(L'Equipe)

Klopp your hands ! : le dernier tacle à retardement de Julien Cazarre

Comme chaque semaine, Julien Cazarre glisse son tacle à retardement dans France Football. Il vante cette fois les mérites de Jürgen Klopp, le coach de Liverpool.

Il est beau, allemand, charismatique, élégant, sympa, brillant, envoûtant et fascinant... Quel coach, ce Thomas Tuchel ! Oui, je sais, même le dernier supporter bulgare aurait compris que je ne parle pas du technicien à pull moulant de la porte de Saint-Cloud mais du patron des Reds. Le grand Jürgen a plus ou moins réussi tout ce que son clone Thomas est en train de rater (Tuchel étant son clone, en espérant qu’il ne vire pas au clown, ce qui serait plus fâcheux)... La force de Jürgen est qu’on a l’impression que s’il demandait à ses joueurs de partir en mise au vert dans le désert syrien pendant quinze jours à ramper avec un barda sur des cailloux en mangeant des racines et en buvant leur propre urine, ils le feraient avec le sourire en chantant du Elton John, là où Toto le Teuton peine à faire courir ses ouailles plus d’une mi-temps contre l’OM et Dijon.

Il pourrait aussi bien être le patron du RAID que des Reds qu’on ne verrait pas la différence. À part que, dans le premier cas, les mecs à cagoule, après avoir abattu des preneurs d’otages, ne sauteraient pas dans ses bras en haranguant la foule, même si ça ajouterait du peps à l’intervention. Quel est son secret, à ce mec ? Même Guardiola devient fou rien qu’à le regarder enchaîner les victoires et les titres. Il doit avoir l’impression que ce qu’il arrive à faire à force de tactique, de travail, de stakhanovisme, l’autre le fait en un claquement de sourire et deux consignes d’avant-match... Il représente un genre d’Allemand parfait du XXIe siècle, ni trop danseuse fragile à la mèche Tony and Guy façon Draxler ou Kehrer, ni la brutasse des années 1980. La perfection au masculin. Un genre d’égérie Gillette... sauf qu’il ne se rase pas d’assez près pour représenter la marque.

Il est vrai qu’être la figure de proue d’une marque de rasoir six lames quand t’as une barbe de trois jours, c’est aussi con que si Griezmann faisait une campagne Head & Shoulders pour la Coupe du monde et qu’il se rasait les cheveux juste avant la compète... Non, Jürgen ne fait pas de pub pour Gillette mais pour des bagnoles. Pour un Allemand, jusque-là, tout est normal. Mais là, non. On l’attendrait sur Audi, Mercedes ou BMW (avec un bon vieux spot moisi sur une route de montagne avec la musique de Moby, satisfait de rouler seul avec les yeux plissés). Papa Klopp, lui, roule en Opel. Opel, la marque popu par excellence, le gars se la joue proche du peuple. Il est trop fort !

Il a beau entraîner des clubs qui pèsent des centaines de millions d’euros, il n’oublie pas que le péquin moyen de Dortmund ou de Liverpool, il pue la suie et le cambouis, il a la gueule noire de père en fils, il a envie de voir un mec qui lui ressemble. Klopp, il ne va pas jouer les aristocrates dans une ville de port de pêche (mais non, je ne parle pas de l’OM). Bon, bien entendu que, sorti du stade, il reprend sa Bentley décapotable vert anglais, siège en cuir crème... Mais l’important, c’est le rêve, non ?

Julien Cazarre

Il a beau entraîner des clubs qui pèsent des centaines de millions d'euros, il n'oublie pas que le péquin moyen de Dortmund ou de Liverpool, il pue la suie et le cambouis.