Wissam Ben Yedder goal celebration in Match in the first round of the Champions League final, facing Sevilla FC - Istanbul BB, Ramon Sanchez Pizjuan stadium, Sevilla, Andalucia, Spain, 22-08-2017, photo: Cristobal Duenas *** Local Caption *** (Cristobal Duenas/CORDON/PRESSE/PRESSE SPORTS)

Equipe de France : Wissam Ben Yedder (FC Séville), un dernier ballet pour impressionner

On l'oublierait presque, preuve de sa nature discrète. Pourtant, à 27 ans, Wissam Ben Yedder empile les buts et confirme une première année réussie en Liga. Le deuxième meilleur buteur français sur ce début de saison n'affiche désormais qu'un seul objectif : celui de rejoindre la Russie. Malgré un statut d'éternel oublié.

En Andalousie, on ne jure que par le rythme particulier d'une danse. L'expression de l'essence, d'une région née à la croisée des chemins de différentes cultures. Alors forcément, parler de flamenco à Séville, c'est évoquer une manière de voir et de penser le monde. Jusque dans le football, où l'élégance de certains profils offensifs y est appréciée. Rakitic, Bacca, Banega, Jovetic et le dernier en date, Ben Yedder. L'attaquant franco-tunisien vit sa deuxième saison sous le soleil andalou.

Joueur de rupture, mobile et technique, l'ancien Toulousain possède tous les ingrédients du parfait bailaor (danseur). À Sanchez-Pizjuan, ses talents sont appréciés. Mais c'est sur la scène européenne que le natif de Sarcelles s'est, jusque-là, le mieux exprimé : six réalisations en autant de matches, dont un triplé en phase de groupe contre Maribor. De quoi briller à l'échelle continentale, mais pas de quoi bouleverser la hiérarchie dans la tête de Didier Deschamps. Non retenu pour les matches amicaux du mois de Novembre, Wissam Ben Yedder voit la Russie s'éloigner, lui qui traîne une image de paria dans les instances du football français.

Une adaptation réussie

Après avoir passé six années dans son cocon toulousain et bouclé ses trois derniers exercices avec plus de quinze buts au compteur, Ben Yedder répondait à la sollicitation du FC Séville à l'été 2016. Un intérêt réciproque, et un transfert qui avait manqué de se faire plus tôt à cause de la fermeté (reconnue) du président Sadran. Il quittait alors la quiétude de la ville rose avec 71 buts en 174 apparitions, pour rejoindre les Sévillans, qui venaient de remporter une deuxième Ligue Europa consécutive, et s'apprêtaient à disputer la Ligue des champions. Buteur dès son premier match sous ses nouvelles couleurs, le petit attaquant d'1,70m bénéficiait d'une totale liberté pour décrocher, perturber les lignes dans le 4-4-2 en losange du technicien argentin. Un héritage de ses années de futsal, passerelle peu évidente il y a quelques années, pour entrer dans le monde professionnel. Tantôt buteur en Liga, tantôt en Ligue des champions, l'avant-centre se montrait précieux et clôturait un premier exercice plus que satisfaisant avec 18 buts et 6 passes décisives en 42 matches

Ben Yedder, 27 ans au compteur, prend de l'étoffe en Liga. Cette saison 2017/2018 reste celle de la confirmation, alors que l'équipe andalouse connaît de nouveau des modifications dans son effectif. Son début de saison ne laisse que peu de place au doute. WBY est devenu l'arme offensive numéro une des Blanquirrojos alors que son compère colombien Luis Muriel éprouve des difficultés à s'adapter. En Liga, Ben Yedder a trouvé le chemin des filets à deux reprises en six matches, là où en Ligue des champions il en est déjà à six buts. «Le meilleur début de Championnat de sa carrière», signale ABC de Sevilla. «Si les Sévillans manquent de précision et de confiance, Wissam Ben Yedder apparaît être le seul joueur avec de l'assurance» poursuit le titre andalou. En Ligue des champions, ses débuts tonitruants font noter à Marca que le Français est tout près «d'égaler Luis Fabiano, le meilleur buteur du FC Séville dans la compétition (avec 10 buts, ndlr)». Le quotidien madrilène pense même que «Ben Yedder n'a pas fini d'éblouir les supporters. Ce n'est pas le même type de neuf qu'a eu l'équipe ces dernières saisons. Il est capable de sortir l'équipe de l'impasse mais il doit apprendre à être un homme des grands soirs.» Si son directeur sportif estimait qu'il était un joueur «sous-coté», l'Espagne s'interroge toujours sur un attaquant qui n'a pas encore brillé dans les grandes occasions.

L'horizon n'est pas encore bleu

Pas de quoi perturber l'ancien Toulousain, dans les colonnes de l'Estadio Deportivo : « Quand je joue, je donne tout pour l'équipe. Avec le nouvel entraîneur, je donne le maximum à chaque fois que je joue. Si je pense à moi, individuellement, ce ne sera pas bon. Je pense à moi à l'heure de marquer, mais toujours avec l'idée en tête d'aider l'équipe, car nous avons besoin de beaucoup de joueurs pour faire une bonne saison. Je crois que l'entraîneur a confiance en moi, comme moi j'ai confiance en lui, et c'est important pour gagner beaucoup de matches. Il y a beaucoup de compétitions pour que l'on joue, Luis Muriel ou moi.» Dans la fleur de l'âge pour un buteur, Ben Yedder caresse des ambitions nouvelles et ne se fixe aucune limite : «Le Ballon d'Or ? C'est un objectif. Qui sait. Maintenant, il y a d'autres joueurs comme Messi et Ronaldo, mais moi je vise le sommet.» Le joueur sait d'où il vient, et son parcours loin des standards forge une volonté pugnace malgré la discrétion du joueur.

Forcément, en année de Coupe du monde, il compte mettre les bouchées doubles pour figurer parmi les vingt-trois convoqués. Jusque-là, rien de neuf. Constamment oublié, Ben Yedder, malgré des éclairs de génie, paye toujours une escapade en boîte de nuit du temps où il évoluait avec les Espoirs. Griezmann a pu toucher à la rédemption depuis. L'ancien du Tef' reste dans le rôle de l'oublié, malgré une récente présélection et des prestations qui font de lui le deuxième buteur français cette saison. La convocation chez les Bleus vire à l'obsession pour le Francilien, qui a refusé à maintes reprises de porter les couleurs de la Tunisie, pays d'origine de ses parents. En attendant, ce ne sont pas les occasions qui manqueront à l'avenir pour espérer se faire une place dans la lumière. Discrètement et avec grâce, comme tout bon danseur de flamenco.

Mehdi Mahmoud