buffon (gianluigi) trapp (kevin) areola (alphonse) (E.Garnier/L'Equipe)

«Areola, meilleur gardien français», «Les garanties de Buffon» : les gardiens du PSG vus par les spécialistes

Alors que cinq gardiens (Areola, Buffon, Cibois, Descamps et Trapp) sont sous contrat professionnel au PSG, le Championnat va commencer dans l'expectative d'une véritable hiérarchie. Pour France Football, deux spécialistes du poste, Rémy Vercoutre et Christophe Lollichon, décryptent la situation.

Les desiderata tactiques de Thomas Tuchel et le jeu au pied

Christophe Lollichon, ex-entraîneur des gardiens de Rennes et Chelsea et mentor, entre autres, de Petr Cech : «Par rapport à ce que demande Tuchel, au niveau de la construction du jeu qui part du gardien notamment, Trapp et Areola sont plus au fait qu’un gardien comme Buffon, même si la Juve cherchait à relancer court, mais ça ne nécessitait pas de jouer long très rapidement. Là, il va falloir, pour Tuchel, qui je l’espère a une autonomie de décision, faire un choix parce que ça pourrait être compliqué pour Gianluigi Buffon. Même s’il a encore une capacité d’adaptation, un garçon comme Areola était très au fait de ce type de situation. Et Trapp, aussi, a un bon jeu au pied court. Ça va être important d’avoir comme titulaire celui qui va être le plus adapté à ce que l’on veut faire du ballon dans une récupération basse. […] Tuchel va avoir des impératifs d’animation, de transitions offensives, importantes dans le choix du gardien, qui peuvent l’amener à prendre telle ou telle décision.»
 
Rémy Vercoutre, ancien gardien de Lyon, Montpellier, Strasbourg et Caen : «Le style Tuchel pour les gardiens, c’est ce qu’il se faisait déjà un peu avec Unai Emery. Ça ne va pas changer pour Trapp et Areola et ça ne va pas changer pour Buffon qui avait l’habitude de le faire avec la Juve. À ce niveau-là, les trois ont à chaque fois répondu sur le fait qu’ils étaient en capacité de jouer au pied. Surtout avec un PSG qui a, en Ligue 1, 60 à 70% de possession de balle. En Ligue des champions, c’est différent. Ils risquent d’être un peu plus sous pression et d’être amenés à jouer avec un pressing, c’est une autre manière de faire. Mais que ce soit Trapp, qui est international allemand, Areola, qui l’a déjà fait avec le PSG toute la saison dernière, ou bien Buffon qui le fait depuis 20 ans, et notamment ces dernières saisons avec la Juventus, je ne pense pas que ce soit dans le jeu au pied qu’on puisse les différencier.»

La gestion de la rotation et l'importance de la clarté

R.V. : «Vivre à trois pour une saison, c’est totalement impossible. Je m’attends à ce qu’il y en est un qui s’en aille, sans pour autant oublier qu’ils ont un jeune derrière qui a des qualités, prêté à Tours l’an dernier (NDLR : Rémy Descamps), et qui ne s’y retrouve pas non plus dans cette rotation. Ça fait quatre gardiens (NDLR : cinq, si l’on compte aussi Sébastien Cibois), dont trois internationaux et un jeune prometteur. Honnêtement, c’est injouable. Il va falloir qu’à terme, des décisions fortes soient prises pour un départ d’Areola ou de Trapp. Ce n’est pas viable à terme d’avoir ces trois gardiens. […] Ce qui va se passer, c’est que Buffon va jouer, mais dans quelle mesure ? C’est une grande question, mais les matches importants et ceux à pression, c’est lui qui va jouer. Et si c’est le cas, Areola devra accepter la situation. C’est le propre d’être dans un grand club. La concurrence est remise en cause tous les six mois. Vous ne pouvez pas prétendre à être dans un grand club et ne pas accepter la concurrence. La preuve l’an dernier, avec Szczesny à la Juve, il y avait Buffon et cela a bien marché. Et tous les top clubs européens ont tous des numéro 1 et 2 de très grande qualité.»

