pepe (nicolas) (F. Stucin/L'Equipe)

A lire cette semaine dans France Football, Nicolas Pépé (Lille) : «Je ne suis plus celui qui ne pensait qu'à lui»

En l'espace de quelques mois, Nicolas Pépé est passé du statut de révélation à celui de véritable sensation. FF analyse cette fulgurante évolution et donne la parole au buteur ivoirien de Lille, lucide sur son évolution et son nouveau statut.

La première fois compte, les premières impressions qui y sont liées aussi. Derrière les vitres du domaine de Luchin, le soleil d’hiver réchauffe et éblouit. Mais pas assez pour aveugler. Les apparences ne trompent personne. La tenue complète camouflage adoptée par Nicolas Pépé ne retire rien à la réalité : il fait partie de ceux qu’on voit et qu’on remarque. La luminosité de la mi-journée accompagne sa démarche assurée. La poignée de mains est ferme mais pas trop, la voix est discrète mais pas étouffée, le sourire esquissé mais assez prolongé pour deviner une volonté de partager et de parler. De celui qu’il était et de celui qu’il est, au moment où on s’interroge sur celui qu’il pourrait devenir. Les confidences se font dans la pièce sombre à côté, celle que Marcelo Bielsa avait réquisitionnée pour la vidéo. Dans l’obscurité. Que l’attaquant de Lille a éclairée durant plus d’une heure sans se cacher. Extraits.

Un état d'esprit qui a changé

«Je voulais juste humilier mon adversaire»
«Quand je regarde ma trajectoire, je m’aperçois par exemple que j’étais un joueur de spectacle à Orléans. En National, je prenais le dessus sur mon adversaire et me disais : "Je vais rester sur lui et l’humilier". Il me craignait mais je voulais juste l’humilier. Et, pour moi, quand j’avais fait ça, j’avais fait mon match. Maintenant, je sens quand le défenseur a de la retenue ou de la peur. Ensuite, je prends l’espace sans forcément dribbler et j’ai des joueurs qui peuvent me mettre de bons ballons pour me permettre de finir. Ou si je le percute, je le fais une fois pour centrer ou tirer. Il faut que ça finisse par quelque chose, que j’en fasse profiter l’équipe. Aujourd’hui, j’ai compris : il faut être tueur et efficace. Tous les grands le sont. Les statistiques, maintenant, c’est important. J’ai pris en maturité. Je compte aller le plus haut possible. Je ne me fixe aucune limite. J’espère ne jamais m’arrêter.»

Une attitude qui a évolué

«Ce que je faisais ne rimait à rien»
« Auparavant, j’ai eu besoin qu’on me recadre. Il fallait parfois me crier dessus ou me sortir pour que je m’investisse plus. Aujourd’hui, je le suis pleinement. En me voyant, on pouvait se dire que j’étais nonchalant ou que je n’aimais pas ce que je faisais, ou que je ne voulais rien faire. On pouvait se dire : "Il s’en fout". Je prenais ça pour un jeu, pour de l’amusement, du football loisir, plaisir. Maintenant, c’est mon métier. Si on prend une vidéo de dix secondes de moi il y a quatre ans et une de la même durée aujourd’hui, il y aura une différence dans l’attitude. Sur un terrain, je pouvais énerver mes propres coéquipiers. Ce que je faisais ne rimait à rien. Je dribblais un joueur et il n’y avait rien derrière. Je voulais jouer tout seul. Je ne courais que lorsqu’il y avait le ballon donc c’était moi. Désormais, à Lille, je cherche l’efficacité et je fais des efforts pour les autres, donc c’est nous. Je ne suis plus celui qui ne pensait qu’à lui, qui se disait le plus fort. J’ai changé, pris de la maturité, j’ai évolué et j’espère encore évoluer. Je ne veux plus briller pour moi mais pour l’équipe. Penser à devenir le sauveur est un danger qui peut me guetter. Quand je veux à tout prix marquer, je suis attiré par le but, j’oublie le repli, et je déjoue. Le coach me l’a fait remarquer. Alors que quand tu donnes à l’équipe, elle te rend automatiquement. Je ne veux pas être un joueur superflu, ni un joueur qui brille tout seul.»

Thomas Simon

Retrouvez le dossier de huit pages consacrées à Nicolas Pépé, dont l'interview du joueur, dans le nouveau numéro de France Football en kiosques mardi ou ici en version numérique dès lundi à partir de 18 heures.