calabresi (arturo) (L.Argueyrolles/L'Equipe)

Arturo Calabresi (Amiens) : «Il n'était pas question de rentrer en Italie»

Arturo Calabresi, le jeune défenseur italien d'Amiens, nous raconte sa vie sans football, en raison du coronavirus et du confinement qui en résulte.

Fils d'un acteur de télévision, Romain de naissance, Arturo Calabresi est un pur produit du football de la Ville Eternelle : formé à l'Atletico Rome, il est entré à quinze ans dans les équipes de jeunes de la Roma, qui l'a prêté à plusieurs clubs italiens avant de le céder à Bologne, en juin 2018. C'est précisément le FC Bologne, où il a débuté en Serie A (face à cette même Roma !), qui a prêté à Amiens l'été dernier ce défenseur capable de jouer tant en charnière que latéral. C'est dans le couloir droit de l'équipe picarde que s'est imposé un Calabresi qui en portait toujours les couleurs au moment où le coronavirus a frappé l'hexagone. Témoignage.

«Jusqu'à mi-mars vous luttiez vaillamment avec Amiens pour le maintien en L1. En quelques jours tout a basculé...
Après notre encourageant nul à Marseille (2-2), nous devions recevoir Angers, le 14 mars, mais la veille le match a été annulé et, dans la foulée, les entraînements ont été suspendus. Pour être honnête, cela ne m'a pas pris de cours. En voyant ce qui se passait en Italie, je disais à mes coéquipiers : "les gars, c'est terrible ce qui est en train de se passer, j'ai peur que nous y soyons confrontés rapidement." Je ne me suis malheureusement pas trompé. Maintenant, et vu la gravité de la situation, il faut que nous gardions tous une attitude responsable.

Vous n'avez pas pensé rentrer précipitamment en Italie ?
Non. Cela aurait été une erreur. Vous imaginez les risques que j'aurais fait courir aux autres, à mes proches ? Nous, joueurs professionnels, sommes en excellente condition physique. Ce qui ne veut pas dire que nous ne risquons pas d'attraper et de transmettre le virus. En rentrant à Rome, ma ville natale, j'aurais pu potentiellement mettre la santé de mes proches en danger. Il n'en était pas question. J'ai été choqué en voyant aux informations tous ces gens, tant en Italie qu'en France, prendre d'assaut les trains au moment où les gouvernements annonçaient les restrictions de circulation. Ils n'ont fait que propager plus vite le virus !

Le quotidien d'un pro de 24 ans au temps du Covid-19 ressemble à quoi ?
Je suis dans mon appartement d'Amiens avec ma fiancée. Pas question de transgresser, il faut respecter le confinement à la lettre ! Les sorties, les activités en plein air, on aura toute notre vie pour en profiter. Là, place à la lecture, aux DVD et, bien sûr, aux coups de fil à la famille en Italie. Le 17 mars, j'ai fêté mon anniversaire avec mes amis à distance grâce au téléphone. Un anniversaire 2.0 quoi ! Plus sérieusement, ce n'est pas surhumain ce que nous demandent les médecins et les autorités : rester chez nous. Quand je pense à la vie de nos aïeux qui ont connu les périodes de guerre et sont partis combattre, nous, notre sacrifice, c'est juste de rester sur notre divan ! Mais c'est ce qui permettra de freiner la pandémie.

Quel est votre bilan de ces premiers mois à Amiens avant l'arrêt des compétitions ?
C'est ma première saison hors d'Italie et je ne regrette absolument pas cette opportunité. Pour un joueur italien, ce n'est jamais anodin de partir jouer ailleurs. Nous avons moins cette facilité à quitter nos proches et à parcourir l'Europe comme on peut l'avoir, par exemple, en France, pour s'imposer dans un nouveau contexte, un nouveau Championnat. Quitter l'Italie est même parfois assimilé à un échec. Mais pas pour moi... Ce prêt à Amiens (NDLR. Il appartient à Bologne) est une superbe occasion de démontrer ma valeur, tout en découvrant une nouvelle culture et une ville à taille humaine. Voyager, changer de cadre, ne peut pas me faire peur. Depuis que j'ai quitté les équipes de jeunes de la Roma en 2015, j'ai pas mal bourlingué (Livourne, Brescia, La Spezia, Foggia, Bologne, Amiens).

«Quand je pense à la vie de nos aïeux qui ont connu les périodes de guerre et sont partis combattre, nous, notre sacrifice, c'est juste de rester sur notre divan !»

Alors, le Championnat français ?
Vous savez, je suis le classique défenseur italien, habitué à un jeu plutôt tactique, pas à piquer des sprints à tout-va. Et là, au début, disons les trois premiers matches, je me sentais dépassé. "Merde, tu ne vas pas en choper une !" Mais je me suis accroché, j'ai trouvé le rythme juste et vécu l'aventure à 100%. Et ce 4-4 face au PSG, quel souvenir !»

Roberto Notarianni