Xavi et Iniesta en 2011. (S.Boue/L'Equipe)

Plusieurs fois sur le podium, ils n'ont jamais remporté le Ballon d'Or France Football

Andrés Iniesta, Thierry Henry, Bernd Schuster ou Luigi Riva : tous ces grands joueurs sont montés à plusieurs reprises sur le podium du Ballon d'Or. Sans jamais le remporter.

Comme d'habitude, lorsque l'on s'intéresse au Ballon d'Or France Football, le duo Messi-Ronaldo s'approprie les records. En ce qui concerne le nombre de podiums, les deux extra-terrestres comptent chacun onze apparitions sur le podium du Ballon d'Or entre 2007 et 2018. Mais d'autres joueurs, souvent victimes de la domination d'un grand champion, ont collectionné les places d'honneur sans jamais remporter le trophée.

Bernd Schuster. (L'Equipe)

Bernd Schuster est un spécialiste. Entre 1980 et 1985, l'Allemand a figuré trois fois sur le podium du Ballon d'Or France Football, un record qu'il partage avec Xavi. À chaque fois, le meneur de jeu du FC Barcelone a été battu par un joueur ultra dominateur sur la scène internationale. En 1980, alors que la RFA vient de remporter l'Euro, le vote du Ballon d'Or est un plébiscite pour son attaquant Karl-Heinz Rummenigge. Agé d'à peine 21 ans, Bernd Schuster, qui disputait sa première et dernière compétition internationale avec l'équipe nationale, termine deuxième des votes, loin derrière son leader.

L'année suivante, le joueur du Barça est le troisième homme d'un podium 100% allemand qui récompense encore Rummenigge, devant l'ennemi intime de Schuster, Paul Breitner. Après deux apparitions dans un top 3 dominé par Rummenigge, Schuster s'offre en 1985 une nouvelle troisième place. Champion d'Espagne et meilleur joueur étranger de la Liga, il figure cette fois sur un podium qui récompense un autre monstre des années 1980 : Michel Platini, qui remporte cette année-là son troisième trophée de suite.

Xavi et Iniesta, altruistes géniaux

Co-recordman du nombre de podiums sans victoire, Xavi a, en plus, la particularité de les avoir enchaînés. Le maître à jouer du Barça, recordman du nombre d'apparitions avec le club (767), a pris la troisième place du classement en 2009, 2010 et 2011, toujours derrière son attaquant Lionel Messi. Impérial dans le milieu du Barça de Pep Guardiola, le Catalan symbolise cette génération de milieux de terrain ultra talentueux, devancés au classement par les extra-terrestres que sont Messi et Ronaldo.

Son compère Andrés Iniesta, battu en 2010 malgré son statut de champion du monde buteur en finale, sera également sur le podium en 2012. Mais le talent de chef d'orchestre de l'Espagnol n'a pas suffi à convaincre les jurés, face au record de buts inscrits par Lionel Messi sur une année civile (91). Son absence au palmarès du Ballon d'Or est certainement due à «son altruisme forcené» comme l'écrivait Pascal Ferré dans un édito de France Football au moment du départ d'Iniesta du Barça, en 2018 : «Parmi les grandes absences au palmarès du Ballon d'Or France Football, la sienne nous est douloureuse.»

En 2018, le lauréat croate Luka Modric a rendu un hommage bien mérité à ces milieux de terrain de génie : «Dans le passé, certains auraient pu gagner le Ballon d'Or, comme Xavi, Iniesta ou Sneijder. Ce trophée est aussi pour ces joueurs qui méritaient sûrement de le gagner, mais ne l'ont pas eu.»

Riva, Kahn, Rijkaard, battus par plus fort

Au-delà d'Andrés Iniesta, de nombreux joueurs ont figuré à deux reprises sur le podium sans remporter le trophée. En 1969, Luigi Riva est devancé de peu par son compatriote Gianni Rivera, avant de revenir sur le podium l'année suivante, cette fois battu par Gerd Muller et Bobby Moore. Passé très proche du trophée, l'ancien attaquant de Cagliari en garde encore une certaine rancoeur. Interrogé à ce sujet par le Corriere della Serra en 2017, Riva était revenu sur le sacre de Rivera en 1969 : «Je l'ai encore en travers de la gorge. Nous faisions un Championnat fantastique, j'étais meilleur buteur, nous allions remporter le Championnat l'année suivante...»

Comme Iniesta ou Xavi, certains habitués du podium ont simplement dû faire face à la concurrence de certains coéquipiers, à une époque où leur équipe dominait le football européen. En 1988, Frank Rijkaard termine troisième du classement, derrière deux de ses coéquipiers au Milan AC et en sélection des Pays-Bas : Marco Van Basten et Ruud Gullit. En 1989, rebelote : Van Basten remporte son deuxième trophée, devant deux coéquipiers du Milan, Franco Baresi et de nouveau Frank Rijkaard.

Oliver Kahn en 2002. (Martin/L'Equipe)

Citons également Emilio Butragueno, deux fois troisième en 1986 et 1987, Dennis Bergkamp, monté sur le podium en 1992 et 1993, Thierry Henry, présent dans le top 3 en 2003 et 2006 ou Paolo Maldini, qui a fini sur le podium à deux reprises, en 1994 et 2003. Parmi ces récidivistes des places d'honneur, un nom sort du lot : Oliver Kahn. Le gardien allemand, troisième en 2001 et 2002, est le seul portier de l'histoire à être monté sur le podium à deux reprises. Celui qui est aussi le seul gardien à avoir été élu meilleur joueur d'une Coupe du monde, en 2002, n'a rien pu faire pour devancer Ronaldo, champion du monde la même année et auteur de deux buts en finale face à l'Allemagne de Kahn. «Gagner la Coupe du monde aurait joué en ma faveur, expliquait le gardien à la FIFA en 2015, mais les gens regardent aussi les statistiques.»

Pour d'autres collectionneurs de podiums, tout n'est pas perdu. Neymar, troisième en 2015 et 2017, ou Antoine Griezmann, troisième en 2016 et 2018, peuvent encore espérer remporter le trophée dans les années à venir. Et s'inspirer de certains lauréats, passés par les places d'honneur avant d'être sacrés. Avant son incroyable triplé de Ballons d'Or, Michel Platini avait terminé deux fois à la troisième place, tout comme Andriy Chevtchenko, finalement récompensé en 2004.

Youmni Kezzouf