Soccer Football - Premier League - Tottenham Hotspur vs Liverpool - Wembley Stadium, London, Britain - October 22, 2017 Tottenham manager Mauricio Pochettino Action Images via Reuters/Matthew Childs EDITORIAL USE ONLY. No use with unauthorized audio, video, data, fixture lists, club/league logos or "live" services. Online in-match use limited to 75 images, no video emulation. No use in betting, games or single club/league/player publications. Please contact your account representative for further de (L'Equipe)

De l'Espanyol au PSG, en passant par Southampton et Tottenham, ceux qui ont côtoyé Pochettino décryptent sa méthodologie et son caractère

En 2017, ceux qui ont croisé un jour la route de Mauricio Pochettino racontaient leurs souvenirs à FF.

Article publié sur Francefootball.fr le 16 novembre 2017 alors que Mauricio Pochettino est entraîneur de Tottenham.

Olivier Guégan* : «Il est très proche de ses joueurs»

«J'aime beaucoup ce que dégage Mauricio. Il a énormément de charisme et dégage beaucoup d'empathie. A l'époque de mon BEPS, j'avais travaillé avec trois entraîneurs : Rudi Garcia, Diego Simeone et lui. Et ce qui m'avait impacté chez Pochettino, c'était sa relation avec son effectif. Il est très proche de ses joueurs mais il a aussi une forme de dureté dans le management. Je l'ai vu aussi en 2016, quand je suis allé à Tottenham, notamment dans la façon avec laquelle il a géré Sissoko, acheté pour 30 millions d'euros et qui ne jouait quasiment pas. Mauricio ne lui faisait pas de cadeau mais en même temps, il lui montrait de la confiance, il lui disait qu'il comptait sur lui et que son heure allait arriver. Il arrive à fédérer autour de lui, que ce soit son staff, ses joueurs mais aussi les supporters.

Sa force, c'est son staff. Il a su s'entourer de personnes proches de lui mais surtout très compétentes. Il a trois adjoints qui le suivent partout depuis ses débuts à l'Espanyol : Miguel D'Agostino, Jesus Pérez et Toni Jiménez. Il les a emmenés avec lui à Southampton et à Tottenham. Ce sont les quatre mousquetaires. Ils sont très proches, ce sont des amis dans la vie, et ils ont chacun un secteur qui est bien défini. D'Agostino prépare beaucoup les matches, la stratégie ; Peréz, qui est le préparateur athlétique, s'occupe aussi beaucoup des relations presse ; Jiménez est l'entraîneur des gardiens mais planche aussi sur la formation. C'est un noyau de quatre personnes qui ne font qu'un, et c'est la grande force de Pochettino d'avoir réussi à créer un staff fiable, droit et très compétent. Pour moi, c'est le manager des années à venir.

Il a toujours eu cette volonté d'un jeu vertical, porté vers l'avant, que ce soit à Southampton ou à Tottenham. Il est friand de ça. Il souhaite avoir la possession, récupérer le ballon le plus haut possible. En plus d'être très agréable à regarder, on voit que ça porte ses fruits. Il y a Harry Kane, Dele Alli et Christian Eriksen qui ont énormément progressé grâce à lui. Mais on peut aussi parler de Lloris, qui selon moi a pris une autre ampleur depuis que Pochettino est arrivé chez les Spurs. Comme les joueurs sentent que c'est un manager fort dans ses convictions, ils ont moins de pression et jouent leur football.»

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Entraîneur de Valenciennes, qui a été en formation avec Pochettino à Southampton puis à Tottenham

«Lloris, selon moi, a pris une autre ampleur depuis que Pochettino est arrivé chez les Spurs.»

Sa principale force, c'est sa capacité à analyser l'adversaire. C'est sûrement quelque chose qui lui vient de son passé de défenseur. Il sait déceler les points faibles des équipes adverses, et va adapter la verticalité de son jeu en fonction. Je le vois mal quitter Tottenham parce que tout est très bien organisé là-bas. Si Zidane trébuche au Real, ça sera sûrement le premier choix de Florentino Pérez. Le PSG ? Cela pourrait être une possibilité. Il a de l'affection pour le club et il faut voir quel effectif il aurait... C'est un luxe pour n'importe qui.»

*Ancien membre du Conseil d'administration de l'Espanyol Barcelone et directeur de La Contra Deportiva

Robert Hernando* : «Il a la compétition dans le sang»

«En tant qu'entraîneur, il a laissé une trace indélébile chez les supporters. Il faut dire qu'il a pris les rênes de l'équipe dans un moment très délicat, l'Espanyol avait très peu de ressources économiques mais réussissait à bien jouer au football. Mauricio a la compétition dans le sang. Il entraîne et fait jouer son équipe avec force, vision et passion. Je dis toujours que c'est un entraîneur qui transforme l'eau en vin. Il n'y a qu'à voir sa trajectoire à l'Espanyol, à Southampton puis à Tottenham, alors qu'il n'avait aucune expérience sur le banc. Habituellement, il est très aimé et respecté de ses joueurs. Je dirais qu'il y a une relation père-fils avec ces derniers : il les aime mais sait les faire souffrir afin de les faire progresser. De toute façon, avec lui, il n'y a pas de juste milieu. Soit vous êtes engagé dans le projet, soit vous n'avez pas besoin d'être là.

