euro 2020... Avez-vous déjà été en contact avec Didier Deschamps ?
Je n'ai jamais été en contact avec Didier Deschamps. Ce serait peut-être à lui de me dire ce qui me manquerait pour aller en équipe de France, mais honnêtement je ne sais pas du tout, on verra ce qui peut se passer. Le plus important, c'est de bien m'adapter à West Ham et de faire une bonne saison. Ce n'est pas l'Euro 2020 qui doit me motiver à avoir des bonnes performances, c'est déjà d'avoir des bons résultats en club et puis après on verra...»

Propos recueillis par Nicolas Jambou

Rejoindre la Premier League était-il un rêve pour vous ?
J'ai arrêté de rêver il y a un bon moment (rires) ! Ce qui est sûr, c'est que beaucoup de mes connaissances ou de mes amis qui ont joué en Premier League m'ont dit que je n'aurais plus envie de quitter le pays. C'est intriguant. Mais au-delà de ça, on sait tous que c'est un Championnat très attirant, très médiatisé, très relevé. C'est forcément quelque chose de grand de pouvoir évoluer dans ce Championnat. Mon physique correspond bien à la Premier League, mais ça ne veut rien dire, ça va dépendre de l'environnement et du timing dans lequel j'arrive, mais j'espère que ça va bien se passer.

Dans votre jeunesse, avez-vous eu des idoles qui vous ont donné envie d'y jouer ?
Thierry Henry m'a beaucoup marqué évidemment ! C'était quand même quelque chose... Drogba aussi quand il était à Chelsea. C'est surtout ces deux-là qui m'ont marqué et que je retiens.

Quels défenseurs êtes-vous impatient d'affronter ?
Je veux jouer Willy Boly (NDLR : défenseur à Wolverhampton) ! Je l'ai connu à Auxerre, et il me dit de venir en Angleterre depuis longtemps. On se charrie depuis un moment et il m'a menacé (rires) ! Donc j'attends ce duel avec impatience. Les stars comme Van Dijk, ce n'est pas vraiment important pour moi. Mais c'est sûr que c'est bien de jouer contre des joueurs de leur classe, c'est ce qui m'attend presque tous les week-ends.

«Je n'ai jamais été en contact avec Didier Deschamps. Ce serait peut-être à lui de me dire ce qui me manquerait pour aller en équipe de France»