depay (memphis) (P.Lahalle/L'Equipe)

Ligue 1 : Memphis Depay, ballerine en récital face à Dijon

On l'a vu plus brillant. Mais rarement aussi décisif. Intelligent dans son placement pour renverser la vapeur, Memphis Depay a ensuite dynamité Dijon par son talent balle au pied (4-1). Zoom.

Il y a quelque chose de gracieux dans le jeu de Memphis Depay. Du beau, de la pureté, et une bonne dose d’instinct qui magnifie chaque ballon touché en un gala où tous les projecteurs sont braqués sur lui. Les projecteurs, mais aussi les quelques yeux et voix qui parsemaient les travées du Groupama Stadium. Ils n’étaient que quelques milliers, mais leurs acclamations nourries pour le maestro néerlandais concordaient comme un bourdon «Memphis ! Memphis ! Memphis !». Tranquille, le numéro 11 trace sa route et porte sur son sillage l’OL tout entier. Un leader qui prenait davantage l’apparence d’une bouée de sauvetage en début de rencontre. Pour la première fois de l’OL en 3-4-1-2, le bloc se cherche un peu au repli et à la construction. Alors, autonome, il se place de façon à assurer la fluidité et le liant vers l’avant. Habile, il réceptionne les belles passes entre les lignes de Caqueret et Guimaraes – dont l’association a presque fait oublier Aouar – avant de redistribuer vers les attaquants ou les pistons, c’est selon. Première banderille au bout de quatre minutes vers Toko Ekambi, dont le centre manquait d’être repris par Dembélé. Trois minutes plus tard même chose, en visant Guimaraes cette fois.

Une adaptation létale au plan dijonnais

Mais ça ne passe pas. Parce que les Dijonnais bloquent l’axe pour pousser Lyon à jouer vers la gauche et Maxwel Cornet. Mais aussi parce que le piston ne rentre aucun de ses centres (21 tentés, 2 réussis). Stratégie audacieuse, maline et payante, puisqu’ils ouvraient le score (12e). Mais peu après la demi-heure de jeu, Garcia trouve la parade et fait coulisser Depay vers la gauche. Déboussolée, la défense bourguignonne ne sait comment réagir et accuse le coup. Encore plus quand le Batave décide d’utiliser la patte soyeuse qui fait de lui un des meilleurs à son poste quand il est en forme. Bouffeur de half space, il s’engouffre dans l’espace libéré initialement pour Cornet pour détruire de l’intérieur le DFCO. De facto, Cornet se retrouve plus en retrait et quand il monte, passe en position de frappe et non de centre. La sanction est immédiate : au lieu de tirer, l’Ivoirien accélère et provoque un penalty, transformé par l’homme du soir (39e). Les autres buts sont le résultat de la même tactique, mais aussi d’un ingrédient maison : la magie.

Heatmap de Memphis Depay, logiquement portée vers la gauche pour secourir Cornet et porter le danger dans les espaces vides (SofaScore).

De son pied naît le danger

Cinq minutes plus tard, toujours au même endroit, sur le côté gauche de la surface adverse, il lance le nouvel acte d’un récital technique. Pas en position de pointe mais presque, il fait de Ngouyamsa sa chose, ni plus ni moins. Une virgule pour se mettre dans le sens du but, protection du ballon en semelle ensuite, avant de se retourner tout en toucher pour adresser un centre fort devant le but. Plus adroit, il trouve Lautoa qui pousse dans ses filets (44e). Impliquée sur deux buts, la bête serait-elle rassasiée ? C’est mal la connaître. Une minute après, alors que Caqueret récupérait le ballon sur le coup d’envoi, il s’approprie un centre et en deux touches désoriente complètement le même latéral droit, puis conclut de près (45e). Trop facile. En confiance et avec des pieds de velours, Memphis s’autorisait tout. Encore à gauche, et au lieu de passer à Cornet, il temporise puis essaye d’envoyer un caramel en lucarne opposé. Gomis, cette fois-ci, veillait au grain (60e). Symbole ultime de sa dextérité, un missile en barre rentrante sur le deuxième penalty (66e). De la douceur mais aussi une violence clinique, ce Memphis versatile a une palette artistique très large. Si efficace qu’en dictant le rythme balle au pied, il fait danser ses adversaires.
 
Émile Gillet