Raphaël Varane nouveau capitaine des Bleus. (A. Mounic/L'Equipe)

La génération 1993 est-elle en train de s'imposer en Equipe de France ?

Ils ont vingt-trois ans, sont nés l'année où Marseille a remporté la Ligue des champions avec Deschamps, et font déjà leurs gammes chez les Bleus. Pourquoi la génération 1993, celle qui a remporté la Coupe du monde U20 il y a déjà trois ans, prend t-elle ses marques en Equipe de France ?

«La date de naissance n'est pas un critère, elle m'importe moins que les performances sur le terrain. Et puis, j'aime bien les jeunes...». La veille du match contre la Suède, en conférence de presse, Didier Deschamps était interpellé sur la jeunesse de certains de ses joueurs. S'il n'y a pas de choix stratégique, on trouve parfois des statistiques dans le hasard. Dans la (première) liste présentée par Deschamps, le 3 novembre, ils étaient 6 à être nés en 1993 : Alphonse Areola, Paul Pogba, Raphaël Varane, Nabil Fekir, Lucas Digne et Samuel Umtiti – soit 26% de l'effectif, même s'ils ne sont plus que quatre après les forfaits d'Umtiti et Areola. Une statistique intéressante quand on sait que certaines années sont à peine représentées : un joueur de 1989 (Sissoko), un de 1990 (Corchia) et deux de 1992 (Sidibé et Kurzawa).

Une génération Championne du monde

Avant de se distinguer en A, cette génération 1993 s'est fait remarquer il y a trois ans, en remportant la Coupe du monde U20. Sur le papier, de nombreux noms sont aisément reconnaissables : Pogba, Digne, Umtiti et Areola, mais aussi Thauvin, Sanogo ou Sarr. Pas de traces de Varane, forfait sur blessure, ni de Fekir, qui évolue alors principalement avec la réserve de Lyon. Ce qui explique que les membres de cette promo 1993 n'aient pas été intégrés de la même façon.

Varane et Pogba sont deux membres indiscutables du groupe, avec respectivement 34 et 43 sélections depuis 2014. L'absence du madrilène à l'Euro n'a d'ailleurs pas remis en cause sa place de titulaire en défense, et malgré les questionnements autour de sa régularité, le milieu de United semble indétrônable à son poste. Pour les autres, c'est plus compliqué. Digne, doublure d'Evra puis de Kurzawa, reste un second choix dans l'esprit du sélectionneur. Fekir refait ses débuts en Bleus après la blessure qui lui a sûrement coûté sa place à l'Euro. Areola et Umtiti subissent encore la concurrence de Lloris et Koscielny, mais s'imposent déjà comme de sérieux prétendants à leurs postes respectifs. Kondogbia, dont la dernière sélection remonte à 2015, n'est pas assez constant à l'Inter Milan pour espérer retrouver le maillot bleu dans les prochains mois.

«Entre 2 et 5 joueurs peuvent potentiellement aller en A»

Il est difficile d'affirmer que l'année 1993 est dotée de plus de talents que les promotions précédentes. «C'est à peu près dans les chiffres. On estime qu'entre 2 et 5 joueurs de chaque promotion U peuvent potentiellement aller en A», analyse Francis Smerecki, sélectionneur de plusieurs générations en Bleus, dont celle qui a remporté l'Euro U19 en 2010 avec Griezmann et Lacazette. «Ils sont peu nombreux à ne pas passer par les sélections et à directement jouer en A, même si cela peut arriver». C'est le cas de Fekir, qui n'a fait qu'un seul match en Espoir en octobre 2014 avant d'être appelé par Deschamps cinq mois plus tard. Rien n'exclut pourtant que de nombreux joueurs d'une même année soient sélectionnés pour être testés, sans pour autant confirmer. «En général, quand ils commencent à mettre un pied en A, c'est qu'il s'agit de joueurs de qualité. Après, ça dépend aussi de la façon dont le joueur va évoluer. C'est une question d'étapes

Et s'il s'agissait en fait d'un rajeunissement général ? A l'âge de Pogba, Lilian Thuram, qui détient le record de sélection en Bleu, n'avait porté le maillot de l'Equipe de France qu'à 4 reprises. Cela s'explique aussi parce que ces joueurs ont rapidement trouvé leur place dans des grands clubs, même à un âge peu avancé. Lorsqu'il honore sa première sélection en A en mars 2013, le Turinois a déjà joué 37 rencontres pour sa première saison avec la Vieille Dame.

«Les Bleuets, une génération 1993 exemplaire» (France Info)

Enfin, il faut sans doute considérer la question de l'image, même si les principaux critères de Didier Deschamps restent la bonne entente du groupe et les performances sportives. En 2013, lorsque les coéquipiers d'Areola remportent le titre, l'image de l'Equipe de France A est encore ternie par Knysna et un Euro 2012 mitigé. Une équipe qui gagne – «une génération 1993 exemplaire» pour France Info - et qui représente potentiellement l'avenir des Bleus, ça contraste et ça rassure.

En 2010, pour le premier match amical après la Coupe du monde, Laurent Blanc sélectionne 22 joueurs absents de la compétition... dont 7 joueurs de la célèbre génération 1987, Championne d'Europe des moins de dix-sept ans en 2004. Cette explication, compilée à leurs bons résultats, a peut-être permis l'installation plus rapide de Pogba et Varane en Bleu, à seulement vingt ans. Si l'année 1993 apparaît particulièrement fournie en talents, il est encore un peu tôt pour affirmer que ces joueurs vont s'imposer définitivement, au-delà des cas particuliers des précoces Varane et Pogba, et des prometteurs Umtiti et Areola. Surtout que les plus jeunes poussent derrière, à l'image de Rabiot, Martial ou Lemar... nés en 1995.

Cindy Jaury