C.L. : «Quand on a trois gardiens internationaux, même si Buffon a 40 ans, on peut se demander quel climat va régner au sein du groupe des gardiens. D’abord, est-ce qu’il y a un discours qui a été tenu pour dire qui va jouer, qui va jouer en Coupe, qui va jouer en Championnat ? C’est la première chose, les gardiens ont besoin de confiance et de savoir où ils vont. Après, qu’on s’interroge sur la venue de Buffon, même si c’est une légende, c’est assez logique. D’autant plus quand on a Alphonse Areola en numéro un, qui est un excellent gardien. […] Ce qui est important, c’est de savoir quel discours a été tenu aux gardiens, et surtout à Buffon quand il a signé. Est-ce qu’on lui a dit : "Tu vas jouer que les matches de Ligue des champions ?" C’est important.»

«D'abord, est-ce qu'il y a un discours qui a été tenu pour dire qui va jouer, qui va jouer en Coupe, qui va jouer en Championnat ?»

Des qualités et des défauts chez chacun

C.L. : «À partir du moment où on recrute Buffon, on doit anticiper les situations qui vont amener à de la concurrence. Si on prend le gardien uniquement pour l’image ou pour apporter un plus dans le vestiaire, pourquoi pas aussi. C’est vrai que Buffon, si Areola reste au PSG, peut beaucoup lui apporter, mais aussi à Kevin Trapp, de par son expérience. Et comme c’est un garçon qui est top au niveau humain, il va certainement être un plus. Et entre apporter beaucoup dans le vestiaire et apporter beaucoup sur la pelouse, il y a aussi une différence. Dans le Championnat de France, le PSG est archi dominant donc cela va aussi faciliter l’adaptation de Buffon.»

C.L. : «Avec tout le respect qu’on doit à un garçon comme Buffon par rapport à ce qu’il a apporté au poste et à l’exemple qu’il est, quand on a un garçon comme Areola, je m’interroge sérieusement sur le pourquoi de ce recrutement. Alphonse, il a joué la totalité des matches la saison dernière, il arrive à 25 ans, il a tous les critères pour s’imposer comme numéro un dans un grand club, et quand je parle de grand club je parle de tous ceux que l’on connaît. Alphonse a dû se poser beaucoup de questions. Maintenant, je pense et j’espère qu’on va respecter ce qu’il a fait et ce qu’il peut faire et l’utiliser à bon escient. Car c’est vraiment un très très très bon gardien. Moi, je le considère comme le meilleur gardien français actuellement.»

R.V. : «Sur les qualités propres à chacun, je ne pense pas qu’Alphonse soit moins bon que Buffon. Je le vois peut-être même meilleur maintenant. Mais il y a une donnée hyper importante au poste de gardien de but, c’est la confiance qu’on transmet à ses partenaires et l’expérience. Pour le coup, sans faire injure à Areola ni remettre en cause ses qualités, son expérience et son charisme sont forcément moindres qu’un monument comme Gianluigi Buffon. Et dans l’optique d’aller loin en Coupe d’Europe, un mec comme Buffon, même s’il ne pas va jouer les trois premiers matches, et c’est une donnée à souligner, offre certaines garanties par rapport à Areola. Non pas techniques, mais ces petites choses imperceptibles comme la confiance transmise aux partenaires. Trapp, lui, sera certainement le moins retenu par le Paris Saint-Germain. […] J’ai quand même un petit peu les boules pour Alphonse. J’aurais bien aimé le revoir cette saison. Mais il va aussi falloir faire avec les blessures, les méformes… Et puis il faut voir Buffon dans un nouveau contexte, où il est attendu encore plus qu’en Italie. Réussir au poste de gardien de but au PSG, c’est très dur.»

«Buffon ? Quand on a un garçon comme Areola, je m'interroge sérieusement sur le pourquoi de ce recrutement»

Antoine Bourlon