griezmann (antoine) mbappe lottin (kylian) (F.Faugere/L'Equipe)

Coupe du monde, quarts de finale, Uruguay-France : Kylian Mbappé, un rôle différent mais tout aussi important

Dans la lignée de son match exceptionnel face à l'Argentine, Kylian Mbappé était attendu face à l'Uruguay. Détonateur du jeu tricolore, il s'est montré moins dangereux, mais pas pour autant moins important.

La pression, un mot qui semble ne pas faire partie du vocabulaire de Kylian Mbappé... Même s'il n'a pas marqué, cette fois, le jeune attaquant des Bleus a encore livré un bon match face à l'Uruguay vendredi. Par sa sérénité, d'abord. Par son talent, ensuite. Et par son vice, aussi, parfois. Après 30 secondes de jeu, le numéro 10 des Bleus avait déjà mis le feu dans la défense uruguayenne. Une prise de balle rapide, vers l'avant, un coup de rein et une passe judicieuse, Kylian Mbappé était dans le bain. Sans s'inquiéter, il a mis le doute, uniquement par sa présence, sur le côté gauche de la Céleste, alors que Diego Laxalt ne restera par la suite que rarement seul pour défendre sur l'enfant prodige de Bondy. Des prises à deux, souvent avec Matias Vecino, qui ont forcément libéré un peu d'espaces au milieu, mais qui n'ont pas empêché pas le joueur du Paris Saint-Germain de continuer à se montrer tranchant. Comme à la 6e minute, où après quelques instants stressants pour les Bleus, Mbappé a remis la marche avant grâce à une nouvelle accélération. Très facile, il a souvent permis à l'équipe de France de trouver des options vers l'avant, l'un de ses rôles primordiaux, et Benjamin Pavard et Paul Pogba l'ont bien compris.

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Seuls reproches à lui faire peut-être, son occasion ratée au quart d'heure de jeu et son implication défensive parfois insuffisante. A la 15e minute, le jeune attaquant des Bleus se retrouvait ainsi seul dans la surface. Trop seul peut-être pour imaginer l'être dans cette position, et il se positionnait mal pour reprendre de la tête - alors qu'il aurait eu le temps de contrôler - et voyait le ballon finir au-dessus du but de Fernando Muslera, pas inquiété pour deux sous par cette tentative. La seule du match pour Mbappé ! Habitué à prendre sa chance, il a cette fois-ci eu peu de ballons proches de la surface à négocier, et c'est davantage par ses prises de balle loin du but qu'il a été dangereux. Peu de centres aussi, alors que son positionnement (voir carte ci-dessous) penche naturellement à droite, mais comme dit plus haut, c'est rarement proche ou sur le côté de la surface qu'il a été servi. Second hic, son implication défensive a été presque inexistante, à l'image d'un ballon pour Luis Suarez à la 57e minute sur le côté, et il va devoir en faire plus dans ce registre. Le Brésil peut compter sur Marcelo et Neymar, la Belgique sur Hazard et un côté gauche offensif. Les Bleus, eux, doivent compter sur Mbappé pour bloquer, au moins a minima, le flanc gauche.

Le positionnement de Kylian Mbappé qui penche naturellement à droite. Le Français a touché 49 ballons. (Source Whoscored.com)

De la sérénité, un peu de vice, Mbappé sur le bon chemin

C'est une évidence, il ne peut pas marquer à toutes les rencontres. Pourtant, sa sérénité, comme celle de toute l'équipe en règle générale, a été d'une aide précieuse, surtout qu'il n'a encore, et on ne peut l'omettre, que 19 ans. Inévitablement en avance sur son temps, il a même montré un peu de vice dans ses duels avec Diego Laxalt et lors d'une action à la 67e minute qui a mis les Uruguayens hors de leurs gonds, voyant le jeune joueur s'étaler au sol après une passe derrière la jambe et une faute quelque peu imaginaire de Cristian Rodriguez. Une attitude agaçante pour certains, mais qui a au moins eu le mérite de casser le rythme et aux Bleus de montrer du caractère, à l'image de Lucas Hernandez, Corentin Tolisso, Raphaël Varane ou Paul Pogba.

Et pour en revenir au jeu, si son match n'a rien de similaire avec celui de l'Argentine (4-3, doublé de Mbappé) et qu'il a évidemment moins pesé, la faute à des espaces réduits, dans la profondeur comme entre les lignes, Mbappé a eu son importance. Celle d'être craint, ce qui montre qu'il est passé dans une autre catégorie, et celle de perdre peu de ballons, de faire les bons choix et de permettre au milieu tricolore - dont le trio Tolisso-Pogba-Kanté a sorti un très gros match - de souffler. Trois petits ballons perdus pour Mbappé, sur 49 touchés. Une statistique qui pourrait en dire peu, et pourtant, le jeune attaquant a pris des risques, dans ses transmissions et ses choix, souvent bons, alors qu'il a dosé et alterné judicieusement le jeu vers l'avant et les passes vers l'arrière.

Plus discret en deuxième période

Après le(s) but(s) français, ce fut pourtant un tout autre match pour Mbappé. Son magnifique appel dans la profondeur à l'entame du second acte, alors qu'il a été totalement oublié par Antoine Griezmann, qui a vendangé là une balle de but, semble être le danger le plus certain provoqué par Mbappé en deuxième période. Noté 6 par FF, le Parisien paye en effet 45 dernières minutes moins rythmées. Et fait les frais, aussi, d'une équipe de France judicieusement plus calme et plus sage. La ligne de récupération se faisait basse, l'adversaire davantage offensif et les opportunités de contre-attaques certes plus importantes, mais les tricolores ont souvent préféré poser à raison le jeu, alors que l'Uruguay gérait bien ses transitions défensives malgré un retard au score conséquent. À ce jeu-là, évidemment, Kylian Mbappé n'y fut pas gagnant. En appétit de grands espaces, de profondeur et de duels en un contre un, le 10 des Bleus n'a pas été servi mais ne peut rien regretter, surtout que les phases de possession tricolores de la deuxième période ont permis de gagner du temps, de souffler et de fatiguer un adversaire qui subissait peu à peu le joug d'une élimination probable.

Pourtant, et on l'a bien senti encore une fois, Kylian Mbappé reste une arme importante et surtout le principal VRP de la menace offensive bleue. À chaque récupération, par exemple, le porteur du ballon porte très souvent un regard vers le benjamin du onze, assidûment prompt à dévorer la profondeur et les intervalles entre les deux Diego de la Céleste, Laxalt et Godin. Et peu importe le prochain adversaire, que ce soit le Brésil ou la Belgique, la configuration sera bien différente, les espaces autrement plus généreux et les blocs adverses beaucoup moins fermés. La France aura donc besoin de son joyau. Et comme ne le dit pas le nouveau running-gag de la twittosphère "Liberté, Egalité, Mbappé", il ne faudra pas oublier la fraternité. Ce qui a fait la force de l'équipe de France face à l'Uruguay. Les 23 Bleus ont à coeur, eux, de faire briller leur jeune numéro 10, Kylian Mbappé.

Antoine Bourlon