Giroud, l'éternel «come-back»

Titulaire et buteur face à Tottenham samedi, l'attaquant français de Chelsea a démontré, une nouvelle fois, sa capacité de rebond au coeur d'une saison longtemps complexe.

BILEL GHAZI

L'agitation des derniers jours du mercato a laissé place à la frustration. Au moment de la clôture du marché des transferts, l'espace de vingt-quatre heures, elle a même pu accaparer l'esprit d'Olivier Giroud (33 ans), résolu à l'idée de quitter Chelsea cet hiver mais finalement retenu sur le seuil de la porte. L'attaquant de l'équipe de France le savait, son départ était conditionné à une arrivée dans le secteur offensif des Blues. Mais le marché européen des « numéros 9 » est resté amorphe tout au long du mois de janvier. Et son envie de jouer régulièrement et défendre pleinement ses chances de disputer l'Euro-2020 était trop forte pour évacuer, de manière instantanée, les conséquences de ce statu quo.

Après un temps d'analyse et de dialogue, d'un côté entre lui et son entraîneur Frank Lampard, de l'autre entre ses conseillers et ses dirigeants, la semaine de coupure offerte par le club londonien, début février, est néanmoins arrivée à point nommé. Pour lui offrir, notamment, l'occasion de se ressourcer dans les Alpes, en famille, avant d'affronter pleinement le second acte de sa saison et ses questions. « Il s'est mis au vert, à la montagne, raconte son frère ainé Romain. Il en avait besoin après le tumulte du mercato. Il était, à la fois, déçu et soulagé. Déçu car il s'attendait à partir. Mais soulagé aussi car son mercato a été fait de rebondissements et d'incertitudes. Lorsque le couperet de la fin du mercato est tombé, cela a rabattu les cartes. Avant cela, ce n'était pas facile, pour lui, de ne pas savoir ce qui allait se passer en deuxième partie de saison. Là, il savait pour quoi il devait batailler : retrouver du temps de jeu, séduire Lampard et de facto, défendre pleinement ses chances de disputer l'Euro. Au-delà de ces perspectives, il y a aussi le fait d'être libre à la fin de la saison et la possibilité de s'offrir un dernier gros challenge. Les faits étaient là et les choses fixées. Il pouvait travailler en ce sens et mettre son énergie là où il le fallait. » Dans sa tête, il a notamment pu entendre se répéter en boucle la promesse de Lampard qui lui a assuré ne pas l'avoir retenu pour le maintenir hors de ses plans jusqu'à la fin de la saison.

Comme à son habitude, il s'est donc accroché et a maintenu un état d'esprit comme un investissement irréprochables, loués au sein du club londonien où sa mentalité est qualifiée « d'exceptionnelle ». « S'entraîner à Chelsea, cela équivaut à avoir du temps de jeu dans certains Championnats, affirme-t-on dans son entourage. Grâce à l'intensité offerte au quotidien par les séances d'entraînements, tu te maintiens physiquement. Sans oublier son expérience au haut-niveau. Le rythme, tu le perds que si tu lâches à l'entraînement. Ce qui n'est pas son cas. » Déjà en vue lors de son entrée en jeu face à Manchester United (0-2), lundi dernier, Olivier Giroud l'a pleinement démontré à l'occasion du derby face à Tottenham (2-1), samedi. Une première titularisation depuis la réception de West Ham (0-1, le 30 novembre), couronnée de son premier but en Premier League cette saison. Un énième passage de l'ombre à la lumière source d'un bonheur qu'il a pris le temps de savourer ce weekend. Loin, très loin des moments compliqués qu'il a pu traverser cette saison. Entre son déclassement subite dans la hiérarchie des attaquants de Chelsea, fin août, son manque de temps de jeu, la remise en question de sa présence en Bleu à quelques mois de l'Euro qui en a découlé et les différents sentiments qui ont pu le traverser tout au long du dernier mercato.

Durant cette période, les sollicitations avaient pourtant nourri son espoir d'une deuxième partie de saison plus épanouissante. Il ne s'est pas attardé très longtemps sur les approches de Bordeaux, West Ham, Newcastle ou Aston Villa. Mais il a pris le temps d'écouter Jean-Michel Aulas, le président de l'Olympique Lyonnais. Les positions des deux parties sur l'aspect contractuel étaient toutefois trop éloignées et la perspective de retrouver la Ligue 1 loin d'être une priorité. L'opportunité de découvrir la Serie A l'a davantage séduit. Notamment avec l'Inter Milan où il aurait pu retrouver son ancien entraîneur Antonio Conte qui a gardé en tête ses qualités de buteur, son âme de leader et sa capacité à accepter la notion de concurrence. Son entourage a même trouvé un accord contractuel avec le club lombard comme il l'a fait, plus tard, avec la Lazio. Tottenham s'est également invité au bal des courtisans. Et jusqu'au bout, Giroud s'est préparé à faire ses bagages. Sans jamais penser toutefois à forcer son départ, à travers le conflit ou une attitude négative. Une ligne de conduite récompensée quelques semaines plus tard avec cette opportunité offerte et saisie face à Tottenham. « Il m'étonne et m'étonnera toujours, sourit son frère Romain. Même si je sais qu'il n'est jamais aussi fort que lorsqu'il se retrouve dos au mur. » Olivier Giroud l'a prouvé. Encore une fois.