rabiot (adrien) verratti (marco) (P.Lahalle/L'Equipe)

«Il accélère le jeu par la passe et met ses coéquipiers dans les meilleures conditions» : Pourquoi Verratti est indispensable au PSG

Absent à Liverpool, Marco Verratti a vu ses coéquipiers s'incliner dans les toutes dernières minutes. Sans lui, la vie est forcément moins belle, le jeu moins fluide. Pourtant, même s'il est souvent critiqué, le Petit Hibou de Pescara est devenu indispensable.

Fin du match à Anfield. Les masques tombent, Paris est vaincu. Et semble à des années lumière de son état de forme optimal, après une prestation insipide face aux Reds de Liverpool (3-2). L’absence de Marco Verratti*, dans un milieu de terrain dépeuplé par les départs non palliés, fait forcément office d’explication. Arrivé en 2012 dans les valises de Leonardo et sous conseil d’influents qataris, le petit Marco de Pescara, débarqué dans l’anonymat, les promesses d’avenir et les interrogations, est en effet devenu un indispensable. À tel point qu’aucun coach n’a depuis pu s’en passer.

Ancelotti, Blanc, Emery et désormais Tuchel ont apprécié les qualités du "Hibou". Le dernier, lui, a bien dû faire sans, dans le Nord de l’Angleterre, pour sa première en C1 sur le banc parisien. Résultat, peu de maîtrise, beaucoup de pénibilité dans le jeu de transition et une débandade au milieu, le PSG souffrant numériquement et par l’intensité. De quoi conforter Verratti sur son rôle, certainement, et convaincre  les derniers supporters prudents sur le frêle relayeur transalpin. Car loin des blessures, de l’indiscipline et de la vie parisienne qu’il aime un peu trop, force est de constater : il y a un PSG avec et sans Verratti. «
C’est un garçon qui a des qualités techniques que beaucoup d’autres n’ont pas», souffle par exemple Luis Fernandez, directeur du centre de formation du PSG et ancien coach du club de la capitale.

La pierre angulaire au coeur du jeu

Le talent, c’est forcément un peu (beaucoup) inné chez Verratti. Et en quelques années, Paris ne s’est pas trompé. Membre à part entière et dernier survivant du triangle Motta-Matuidi-Verratti, il fait désormais partie des meubles, si on peut dire, et conserve une cote élevé auprès des décideurs parisiens. En témoignent ses nombreuses prolongations depuis son arrivée (même s’il n’a pas prolongé depuis 2016 et qu’il a changé d’agent, quittant son historique Donato Di Campli pour Mino Raiola), symbole que Doha compte bel et bien sur son milieu de terrain. Et c’est bien là l’essentiel, pour un club qui s’auto-proclame amateur de beau jeu, amoureux d’esthètes et souhaite rêver plus grand. «Je ne pourrais jamais vendre Marco car je le considère comme le champion autour duquel je veux construire un grand PSG et si je le vends, je joue ma place. A Doha, ils ne me le pardonneront jamais», aurait d’ailleurs dit Nasser Al-Khelaïfi à l’été 2017, parole de Di Campli, ancien représentant et ami du joueur, au Corriere dello Sport.

Et rien de plus normal, car sur le terrain, le petit bonhomme est devenu la clé du jeu parisien, transformant l’équipe qualitativement par sa présence, et l'entrainant vers le bas, le rythme monotone et parfois la possession stérile par son absence. «C’est un milieu qui, au coeur du jeu, a une facilité de pouvoir se retourner, d'accélérer le jeu par la passe et de mettre ses coéquipiers dans les meilleures conditions, continue Luis Fernandez. Je suis de ceux qui pensent que pour faire fonctionner une équipe au haut niveau, il faut des joueurs créatifs. Marco en fait partie, à ce poste-là. Talent, technique, il a tout.» Joueur qui touche parfois à lui tout seul plus de ballons que le trio offensif sur quatre-vingt-dix minutes, le numéro 6 rouge et bleu gère le tempo, la hauteur du bloc - quand ses défenseurs rechignent parfois à le faire -, enclenche parfois le pressing (notamment sous Unai Emery, où on le voyait même parfois presser sur le gardien adverse !) et surtout, représente le parfait dynamiteur aux quatre coins du terrain, aussi bien capable de trouver une passe impossible dans les trente derniers mètres que de se sortir tout seul d’un pressing agressif.

Une excellente relation avec Neymar, entre autres

Affichant la stat’ hallucinante de 90% de passes réussies minimum sur toutes ses saisons dans la capitale (et personne ne pourra dire qu’elles sont exclusivement latérales), Marco Verratti n’a plus vraiment de souci à se faire avec la concurrence ; et surtout pas en ce moment, après le départ incompréhensible de Lo Celso, entre autres. Longtemps, ceux qui lui ont reproché de ne pas progresser se sont assagis, et le seul obstacle à la carrière de l’international italien semble, aujourd’hui, être lui-même. «On en attend toujours plus de Marco, on veut qu’il puisse encore élever son niveau, analyse encore Luis Fernandez, admirateur de l’Italien mais aussi prudent. Il a eu des pépins physiques ces derniers temps et il faut être très très attentif. Surtout au milieu car ça lui demande une grosse activité. C’est les craintes que j’ai le concernant, car il faut qu’il soit à 100%.» Réputé bon client des points de vente à nicotine, Verratti n’a en effet pas trouvé que des amis au coeur la fanbase parisienne, la faute à ses pépins physiques récurrents et aux javas nocturnes. Mais l’arrivée de Tuchel, intransigeant sur l’hygiène de vie de ses ouailles, pourrait changer la donne, aussi sur le terrain qu'en dehors, dans une philosophie tactique idoine pour Verratti. Fernandez abonde : «Tuchel veut qu’il y ait de la possession et de la verticalité aussi. Marco est parfait pour ça.»

Et question verticalité, sa relation technique avec Neymar peut être l’arme fatale du PSG version 2018-19. Repositionné en 10, le Brésilien offre désormais des options de passes nouvelles à Verratti, en plein coeur du jeu. Agile pour se retourner, Neymar peut très bien recevoir le ballon dos au but, mais également solliciter nombre de une-deux avec son pote du milieu de terrain, attirant également l’attention du bloc défensif pour ouvrir des espaces à Rabiot ou des ailiers. Parfait pour Tuchel, qui peut compter sur cette nouvelle corde et qui l’a sans doute remarqué, et surtout Verratti, tandis que le pressing parisien commence à peser au fil des matches, comme à Nice. L’Italien y prendra part à 100%. «Il doit encore s’améliorer au niveau du pressing et de l’intensité. Il a parfois tendance à avoir trop de tranquillité, car il a beaucoup de qualités, mais il est très au-dessus de la moyenne, c’est certain, décrypte Fernandez sur ce point. Aujourd’hui, après, quand on regarde les milieux de terrain, et ce sont eux qui donnent la force d’une équipe qu’ils soient 6, 8 ou 10, Verratti est très complémentaire avec Rabiot. Ça requiert par contre un certain niveau d’exigence, d’envie, et là Marco peut s’améliorer.» S’améliorer, sans cesse, pour passer de joueur clé à héros ? Quoi qu’il en soit, avec ou sans ballon, une chose est sûre : Verratti est indiscutable, indispensable même. Et nécessaire à la bonne santé du PSG, de ses ambitions et des prédispositions tactiques, à commencer en Ligue des champions. Pour qu’Anfield 2018 ne devienne qu’un lointain souvenir au Camp des Loges... No Verratti, no party.

Antoine Bourlon

*Il était suspendu après son carton rouge reçu face au Real Madrid la saison passée.