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Décès d'Henri Michel : «On pensait qu'il était immortel», anciens joueurs et coéquipiers le racontent

La disparition d'Henri Michel a évidemment beaucoup ému le monde du football. D'anciens coéquipiers et d'anciens joueurs qui ont été coachés par le Français nous racontent leurs souvenirs.

William Ayache* : «Quel homme, quel homme !»
«C'est un jour triste. Henri a été un grand Monsieur, un grand homme. Il incarnait l'état d'esprit nantais à la perfection : l'altruisme, le partage, la générosité. Pour notre génération, quand on est arrivé en 1977, je crois qu'il était comme une idole pour beaucoup. En fait, on pensait qu'il était immortel. Quel homme, quel homme ! J'ai trop de souvenirs avec lui. Il a berçé mon adolescence, il a été un exemple. Et j'ai eu ensuite la chance de participer à plein de choses avec lui entre les Jeux Olympiques, la Coupe du monde 1986, un titre avec Nantes... On ne peut même pas imaginer le joueur qu'il était. Il n'y a pas de joueur comme lui, comme il n'y en a pas comme les Platini, Giresse... Il incarnait la fidélité. Il aimait la vie, les gens, et ces derniers lui rendaient. (La gorge nouée) Pour nous, les Nantais, c'est un peu difficile. C'est beaucoup d'émotions.»

*Ancien coéquipier et ancien joueur d'Henri Michel.

Dominique Bijotat* : «On était heureux d'aller en équipe de France avec lui»
«Je n'en ai que de bons souvenirs, notamment dans la relation joueur-sélectionneur. Mais aussi, et avant tout, au niveau de l'homme. C'était quelqu'un de généreux. Je n'ai jamais vécu un rassemblement avec lui où je n'ai pas ressenti ça. On était bien du début à la fin. Aujourd'hui ça peut paraître facile de le dire, mais on était heureux d'aller en équipe de France avec lui. J'avais un regard très tendre sur lui quand j'étais joueur. Je démarrais ma carrière. Il y avait donc ce rapport là, admiratif de l'ensemble de sa carrière. Cela a joué dans le contact que j'avais avec lui. Il mettait à l'aise son groupe, il vous responsabilisait : j'ai beaucoup aimé son management. Si on a réussi à gagner les JO, ce n'est pas parce qu'on avait la meilleure équipe, mais le meilleur groupe. Et dans ce groupe, il y avait Henri et son staff. Aujourd'hui, c'est vraiment une tristesse humaine et, bien sûr, sportive. J'avais eu de ses nouvelles il y a quelques temps où on s'était vus avec des anciens. On le savait très malade. C'est véritablement une grande tristesse.»

*Membre de l'équipe de France, entraînée par Henri Michel, vainqueur des JO 1984.

Bernard Blanchet* : «Il m'a fait marquer beaucoup de buts de la tête alors que je suis tout petit»
«Je suis très ému d'apprendre son décès. Par rapport à tout ce qu'il a apporté au football. Un parcours extraordinaire. On a joué douze ans ensemble, on se connaissait bien. On se complétait bien. Il m'a fait marquer beaucoup de buts de la tête alors que je suis tout petit. Il savait la donner au moment où il fallait. Il était très, très fort dans le jeu sans ballon. Il était très bon sur le plan technique et sur le plan mental. Il ne baissait jamais les bras, il se montrait toujours courageux. Il savait tout faire : défendre, attaquer, marquer des buts, donner les bons ballons. Humainement, il était très attachant. Le seul petit problème, c'est qu'il aimait bien faire la fête après les matches. Autrement, il était extraordinaire dans son comportement. Il a tellement apporté dans notre club.»

*Ancien coéquipier à Nantes.

«Sincèrement, c'était un mélange entre un copain, un père, un chef de bande»

Éric Pécout* : «C'était un mec vrai, il n'y en a pas des millions des comme ça»
«Je suis triste. Ce Monsieur m'a beaucoup marqué. Dans tous les domaines. J'ai eu la chance de démarrer à Nantes vers 15-16 ans, et c'était vraiment la star du club. Quand on arrivait gamin, on le regardait avec de grands yeux. Il nous accueillait à bras ouverts. On était une bande de jeunes à l'époque, et il nous a marqués, fait progresser. On a eu la chance de porter le même maillot que lui. Un homme assez surprenant, que tout le monde ne connait pas complètement. Sincèrement, c'était un mélange entre un copain, un père, un chef de bande. Le vrai capitaine à l'ancienne, et pas que sur le terrain. Dans la vie, c'était également comme ça. Un mec hyper attachant. J'ai adoré la formule de Bruno Baronchelli qui disait que c'était un seigneur. Ça reflète très bien Henri Michel. Un mec brillant et tourné plus vers les autres que vers lui. Il aurait pu se satisfaire d'être une star, mais il était dans son rôle de capitaine. Il était aussi fort sur le terrain que nous on l'aimait dans la vie. C'était un mec vrai, il n'y en a pas des millions des comme ça. On ne pouvait qu'aimer le personnage.»

