Marcus Rashford, par-delà le football, des enjeux de société
L'attaquant anglais de Manchester United, en s'engageant dans le combat contre la pauvreté, ne pensait peut-être pas atteindre un tel but. Pourtant, il a impulsé de nouvelles décisions gouvernementales et reçu les félicitations de tout un pays.
C'est une nouvelle qui a enchanté - et remué - le Royaume en ces temps de crise sanitaire. Engagé dans la lutte contre la pauvreté, Marcus Rashford a créé un élan jusqu'au gouvernement, allant même contrarier le premier ministre Boris Johnson. Adressant une lettre ouverte au Parlement, le wonderkid du Nord de l'Angleterre a d'abord lancé un débat légitime. «La pauvreté alimentaire en Angleterre est une pandémie qui frappe plusieurs générations si l'on reste les bras croisés», écrivait ainsi le numéro 10 de Manchester United, demandant le maintien des repas offerts à 1,3 million d'enfants pendant les vacances scolaires. «Avec une condescendance cool, Downing Street a initialement fait savoir que, bien que le footballeur ait utilisé sa renommée pour «mettre en évidence des problèmes très importants», Boris Johnson ne reprendrait pas son idée», resitue The Guardian, avant que la volte-face, impulsée par l'opinion publique, l'opposition et les menaces des députés conservateurs, ne sonne comme une grande victoire pour le jeune attaquant. The Guardian toujours : «En persuadant le gouvernement d'étendre le système de chèques-repas gratuits, le footballeur de Manchester United a donné au Premier ministre une leçon de solidarité.»
An Open Letter to all MPs in Parliament...#maketheUturn
— Marcus Rashford (@MarcusRashford) June 14, 2020
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Des conseils, des recherches, des sondages...
Surtout, elle témoigne de l'engagement certain des acteurs du football - alors que leur parole politique, pendant des années et notamment en France, était aussi proscrite que possible. L'initiative de Marcus Rashford ne date cependant pas d'hier ; et trouve encore moins son origine dans un coup de tête soudain. «À seulement 22 ans et avec peu ou pas d'expérience en politique professionnelle, Rashford a non seulement identifié un objectif politique réalisable, mais a sollicité des conseils, fait ses propres recherches, fait des sondages, souligne The Guardian dans un autre article. Plus important encore, il a recherché la seule condition préalable à toute sorte de changement qui valait la peine de sortir du lit. "Il suffit de regarder ce que nous pouvons faire lorsque nous nous réunissons, CECI est l'Angleterre en 2020", a tweeté Rashford en apprenant que sa campagne avait porté ses fruits.» Dans une tribune publiée dans The Times le 16 juin, le principal intéressé maintient : «Mettre fin à la pauvreté des enfants est un trophée plus grand que n'importe lequel dans le football.» The Telegraph va encore plus loin, encourageant la classe politique à s'inspirer des jeunes engagés, et pas seulement le joueur de Man United. «Les principes de Marcus Rashford et Raheem Sterling créent une pression qu'ils ne devraient pas affronter seuls», titre le quotidien, résumant la situation à un «coup de main» qui se transforme en «changement de politique gouvernementale».
Inspirant
Il n'y a pourtant rien de surprenant, à en croire les lecteurs du Guardian, de voir un joueur, aussi jeune soit-il, s'aventurer sur les terrains sociétaux. «Ce n'était pas une surprise pour moi d'entendre un jeune homme qui avait personnellement vécu une vraie pauvreté parler avec tant de passion de la nécessité de prendre correctement soin des enfants les plus défavorisés du Royaume-Uni», témoigne Chris, suivi par Tom dans un papier intitulé «S'inspirer de Marcus Rashford» : «L'explication peut-être la plus simple de la masterclass de Marcus Rashford est que le football au plus haut niveau est la seule véritable méritocratie en Grande-Bretagne aujourd'hui. Personne n'atteint le sommet grâce à la richesse ou à la position de ses parents. [...] Marcus a atteint le sommet grâce à son talent, ce qui ne peut probablement pas être dit pour la plupart des membres du cabinet.»
«Nous rappeler que lorsque le football parle d'une seule voix, personne n'ose le décrier...»
Pas question, néanmoins, de s'arrêter en si bon chemin ou de sélectionner ses engagements. «En ce qui concerne Rashford et ce qui vient ensuite, attendez-vous à davantage, écrit ainsi The Independent. Il a déjà reçu un High Sheriff Special Recognition Award pour ses contributions à la communauté du Grand Manchester pendant la crise. [...] L'international anglais a également encouragé les enfants à lire et a appris la langue des signes pour juger un concours de poésie de la Journée mondiale du livre. [...] Il s'est prononcé à plusieurs reprises contre le racisme dans le football et a été l'une des nombreuses personnalités de haut niveau à déclarer publiquement son soutien au mouvement Black Lives Matter après la mort de George Floyd aux États-Unis.» Une énième preuve que le football et ses acteurs ont du poids et surtout des idées. Ce que résume The Guardian dans un énoncé précis et efficace : «C'est peut-être là le véritable héritage sportif de l'activisme de Rashford : pour nous rappeler que lorsque le football parle d'une seule voix, personne n'ose le décrier.»
Antoine Bourlon Follow @AntoineBourlon
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