fekir (nabil) (N.Luttiau/L'Equipe)

Mercato : Pourquoi Nabil Fekir au Betis Séville, ce n'est pas si bête

Le transfert de Nabil Fekir au Real Betis a fait se lever un paquet de sourcils. Joueur majeur de notre Championnat, le désormais ancien Lyonnais va découvrir l'Espagne avec un club très peu connu en France, et qui ne semble pas taillé pour jouer les premiers rôles en Liga. Mais tout porte à croire que cette surprenante alliance pourrait bien être un mariage de raison.

Jusqu’au dernier moment, on a cru que ça n’allait pas se faire. Que Nabil Fekir, virtuose de la Ligue 1, champion du monde, à deux doigts de rejoindre Liverpool pour un transfert record la saison dernière, méritait quand même mieux que «ça». Que, vu le prix de son transfert - une vingtaine de millions d’euros sans compter les bonus -, un club un peu plus prestigieux s’immiscerait au dernier moment dans les négociations et offrirait à "Nabilon" une porte de sortie plus prestigieuse. Mais non : Nabil Fekir est officiellement un joueur du Betis Séville. Et leur histoire commune s’ouvre sur le sentiment, irrépressible, que c’est une régression pour le joueur.

Le Betis, un projet ambitieux

Une vision un peu franco-française, forcément. Réduire le Betis à un club de seconde zone serait non seulement ne pas faire honneur au club, mais ne pas faire non plus honneur au joueur et à son choix. Si les Verdiblancos ne font certes pas partie du gratin du football espagnol (ils ont terminé 10es de Liga la saison dernière, 6es la saison d’avant), ils ont parcouru bien du chemin depuis leur descente en Secunda division en 2014. Et semblent appliquer depuis plusieurs saisons une stratégie destinée à leur faire retrouver l’Europe.

Débat : Nabil Fekir pouvait-il espérer mieux qu'un club comme le Betis ?

Quatre des cinq plus gros transferts de l’histoire du club ont eu lieu sur les trois derniers mercatos. Le Betis investit intelligemment sur des profils divers, autant des jeunes joueurs prometteurs (Lainez, Lo Celso) que sur des joueurs plus confirmés (Fekir, Bartra, Carvalho). Aujourd'hui, en attirant Fekir pour une vingtaine de millions d’euros plus bonus, le Betis a flairé une nouvelle fois la très bonne affaire et s’il a su convaincre le joueur de venir, ce n’est sans doute pas avec du vent. Et cette arrivée, alors que le départ d’un Lo Celso brillant la saison passée pourrait se confirmer, vient renforcer un effectif qui n’a rien de ridicule.

Un pas en arrière, deux pas en avant ?

D’autant que Nabil Fekir avait besoin de changer d’air pour changer de dimension. Son transfert avorté à Liverpool l’été passé, des suites d’une visite médicale infructueuse mettant en lumière la fragilité de son genou, et la saison en demi-teinte qui s’en est suivie, l’ont fait disparaître des radars des plus grands clubs. Pourtant, la volonté du joueur de prendre son envol à 26 ans, après six saisons en pro dans son club formateur, ne s’était pas volatilisée pour autant. Pour Nabil Fekir, le temps de partir était plus qu’arrivé, et à défaut de faire tout de suite le grand saut vers un top club, il a préféré un moins grand saut vers un top Championnat.

D’un point de vue purement sportif à court terme, passer d’une équipe comme Lyon, régulièrement qualifiée en Ligue des champions et luttant chaque saison pour les premières places en Ligue 1, au Betis, qui ne jouera pas l’Europe, peut apparaître comme un pas en arrière. Mais un pas qui permet à Fekir de mettre un pied en Liga, Championnat relevé qui met souvent en valeur les créateurs comme lui. Conscient qu’il n’avait plus le luxe de griller les étapes, il a choisi la patience. Car nul doute qu’il conserve dans un coin de sa tête l’ambition de jouer un jour pour un club majeur. RMC dévoilait même que le choix du Betis aurait été appuyé par Éric Abidal, directeur du football du FC Barcelone. Sans doute pas innocemment. Une ou deux bonnes saisons en Liga sous le maillot vert et blanc de Séville, et la cote de l’ancien Lyonnais remonterait en flèche. Une perspective qu’avait également sans doute l’OL au moment de négocier un pourcentage à la revente de 20%, selon différentes sources.

Conscient qu'il n'avait plus le luxe de griller les étapes, il a choisi la patience. Car nul doute qu'il conserve dans un coin de sa tête l'ambition de jouer un jour pour un club majeur.

Un rôle comparable à celui qu'il avait à Lyon

À Lyon, d’autant plus ces dernières saisons avec le départ de Lacazette ou Tolisso, Fekir était l’atout offensif majeur de l’Olympique Lyonnais. Et, dans l’optique de donner un nouvel élan à sa carrière, signer au Betis où il devrait, a priori, assumer un rôle
similaire, est tout sauf une absurdité. Un rôle que n’aurait sans doute pas pu lui offrir un top club. Au Betis, surtout avec le départ annoncé de Giovani Lo Celso, Fekir aura les clés du jeu sans pour autant être seul sur le terrain.

Lire aussi : Les moments marquants de Fekir à l'OL

Des conditions idéales pour se mettre en valeur, dans un club et un Championnat adaptés à son profil et son style de jeu. Indéniablement, si les résultats n’ont pas toujours été au rendez-vous ces dernières années, le Betis est une équipe qui joue au ballon. Cet été, l’entraîneur Quique Setien, en poste depuis deux ans et qui a fait de belles choses, a laissé sa place à Rubi, qui a mené l’Espanyol Barcelone à une belle septième place la saison passée mais qui doit encore confirmer les belles choses que l’on a vues. Alors non, l’association entre Fekir et le Betis n’était pas une évidence, et elle est loin d’être gagnée d’avance. Mais il faudrait assez peu de choses pour que tout ça se transforme rapidement en une belle surprise.

Alexandre Aflalo