11.03.2018, Signal Iduna Park, Dortmund, GER, 1. FBL, Borussia Dortmund vs Eintracht Frankfurt, 26. Runde, im Bild Luka Jovic (Frankfurt) jubelt nach seinem Tor zum 1:1 // during the German Bundesliga 26th round match between Borussia Dortmund and Eintracht Frankfurt at the Signal Iduna Park in Dortmund, Germany on 2018/03/11. EXPA Pictures © 2018, PhotoCredit: EXPA/ Eibner-Pressefoto/ Mario Hommes *****ATTENTION - OUT of GER***** *** Local Caption *** (Mario Hommes/EXPA/PRESSE SPORT/PRESSE SPORTS)

Luka Jovic et l'opaque parenthèse de Limassol

Avant ses exploits à Francfort et son éclosion aux yeux du monde entier, Luka Jovic a connu la Serbie et le Portugal. Mais aussi Chypre, et l'Apollon Limassol, club pour lequel il n'évoluera jamais mais qui fut bien impliqué dans sa trajectoire. Explications.

25 buts, 7 passes décisives, une routine désormais rythmée par les rumeurs transferts et une estimation à hauteur de 55 millions d'euros. Assurément, Luka Jovic, l'attaquant serbe de Francfort âgé de 21 ans, a changé de dimension. Aux quatre coins de l'Europe, on parle désormais de lui à Madrid, Paris, Barcelone ou encore Chelsea. Le gratin. Mais c'est dans une contrée plus exotique, à Chypre, que l'escale fut la plus surprenante. Jovic n'a alors que 18 ans, et son club d'alors, l'Étoile Rouge de Belgrade, accorde ses violons avec l'Apollon Limassol pour un transfert du joueur. «L'Étoile Rouge vend à l'Apollon 100% des droits fédératifs et 30% des droits économiques du joueur, détaille l'agrément de l'époque, daté du 25 janvier 2016. [...] En contrepartie de l'achat des droits, l'Apollon versera à l'Étoile Rouge une somme totale de 600.000€.» La première moitié est exigée avant le 15 février de la même année, la seconde avant le 15 mai.

Extrait daté du 25 janvier 2016 entre Limassol et Belgrade pour Luka Jovic. (L'Equipe)

Une passerelle aux avantages fiscaux

Jovic, évidemment, ne mettra jamais les pieds à Limassol, tombeur cette saison de l'OM en Ligue Europa. Et, pis, c'est bien six jours après ce premier accord que l'attaquant, surnommé à l'époque le «Falcao serbe», paraphera de sa propre main son premier contrat avec...Benfica, au Portugal. «Le présent contrat de travail débute le 1er février 2016 et prend fin le 30 juin 2021», dévoile celui-ci, présentement imprimé le 31 janvier 2016. La nouvelle pépite de l'Est s'engage donc pour cinq ans avec les Aigles du Benfica, avant d'y jouer son premier match le 9 mars. Selon les comptes de la saison 2015-16 publiés officiellement par Benfica, le club lisboète a racheté l'intégralité des droits de Jovic pour 6,5 millions d'euros, ce qui mettait fin à l'implication de Limassol. Mais pourquoi donc cette passerelle à Chypre? Club dirigé en sous-main par des intermédiaires bien connus, comme nous le verrons, l'Apollon Limassol bénéficie surtout du cadre fiscal avantageux de l'île. Parfait pour une triangulation (1), autrement dit un transfert entre trois pays afin de jouer avec les différentes taxes en vigueur. Le joueur, lui, n'en a très certainement que très peu à faire et c'est avec succès qu'il ira se faire remarquer au Portugal avant un prêt à Francfort, synonyme de réussite.

Super-agents et transit fructueux

Plus que le joueur, c'est ici l'entourage qui fait office de protagoniste. Déjà, il est bon de souligner que Luka Jovic est représenté, comme nombre de ses compatriotes, par le surpuissant agent Fali Ramadani et sa société LIAN Sports, qui viennent de récupérer la gestion d'Alban Lafont comme le narrait FF. Ramadani, un nom que la presse sportive a commencé à connaître au fil des mois, notamment pour ses accointances avec un autre super-agent, Pini Zahavi. Là intervient la fenêtre Limassol. «Mon investissement à Limassol s'explique parce que le propriétaire est l'un de mes meilleurs amis», répondait Zahavi au journaliste Romain Molina dans son livre La Mano Negra. Par l'intermédiaire de l'une de ses sociétés, il y détient également des parts, tandis que Luka Jovic n'est pas le seul à avoir vu un % de ses droits faire le transit à Limassol. Pêle-mêle : Cristian Manea, Fabrice Olinga, Andrija Zivkovic... Pour Jovic, l'affaire n'a pas beaucoup perturbé ses performances. Ses proches devraient par contre avoir une influence certaine sur sa future destination. Zahavi et Ramadani discutent quant à l'avenir de celui qui s'est définitivement engagé avec Francfort, club où ils trouvent une oreille très attentive, et ils seront les acteurs principaux de son probable transfert estival. Ne reste plus qu'à savoir où.

Antoine Bourlon


(1) : Transfert entre trois pays afin de jouer avec les taux d'imposition de chacun et d'en tirer la plupart du temps un profit. La Suisse (cf. transfert de Higuain par le biais de Locarno), Chypre et l'Uruguay sont souvent des passerelles privilégiées.