A l'Espanyol, c'est lui qui avait désigné Dani Jarque capitaine, malgré une pression de quelques membres du vestiaire à ce moment-là. Il n'avait pas tremblé au moment de donner sa décision. Et c'est un choix que le club respectera toujours. Le pire moment de la carrière de Pochettino était sûrement la mort tragique de Dani (en août 2009). Il était très populaire à l'Espanyol. Quand il était joueur, après les matches, lorsqu'il rentrait à son appartement près du stade avec son fils sur les épaules, il prenait le temps de s'arrêter pour discuter de la rencontre avec les supporters qu'il croisait sur sa route. C'était une autre époque mais c'était rare de voir un joueur prendre autant de temps pour les supporters, et toujours avec humilité.

«Le PSG ? Cela pourrait être une possibilité. Il a de l'affection pour le club et il faut voir quel effectif il aurait... »

Dans le vestiaire, il parlait beaucoup. Il avait toujours un message à transmettre. Au début, c'était en espagnol et puis il a fini par le faire en français. C'était un leader dans tous les sens du terme, sur le terrain et en dehors. Il n'avait aucun souci pour dire les choses quand il y avait un problème, mais il ne s'énervait jamais. Je l'ai jamais vu sortir de ses gonds et c'est une marque de caractère. Mais un bon caractère. Pour être manager, il faut tout maîtriser, et lui n'a aucun souci pour ça.

Ça ne m'étonne pas qu'il soit devenu un bon entraîneur car il a plusieurs casquettes. Déjà, même s'il est beaucoup moins communicatif qu'un autre défenseur central qui sera plus rugueux et qui va parler plus fort, il a une détermination argentine. Et du côté espagnol, il a baigné dans les entraînements de qualité, entouré de joueurs qui produisaient du beau jeu. Et enfin, il a des qualités de leader à la Arsène Wenger, qui se fait entendre mais toujours très calmement.»

*Ancien latéral du PSG (2001-2004) et de l'Espanyol (2004-2006)

Mauricio Pochettino était capitaine du PSG. (LANDRAIN/L'Equipe)

Avec Heinze, j'aimais bien cette charnière du PSG. Ils étaient très rugueux, et je ne l'étais pas forcément. J'essayais ainsi de m'inspirer d'eux, surtout qu'ils étaient à des années-lumière de moi au niveau de l'expérience. Je ne savais pas s'il voulait continuer en tant qu'entraîneur. J'ai plus le souvenir qu'il voulait devenir directeur sportif ou manager. Mais c'était un meneur d'hommes, sans pour autant parler souvent. Il intervenait de temps en temps, mais il ne faisait pas que de parler. Je suis vraiment content qu'il ait réussi dans son après-carrière parce que c'était un gentleman.»

*Ancien défenseur de Bordeaux (2001-2015).

Didier Domi : «C'est surtout un grand observateur»

«Comme j'étais arrière gauche, je n'étais jamais très loin de lui. Il parlait beaucoup, tenait très bien sa défense. Un vrai leader. En dehors du terrain, ce n'était pas un grand comique, mais pas non plus un grand timide. Ce qui m'avait marqué, c'est que c'était surtout un grand observateur. Un jour, à Monaco, on était tous à table et je parlais de je ne sais quoi à mon voisin, en essayant d'être discret. Et Mauricio l'a entendu ! C'est là que je me suis dit qu'il observait tout, qu'il captait tout (rires). Je ne peux pas m'avancer en vous disant que je le voyais entraîneur. Ce n'était pas comme un Paul Le Guen par exemple, qu'on voyait facilement devenir manager. Toutes les qualités de Mauricio pouvaient lui permettre d'en devenir un mais je ne savais pas à l'époque s'il le voulait. Mais il avait déjà toute cette analyse et cette observation qui permettent d'être un bon entraîneur.

«C'était un leader dans tous les sens du terme, sur le terrain et en dehors. Il n'avait aucun souci pour dire les choses quand il y avait un problème, mais il ne s'énervait jamais.»

Marc Planus* : «C'est un meneur d'hommes, sans pour autant parler souvent»

«C'est Elie Baup qui l'avait fait venir. Et j'en ai gardé le souvenir d'un super mec, me donnant beaucoup de conseils. À l'époque, je démarrais ma carrière, c'était ma deuxième saison en pro. Je le trouvais très malin, avec son expérience. C'était un très bon joueur de tête alors que ce n'était pas du tout quelqu'un d'athlétique, en tout cas grand par la taille, il avait une très bonne détente. Un grand professionnel. Un bon mec, très charismatique. Sur le terrain, il était très dur. J'en ai plein de bons souvenirs.

«Je suis vraiment content qu'il ait réussi dans son après-carrière parce que c'était un gentleman.»

Propos recueillis par Antonin Deslandes et Timothé Crépin