Haaland (D.R)

«Il a un don extraordinaire pour le football», «Un jeune talent affamé» : sur les traces d'Erling Haaland, à Bryne, en Norvège, là où tout a commencé

Comment Erling a commencé à devenir Haaland. FF vous emmène à Bryne, en Norvège. Découvrez les témoignages de ceux qui l'ont vu arriver au haut niveau. (Photo : Erling Haaland, tout à gauche, tout sourire, chez les jeunes du Bryne FK)

Bryne. Petite ville norvégienne d'un peu plus de 10 000 habitants située à plus de 500 kilomètres au sud-ouest d'Oslo, la capitale du pays. C'est ici qu'Erling Haaland a connu ses premières émotions footballistiques. Né à Leeds pendant que son père, Alf-Inge Haaland, évoluait en Angleterre, le jeune Haaland, une fois le paternel rentré au pays, grandissait au sein du Bryne FK. Jusqu'à intégrer l'équipe première à seulement 15 ans. Une seule saison. Seize matches de Championnat. Quatre titularisations... et aucun but. Un apprentissage que racontent les témoins de l'époque pour FF. Alf Ingve Berntsen, d'abord, l'entraîneur de Haaland pendant plusieurs années chez les jeunes. Puis quatre ex-coéquipiers qui n'ont pas oublié le blondinet.

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Alf Ingve Berntsen : «Deux buts sur ses deux premières minutes»

«Au total, 12 000 personnes habitent à Bryne, c'est donc une petite ville. Le Bryne FK est un club de troisième division. Il y a environ 600 enfants qui y sont licenciés. J'ai rencontré Erling quand il allait sur ses six ans. J'ai tout de suite vu qu'il avait quelque chose de spécial : il a marqué deux buts au cours des deux premières minutes de futsal. C'était en trois contre trois mais cela a montré son potentiel dès le plus jeune âge. Dès le premier jour, il a été un attaquant, un buteur. Toujours. Il a été formé dans un groupe de 40 joueurs. Erling jouait avec des garçons d'un an de plus que lui. Et pourtant, il était très bon pendant toutes ces années.

Ils ont été formés jusqu'à leur 15 ans. Erling avait une taille normale, mais était un petit peu maigre. Il a eu une poussée de croissance à l'âge de 14 ans, il a grandi de plusieurs centimètres en quelques mois. À partir de 12 ans, nous imaginions qu'il allait devenir un joueur international. Mais c'est arrivé plus vite que nous le pensions. Je ne peux pas vous décrire un but qui m'a marqué, il en a tellement inscrit ! Erling est un gars sympa, amusant, qui a un don extraordinaire pour le football. Il s'est beaucoup entraîné avec l'équipe, mais aussi avec ses amis, sur son temps libre, les samedis et les dimanches. C'est lorsqu'il était en U15 que de nombreux clubs ont commencé à s'intéresser à lui. Avant, il faisait partie d'un très bon groupe de joueurs. Cinq du groupe de quarante ont joué pendant plusieurs années dans les équipes de jeunes U17, U18, U21 de la Norvège. Erling n'a donc pas eu à changer de club plus tôt car, à Bryne, le niveau était de bonne qualité. Il était un très bon joueur, il a été intégré à l'équipe première. Il a joué dans un Championnat très physique, presque comme le Championnat d'Angleterre.

Il a donc acquis une expérience très importante à un niveau élevé. Et, dans l'équipe, même s'il n'a pas marqué, Erling a joué un rôle très important. Il a quitté le club après ses 16 ans pour Molde, la meilleure équipe de Norvège. Ce qui le caractérisait le plus ? Il souriait beaucoup. Il s'entraînait beaucoup. Il marquait beaucoup. Il était très intelligent dans la surface, il était très fort mentalement, très sérieux comme athlète concernant la qualité de l'entraînement, la nutrition et les habitudes de sommeil. Il ne mangeait que des aliments bons et sains, jamais de malbouffe. Il utilisait aussi déjà des lunettes spéciales s'il était sur son téléphone, sur son ordinateur ou devant un écran le soir. Ses yeux sont sains à 100%. En dehors des terrains, il était drôle, gentil, humble.»

«À partir de 12 ans, nous imaginions qu'il allait devenir un joueur international. Mais c'est arrivé plus vite que nous le pensions.»

«Il utilisait aussi déjà des lunettes spéciales s'il était sur son téléphone, sur son ordinateur ou devant un écran le soir. Ses yeux sont sains à 100%.»

