À l'été 2018, les dirigeants madrilènes s'étaient félicités de la signature de Thibaut Courtois en provenance de Chelsea. Plus "galactique" que le discret Keylor Navas, donc plus dans l'identité madrilène, malgré le triplé en Ligue des champions auquel a grandement contribué le Costaricien. Et pourtant, le Belge a très vite été critiqué au sein de la Maison Blanche. Fragilisé par la concurrence et une défense moins souveraine qu'auparavant, Courtois a vécu une première saison très difficile, et surtout sans titre pour les Madrilènes. Cet été, Zinédine Zidane a tenté de redonner confiance à son portier en confirmant son statut de numéro un, aux dépens d'un Navas finalement parti au PSG. Après cinq matches en Liga et une claque en Ligue des champions à... Paris (0-3), force est de constater que le débat n'est toujours pas refermé, comme l'explique le quotidien espagnol AS : «Après le départ de Navas, Courtois s'était tiré d'affaire en déclarant qu'il était maintenant clair qui était le numéro un. Mais le Belge n'a toujours pas joué en tant que tel...»
2018-19, sa pire saison statistique
Les supporters merengue pestent, estimant que le rendement du portier belge est très largement inférieur à ce qu'il avait montré avec l'Atlético Madrid (de 2011 à 2014) et Chelsea (entre 2014 et 2018). Au vu des statistiques, on ne peut leur donner tort. Sous le maillot du Real, Courtois a encaissé 57 buts en 41 matches. Soit un but pris toutes les 64 minutes... quand il encaissait toutes les 91 minutes avec Chelsea, et toutes les 110 avec l'Atlético ! Une statistique marquante, à mettre en lumière avec ses prédécesseurs. Navas au Real Madrid, c'était en moyenne 0,98 but encaissé par rencontre pour 73% de tirs arrêtés. La moyenne d'Iker Casillas était de 1,03 but par match durant ses seize saisons au club, pour 73% de tirs arrêtés lui aussi. Courtois ? 1,42 but encaissé par match en moyenne, et 63% de tirs stoppés.
Certes, les époques sont différentes, et le Real Madrid a vécu une saison de transition l'an passé, avec une défense souvent à la dérive, qui explique en petite partie l'écart significatif au niveau des buts encaissés. En petite partie seulement, car le pourcentage d'arrêt, bien que le Belge ait été plus exposé que ses prédécesseurs, est éloquent, et montre bien à quel point sa première saison madrilène a été compliquée. Meilleur gardien de Liga en 2012-13 et 2013-14, et de Premier League en 2016-17, le Diable Rouge semble aujourd'hui loin de son meilleur niveau. Selon Bruno Govers, journaliste à l'hebdomadaire belge Sport/Football Magazine, cette mauvaise passe est logique : «Comme lorsqu'il était arrivé à Chelsea, il a besoin d'une phase d'adaptation. Passé par l'ennemi au début de sa carrière, il a été descendu rapidement par les supporters, qui ne lui ont rien pardonné. En plus, il n'a pas été totalement irréprochable en dehors des terrains.»
Un visage opposé de ce qu'il a pu montrer avec sa sélection. Sur la seule saison 2018-19, il a réussi 7 clean-sheets avec la Belgique, en 11 matches disputés. Avec le Real, il a réussi à garder sa cage inviolée seulement 10 fois en 32 rencontres... Avec son équipe nationale, il parvient à être décisif, et transmet sa sérénité à ses défenseurs. Pour Bruno Govers, tout est une question de repères : «Il a ses habitudes en sélection depuis plus de six ans maintenant. Il est régulièrement aligné avec les mêmes défenseurs, et, ce qui est frappant, c'est la souveraineté qu'il dégage, contrairement à ce qu'on ressent à Madrid.» Cela avait notamment été le cas lors de la Coupe du monde 2018, durant laquelle il avait terminé meilleur gardien, et été l'auteur de 27 arrêts en 7 matches. Avec des performances marquantes face à l'Angleterre en phase de groupes et contre le Brésil en quarts de finale, notamment.
«Il a été descendu rapidement par les supporters, qui ne lui ont rien pardonné» (Bruno Govers, Sport/Foot Magazine)
Pas décisif dans les grands matches
C'est cette capacité à briller dans les grands matches, qu'il a démontrée avec les Diables Rouges, qui lui est reprochée à la Maison Blanche. Comme un symbole, il a encore une fois été l'auteur d'un match neutre face au PSG en ouverture de la Ligue des champions. Pour le quotidien espagnol Marca, Thibaut Courtois «n'a pas commis d'erreur flagrante à Paris, mais ne transmet pas de sécurité. Être gardien de but du Real Madrid est une profession à risque, et le Belge le prouve : le débat le hante.» Courtois semble aujourd'hui perméable à la pression. Avec l'Atlético puis Chelsea, il avait pourtant démontré sa capacité à être décisif dans les rencontres qui comptent. Notamment en 2013-14, saison durant laquelle il avait grandement contribué au parcours des Colchoneros en Ligue des champions : malgré la défaite en finale face au Real Madrid, il avait été élu meilleur gardien de la compétition. Pour Bruno Govers, «le Courtois de l'Atlético, ou bien celui que l'on connait en sélection, n'aurait jamais encaissé le premier but de Di Maria à Paris, dans un angle si fermé». Entre les deux passages madrilènes de Courtois, Le contraste est pour le moment saisissant.
Face à l'Atlético justement, ce samedi, il a l'occasion de montrer que la confiance que lui maintient Zinédine Zidane en ce début de saison l'apaise, et qu'il peut retrouver son meilleur niveau. Car derrière lui, Alphonse Areola est prêt, il l'a prouvé face à Osasuna mercredi (2-0). Titularisé par le technicien français en raison d'un turn-over annoncé, le gardien prêté par le PSG s'est montré rassurant, bouclant sa première rencontre sous son nouveau maillot sans encaisser de but. Pas de quoi fragiliser le Belge selon Zidane. Derrière une défense redevenue souveraine depuis la claque face au PSG, Courtois doit retrouver son meilleur niveau. Dans le cas inverse, sa situation au sein du club merengue n'a pas fini de faire débat dans les travées de Santiago-Bernabeu.