CASSANO ANTONIO (RICHIARDI/PRESSE SPORTS/PRESSE SPORTS)

Antonio Cassano, la diagonale du fou

La valse-hésitation qui a porté à la retraite de l'attaquant italien est à l'image du personnage et de sa carrière. Portrait d'un crack ingérable et d'un talent trop souvent gâché.

Les adieux ont pris l’allure d’une farce. Et, vu le personnage, cela ne nous étonne guère. Antonio Cassano a donc mis un terme à sa carrière. Et rompu son contrat, unilatéralement, avec le Hellas Vérone. Le club de Vérone, qui, d’ailleurs, s’est empressé de préciser que «le joueur fait toujours partie de l’effectif». Tout en ajoutant : «Le bien du groupe vient avant tout.» Et le bien du groupe est évidemment de tourner la page Cassano au plus vite.

Le garçon a dit stop à 35 ans sur un gag qui colle parfaitement au bonhomme : alors qu’il annonçait en fin d’après-midi ne plus vouloir jouer, sa femme, Carolina Marcialis, précisait que «C’est un adieu à Vérone, pas au foot». Dommage que son mari ne lui a pas tout expliqué ! Du coup, l’attaquant italien a dû se fendre d’un communiqué où il indique que sa douce moitié n’a pas tout bien compris ! Un quiproquo bien à l’image de ce qu’a été cette dernière étape du parcours de Cassano : entre sa signature au Hellas pour une saison le 10 juillet dernier et aujourd’hui, le Sieur Antonio a renoncé une première fois avant de se raviser, pour jeter l’éponge une bonne fois pour toute. Vraiment ? Vu la publicité faite autour de cette affaire, il nous étonnerait qu’un président de club saint d’esprit lui fasse une proposition. Donc, en dehors, d’un coup d’éclat à la Zamparini (le président de Palerme, qui a fait une chose du même acabit en vendant le club avant d’éconduire l’acheteur !), l’histoire est close.

Antonio Cassano : si talentueux, mais aussi si inconstant

Cette histoire, c’est celle d’un gamin à l’enfance compliquée, élevé par sa mère seule dans le quartier de Bari Vecchia, zone centrale et populaire de la grande ville des Pouilles, dans le sud de l’Italie. Un gamin hyper doué qui avait explosé au Bari Calcio, se faisant connaître de tout le pays en marquant un super but face à l’Inter, en décembre 1999.


Sa carrière passera par neuf étapes : Bari, Roma, Real Madrid, Sampdoria, Milan AC, Inter, Parme, Sampdoria et Hellas Vérone. Vous noterez que Cassano n’est revenu qu’une fois dans le même club. Logique, il est parti pratiquement de partout en mauvais terme. Antonio a du talent, énormément de talent. Mais il aura été aussi un joueur très inconstant. La preuve : il n’est jamais arrivé à 15 buts dans un Championnat, pas même lors de sa meilleure saison à la Roma, en 2003/04 (14 buts, et 18 réalisations toutes compétitions confondues). Et son palmarès - deux Scudetti, deux Supercoupes d’Italie - est plutôt faible vu les clubs fréquentés, sachant que le titre de Liga avec le Real puis celui de Serie A sous le maillot du Milan ne l’ont pas été en tant que titulaire. Loin de là. Enfin, rayon sélection, il a un bon Euro 2012 à son actif, mais aussi beaucoup de rendez-vous ratés.

Les «Cassanate» d'Antonio Cassano

Inconstant, et surtout ingérable. Il faudrait un numéro entier de France Football pour relater ses frasques, ses pétages de plomb, pour lesquelles les Italiens ont créé un terme : les «Cassanate», les conneries à la Cassano ! On se souvient des cornes à l’arbitre après un avertissement en finale de Coupe d’Italie, du «Je vais te péter la gueule» à Roberto Mancini, alors entraîneur de l’Inter, ou encore des imitations peu sympathiques dans le dos de Fabio Capello, lorsque les deux étaient au Real, et qu’une caméra de télévision avait reprise à son insu. La liste des «Cassanate» est longue.

Garrone dégoûté

Mais la plus grave reste celle envers le propriétaire de la Sampdoria, Ricardo Garrone, fin octobre 2010. Ce dernier a eu le malheur d’insister pour que Cassano l’accompagne à une fête de supporters. Il lui demande cela comme un service, sur le ton affectueux d’un père avec son fils. Antonio le lui doit bien. Garrone n’a-t-il pas relancé sa carrière en lui offrant un contrat de 2,4M€ net, alors qu’il était borduré au Real ? Pour toute réponse, l’attaquant l’insulte copieusement et très vulgairement. «Je vais surement perdre de l’argent, mais il ne fait plus partie de ce club», décide un Garrone écoeuré.

«Je mérite le plus haut niveau», Antonio Cassano en 2016

Cet épisode est là pour faire comprendre comment Cassano a toujours été à côté de la plaque, ne rendant pas ce qu’ils méritaient aux gens qui lui ont voulu du bien. Comme au Milan AC, où en octobre 2011, il est victime d’un AVC. Le club le dorlote, le soigne et l’attend. Pour le remercier, Cassano signera à l’Inter l’été suivant ! Et s’il a remis les pieds à la Sampdoria, c’est parce que le club avait changé de main, passant entre celle d’un homme aussi imprévisible que lui, le producteur cinématographique Massimo Ferrero. Imprévisible, mais attaché à une certaine hiérarchie. Ainsi, lorsque Cassano se prend la tête avec l’un des dirigeants blucerchiati, Ferrero n’hésite pas à le virer de l’effectif. Depuis l’été 2016, Cassano s’entraine donc seul, refusant les mains tendues, comme celle de l’Entella, club génois de Serie B. «Je mérite le plus haut niveau», aurait-il murmuré. Une drôle de prétention quand on ne joue plus de matches officiels depuis un an et demi. Pourtant, le Vérone de Maurizio Setti voulait croire en lui et le relancer en même temps qu’Alessio Cerci. Mais, alors que ce dernier s’époumone avec ses camarades en mise au vert, Cassano enclenche le bouton d’autodestruction...

Roberto Notarianni