*Au FC Nantes d'Henri Michel de 1971 à 1981.

Thierry Tusseau* : «C'était un mentor»
«Il a marqué le football nantais et français. Pour moi, c'était un mentor. Je suis arrivé tout jeune à Nantes, il était en haut de l'affiche. Il allait toujours de l'avant, il avait de la joie de vivre. Il mérite tous ces hommages. C'est là qu'on s'aperçoit qu'il a marqué son époque. Dans les années creuses du football français, je pense qu'il était le numéro 1 de cette période avant que n'arrive Michel Platini par exemple. C'était un joueur exceptionnel. Je savais qu'il était malade, mais je ne pensais pas que cela serait allé aussi vite.»

*Nantais de 1974 à 1983.

Jean-Marc Ferreri : «Une partie importante de ma carrière et de ma vie»
«J'appréciais l'entraîneur et j'ai beaucoup aimé l'homme, avec qui j'ai notamment disputé la Coupe du monde au Mexique (1986). On a vécu des moments forts comme lors des stages à Font-Romeu. Je me suis toujours bien entendu avec lui. Il avait une valeur humaine très importante. J'aimais bien son humour, un peu froid, un peu chambreur. On était les jeunes espoirs du foot français avec José Touré et Philippe Vercruysse quand il a pris l'équipe de France. Il avait tendance à beaucoup compter sur nous donc il nous chouchoutait. C'est une partie importante de ma carrière et de ma vie. Je suis très peiné.»

*Entraîné par Henri Michel en équipe de France.

«Quand je le croisais le matin, je n'osais pas le saluer»

Fabrice Picot* : «On avait tous envie de jouer à côté de lui»
«C'était un modèle, c'était notre guide quand j'étais au club. À la fois un homme et un joueur fantastique. Nous, les jeunes, il nous accueillait avec beaucoup d'humilité. Je vais vous raconter une anecdote : lorsque je suis arrivé à Nantes, quand je le croisais le matin, je n'osais pas le saluer parce que je ne pouvais pas dire "Bonjour Henri" ou "Bonjour Monsieur", j'aurais eu l'air ridicule... alors qu'il nous mettait extrêmement à l'aise. Il avait une telle aura. Il y a des gens qui avaient un charisme naturel, il en faisait partie. En dehors d'être un joueur extraordinaire, c'était un super coéquipier. Chez moi, j'ai une seule photo de football en noir et blanc : c'est Henri qui vient me féliciter pour mon premier but chez les pros. Au niveau du football, c'était notre père, notre modèle. Il représentait tellement de choses à Nantes. On avait tous envie de jouer à côté de lui. Sa disparition me touche et m'attriste beaucoup. J'ai perdu quelqu'un de très, très cher.»

*Coéquipier d'Henri Michel à Nantes de 1974 à 1982.

Gharib Amzine* : «Au Maroc, il a été adopté par tout le pays»
«J'ai appris la nouvelle à 14 heures. Je n'en reviens pas encore... Ce sont beaucoup de souvenirs qui sont réapparus. C'est le premier qui m'a offert la chance de jouer avec l'équipe nationale du Maroc. À l'époque, je jouais en Ligue 2 alors que d'autres évoluaient en première division dans différents Championnats. Sincèrement, j'étais très attaché à lui et à la confiance qu'il a pu me donner. Lors de la Coupe du monde en France, il était très proche des joueurs. Lors de ses causeries, c'était vraiment un meneur d'hommes, il savait de quoi il parlait. Il avait confiance en nous. Je me rappelle aussi de ces moments d'après-match, d'échanges, de discussions autour d'un verre. Moi qui commençait seulement à toucher le haut niveau, j'étais étonné de la simplicité de l'homme qui, je le savais, avait été un très grand joueur français. Au Maroc, c'est une icône, il a été adopté par tout le pays. C'était sa deuxième patrie. Il était très aimé du Roi Hassan II et du Roi actuel, Mohammed VI. Il a donné une image très positive du football marocain. Pour tous les amoureux du foot, il compte énormément, c'est un Monsieur.»

*Joueur d'Henri Michel lorsque celui-ci dirigé la sélection du Maroc (1995-2000).

Timothé Crépin