Hakim Ziyech of Ajax during the UEFA Champions League third round qualifying first leg match between PAOK FC and Ajax Amsterdam at Toumba stadium on August 06, 2019 in Thessaloniki, Greece ("PAOK FC v Ajax Amsterdam"/VI Images / Maurice van Steen)

Mercato : le curieux été d'Hakim Ziyech avec l'Ajax Amsterdam

Rayon de soleil parmi d'autres de l'historique cuvée 2018-2019 de l'Ajax, Hakim Ziyech n'était pas censé faire de vieux os dans la capitale néerlandaise. Et pourtant... Avant le troisième tour préliminaire de Ligue des champions face au PAOK, retour sur un été moins agité que prévu.

Dans la Venise du Nord, au moment de tirer un bilan provisoire de l'intersaison, l'heure est à la surprise, plutôt agréable de surcroît. En mai dernier, chacun allait de son pronostic quant à l'exode massif qui devait suivre. Cinq ? Six ? Huit départs ? Or, à ce jour, seuls trois cadres ont fait leurs adieux à la Johan Cruijff ArenA. Cela allait de soi depuis un bout de temps, les deux merveilles Frenkie de Jong et Matthijs de Ligt en ont fait partie. Pas le plus bankable mais briscard ô combien précieux parmi la meute de loupiots, Lasse Schöne a lui rallié le Genoa. Et les autres ? Les Onana, Tagliafico, van de Beek, Neres, Ziyech, pour ne citer qu'eux ? A l'heure qu'il est, aucun n'a mis les voiles. Si les ultimes heures du mercato nous réservent sans doute moult rebondissements, le dernier cité a mis un terme aux spéculations la semaine passée en prolongeant son contrat jusqu'en 2022.

Sitôt répandue, la nouvelle a fait le bonheur des inconditionnels ajacides. Il faut dire que le joueur de 26 ans sort de trois saisons où il a enchaîné les caramels et les offrandes à un rythme infernal. Avec vingt-et-un buts toutes compétitions confondues l'an passé, celui qui a effectué toute sa carrière aux Pays-Bas vient même de réaliser sa meilleure saison d'un point de vue statistique. S'il traîne derrière lui une réputation de soliste, on aurait tort de mésestimer son esprit collectif. Quintuple meilleur passeur d'Eredivisie - deux fois sous le maillot de Twente puis autant d'années que passées à l'Ajax - le bonhomme sait aussi œuvrer pour les autres. Une vertu fondamentale au pays de Rinus Michels.

Des intérêts mais peu de propositions concrètes

Jusqu'à l'an dernier, Hakim Ziyech délectait son petit monde dans l'ombre, à l'abri des regards et des projecteurs d'un Championnat plus huppé. La féérie européenne de l'Ajax lui a offert une exposition inattendue. La suite devait couler de source. Mais Ziyech, qui avait failli partir en hiver au Borussia Dortmund, restera à quai. S'il n'a pas la jeunesse de ses comparses ajacides, le gaucher de 26 ans reste à polir. Des choix à parfaire dans le dernier geste et une culture de l'effort à acquérir, notamment. La marge de progression séduit l'OL, qui l'imagine remplacer un Bertrand Traoré sur courant alternatif. Arsenal fait finalement volte-face au profit de Nicolas Pépé, alors qu'on se demande si le Bayern passera un jour à la vitesse supérieure. Des escouades restées au stade de la prise de renseignements, guère plus.

Impatient ou plutôt résigné, Hakim Ziyech ? Toujours est-il que le joueur formé à Heerenven a fini par reconduire son bail à l'Ajax Amsterdam. Club le plus chaud pour l'accueillir, le FC Séville est poliment éconduit. «Séville est du même niveau que l'Ajax, je n'ai pas envie de changer pour changer», déclarait-il en substance au média hollandais Algemeem Dagblad. Ses vacances écourtées, le Marocain a juré fidélité pour une saison supplémentaire. Une décision de ne pas forcer son départ coûte que coûte qui ne peut être que louable, quand d'aucuns font des caprices tous les étés pour quelques zéros en plus. Révélatrice aussi d'un certain manque de considération des cadors européens, finalement peu à se bousculer au portillon.

«Séville est du même niveau que l'Ajax, je n'ai pas envie de changer pour changer» (Hakim Ziyech dans une interview pour Algemeem Dagblad)

Entre CAN décevante et tempérament volcanique

A une époque de flambée des prix à grands coups de millions, comment expliquer qu'aucun géant ne se soit décidé à en mettre trente-cinq sur un maître à jouer d'un tel acabit ? En cause, peut-être, une CAN pas loin d'être désastreuse avec le Maroc. Censé guider sa sélection, il y est apparu hors de forme. «Il a été très bien durant la phase de préparation. Il a été moins bien lors de la phase de groupes», tentait de nuancer Hervé Renard. Pis, le numéro 7 manquait la balle de la qualification en huitièmes de finale face au Bénin, écrasant son penalty sur le poteau à la 95e minute. S'en suivait une séance de tirs aux buts fatale aux Lions de l'Atlas. «Ziyech m'a tuer», tançait dans la foulée le média marocain Le360. De quoi affecter un joueur rarement exempté des critiques.

Autre explication plausible, le caractère éruptif du natif de Dronten, petite ville du centre des Pays-Bas. «Ziyech, c'est le type même de joueur que les supporters de l'Ajax adorent détester, analysait le milieu de terrain Edouard Duplan pour Le Monde en mai dernier. Ziyech a une personnalité qui ne cadre pas forcément avec les habitudes de l'Ajax. Il donne parfois l'impression d'être nonchalant, de ne pas faire beaucoup d'efforts défensifs. Dans un club où tout le monde attaque et où tout le monde défend, ce n'est pas toujours bien vu.» Si sa patte gauche a fini par mettre tout le monde d'accord aux Pays-Bas, qui l'a élu meilleur joueur de son Championnat en 2017-2018, le Bayern a possiblement été refroidi par un tempérament qui sort des cases strictes inhérentes à la culture allemande.

Bien qu'il soit de coutume de dire que dans le football, tout peut arriver, l'hypothèse d'un départ a réellement pris du plomb dans l'aile. A peine rentré de vacances, Ziyech a illico rechaussé ses crampons, prêt à repartir sur la même lancée. Une passe décisive dès la première journée sur la pelouse du Vitesse Arnhem (2-2), puis un premier but samedi contre Emmen (victoire 5-0). Après un nul au PAOK dans lequel il a aussi marqué (2-2), la Johan Cruijff ArenA compte de nouveau sur son numéro 10 ce mardi pour le retour. Afin que le violon d'André Rieu, tradition d'avant-match, se mêle de nouveau à la douce mélodie de la Ligue des champions.

Corentin Rolland

«Ziyech, c'est le type même de joueur que les supporters de l'Ajax adorent détester» (Edouard Duplan dans Le Monde)