Alf Ingve Berntsen, le premier entraîneur de Haaland. (E.Garnier/L'Equipe)

Bajram Ajeti : «Un travailleur acharné»

«C'était un jeune joueur normal dans l'équipe. Il n'y avait rien d'impressionnant chez lui à l'époque, c'était juste quelqu'un de grand, de maigre et de rapide. Mais Erling était un travailleur acharné, se donnant toujours 100% à chaque entraînement et en étant toujours humble. Je pouvais voir qu'il avait quelque chose mais je ne pouvais pas imaginer qu'il allait devenir si bon. Il n'a marqué aucun but ? Oui, mais ce n'est pas que c'était compliqué pour lui, c'est qu'il n'a pas beaucoup joué et il était très jeune à l'époque. Il ne parlait pas tellement de ses rêves mais, oui, je pense qu'il avait le rêve de jouer dans les grands clubs européens.»

Je n'ai jamais eu Berntsen en tant qu'entraîneur, mais j'ai entendu beaucoup de bonnes choses à son sujet. Erling, je l'ai surtout connu lorsque nous avons joué ensemble en équipe première. Il n'a pas peur de relever n'importe quel défi. Assez tôt, sa mentalité de travail m'a impressionné. Ensemble, je me souviens que nous avons fait un exercice de finition sur un de nos jours de congés. Je pouvais clairement voir sa mentalité de travail. J'ai appris ce jour-là que son plus grand talent n'était son physique ou sa capacité à marquer des buts (qui sont évidemment incroyables). Son plus grand talent est qu'il a une mentalité de travailleur. S'il ratait un tir sous un certain angle, il en tentait de nouveau cinq de la même position afin de bien faire les choses. J'ai compris très tôt qu'il allait devenir un grand buteur. La plupart de ses qualités sur le terrain ne sont pas du pur talent naturel. Il s'est frayé un chemin jusqu'à où il se trouve aujourd'hui. Je ne me souviens pas d'un but en particulier mais qu'il était une machine à buts pendant l'entraînement. Je me rappelle que Bryne était dans une mauvaise spirale de performances cette saison-là.

Nous avions vraiment du mal à marquer des buts et cela a certainement affecté un très jeune joueur comme Erling à l'époque. Mais le voir aussi jeune et le voir jouer à un si bon niveau était impressionnant. Principalement, il jouait soit attaquant axial, soit ailier gauche. Sinon, ce n'est pas la personne la plus "vocale", la plus extravertie dans un cadre social. Il n'était pas le gars le plus bruyant dans le vestiaire, mais il n'était pas non plus sur la retenue. Dès son plus jeune âge, je pense qu'il rêvait de devenir un grand footballeur. Toute l'équipe, y compris moi, on s'est vite rendu compte qu'Erling n'allait pas rester longtemps à Bryne. Il s'est démarqué comme l'un des meilleurs attaquants à un si jeune âge... Il avait beaucoup trop de talent pour rester dans ce club. La seule question était de savoir quand Bryne le laisserait partir.»

C'est ici, dans le stade du Bryne FK, que Haaland aurait aimé pouvoir y inscrire son premier but en première division. (E.Garnier/L'Equipe)

Sondre Norheim : «Une machine à buts»

«Bryne est un petit club qui essaie d'avoir beaucoup de joueurs locaux. Il y a surtout un intérêt local pour l'équipe avec environ 1000 personnes aux matches. Je connais Erling depuis très longtemps. Il a évolué dans des équipes de jeunes en dessous de moi. (Alf Ingve) Berntsen a été l'entraîneur de l'équipe d'Erling pendant de nombreuses années et a parfaitement préparé le terrain pour qu'il devienne un si grand joueur.

Je me souviens qu'on pouvait rester longtemps après un entraînement pour faire des séances de penaltys avec deux autres amis. Je pense que Zlatan (Ibrahimovic) était son idole. Ce qui m'a le plus impressionné chez lui, ce sont ses capacités face au but. On pouvait voir que sa finition était impressionnante. C'était un très jeune joueur à ce moment. Il venait de faire des débuts et il essayait de s'adapter. La Ligue norvégienne est connue pour être très difficile, physique, et Erling n'était pas le plus grand garçon. Il devait jouer d'une autre manière, être plus intelligents que ses adversaires, ce qu'il était. Je me souviens aussi d'une fois où avec des amis, nous avions écrit une chanson. Son nom d'artiste, c'était Lyng.»

«J'ai appris ce jour-là que son plus grand talent n'était son physique ou sa capacité à marquer des buts (qui sont évidemment incroyables). Son plus grand talent est qu'il a une mentalité de travailleur.»

«Il avait beaucoup trop de talent pour rester dans ce club. La seule question était de savoir quand Bryne le laisserait partir.»

Dans une équipe, tout le monde veut jouer, tout le monde veut commencer un match dans le onze. Mais pour moi, c'était le plus grand talent du football norvégien. J'ai vu son attitude, la façon dont il voulait être bon dans son jeu. J'ai vu le talent que je vois aujourd'hui, qu'il a tellement amélioré. Alors oui, il y avait un peu de discussions autour de lui, certains joueurs ne comprenaient pas pourquoi il avait autant de temps de jeu, il n'était pas assez bon. Il était peut-être trop faible à ce moment-là. Les gars ne comprenaient pas vraiment. Mais, aujourd'hui, ils voient que c'était la bonne décision. J'ai tout de suite vu que c'était un futur grand joueur. Il n'avait peur de rien, pas peur de faire des erreurs. Nous avions une bonne relation. Il est venu me voir plusieurs fois et m'a posé des questions sur le mouvement dans la surface. Quelques fois, il venait me voir pour obtenir des conseils sur le jeu de tête, parce que j'étais bon là-dessus. Et pendant les exercices qu'on faisait, il me demandait ce que j'en pensais, comment étaient ses mouvements, son corps... C'était amusant de pouvoir donner des conseils. J'essayais d'être là pour lui et lui dire comment et pourquoi je faisais ces mouvements. (Au sujet de non-réussite devant le but cette saison-là) Il était frustré bien sûr. En tant qu'attaquant, quand vous ne marquez pas, vous êtes toujours frustré, vous commencez à demander pourquoi, et vous ne croyez pas en vous-même, la confiance diminue.

Mais il savait qu'il devait être patient, continuer à travailler et croire en lui-même. Et il était vraiment bon pour ça. Il pensait toujours à la prochaine occasion. En dehors des terrains, c'était un garçon drôle et souriant, sans vouloir prendre trop de place. C'était un peu le gars avec qui tu as envie de parler tout le temps parce qu'il a l'air sympa. Son père était une grande idole pour lui, parce qu'il voulait être meilleur et apprendre de lui. Car Erling, c'était tout le temps football, football, football. Je ne suis pas du tout surpris que nous ayons bientôt devant nous l'un, si ce n'est le meilleur attaquant au monde. Il a le package d'un grand buteur : finition, force, vitesse, attitude. Je suis vraiment très heureux pour lui.»

Erling Haaland, dernière rangée à droite sur l'image, dans une des équipes de jeunes du Bryne FK.

Fitim Kastrati : «Zlatan était son idole»

«La première fois que j'ai vu Erling, c'était lors d'un entraînement. J'étais nouveau au club et j'ai entendu dire que ce garçon allait s'entraîner avec nous deux à trois fois par semaine. Bien sûr, au début, c'était surprenant car il avait entre 14 et 15 ans et c'était assez inhabituel en Norvège. Mais il a toujours été un bon mec. Il venait à l'entraînement, il faisait son truc et n'était pas arrogant ou autre. Il était humble. Au début, il ne disait pas grand-chose, c'était un garçon timide. Mais avec certains coéquipiers proches, on avait l'habitude de beaucoup parler et plaisanter avec lui pour qu'il se sente à l'aise car ça devait être difficile d'être un garçon si jeune dans une équipe senior.

«Son nom d'artiste, c'était Lyng.»

Aram Khalili : «Unique en son genre»

«La première fois que j'ai rencontré Erling, il était comme un jeune talent affamé qui voulait améliorer son jeu, il était unique en son genre, il voulait tout le temps chercher le meilleur, apprendre des meilleures équipes. Je voyais sur son visage, dans ses yeux qu'il travaillait pour quelque chose de plus grand. C'était un garçon un peu timide, mais qui avait toujours le sourire aux lèvres et le feu dans les yeux. À cette époque, le club de Bryne avait des problèmes économiques. C'était une très mauvaise période donc ils ont vu le talent d'Erling, qu'il pourrait devenir la nouvelle star et bien sûr être vendu à un plus grand club plus tard. Ils ont cru en lui.

«Le plus grand talent du football norvégien.»

«Son père était une grande idole pour lui, parce qu'il voulait être meilleur et apprendre de lui.»

Timothé Crépin