21.10.2017, Commerzbank Arena, Frankfurt, GER, 1. FBL, Eintracht Frankfurt vs Borussia Dortmund, 9. Runde, im Bild Elfmeter, Tor, Sebastien Haller (Frankfurt, 9) trifft zum 1:2 Anschlusstreffer, Torjubel // during the German Bundesliga 9th round match between Eintracht Frankfurt and Borussia Dortmund at the Commerzbank Arena in Frankfurt, Germany on 2017/10/21. EXPA Pictures © 2017, PhotoCredit: EXPA/ Eibner-Pressefoto/ Roskaritz *****ATTENTION - OUT of GER***** *** Local Caption *** (Roskaritz/EXPA/PRESSE SPORTS/PRESSE SPORTS)

«J'essaie de faire des choix plutôt intelligents» : Sébastien Haller raconte sa nouvelle aventure en Bundesliga avec l'Eintracht Francfort

Huit buts depuis le 20 septembre : après une période d'adaptation, Sébastien Haller a pris son envol à Francfort, qu'il a décidé de rejoindre l'été dernier. Le Français de 23 ans s'est posé pendant 30 minutes pour nous raconter sa carrière, sa nouvelle aventure et son choix de rejoindre l'Allemagne cet été.

«Cinq buts en Bundesliga, trois en Coupe : on a l’impression que vous vous êtes très vite adapté à votre nouveau pays, même si vous avez dû attendre la cinquième journée pour marquer en Championnat…
Je ne m’attendais pas forcément à ça. C’est vrai que ça se passe très bien, surtout au regard de l’importance des buts que j’ai pu inscrire. Il n’y a pas énormément de différences entre mes performances du début de saison et celles d’aujourd’hui. Ce qui a changé, c’est peut-être la réussite personnelle et celle de l’équipe. On a eu un déclic avec nos premières victoires, ça nous a permis d’aller de l’avant. J’ai dû aussi m’adapter à une philosophie, à un coach qui demande peut-être des choses différentes de mon ancien entraîneur : il faut forcément s’adapter à beaucoup de nouveautés. Et plus vite on y arrive, mieux c’est.

Plus tôt, pourquoi disiez-vous que vous ne vous attendiez pas forcément à une telle adaptation ?
Parce qu’on ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre quand on change de pays et d’environnement. Je ne m’attendais pas à ce que ça se passe aussi bien, et qu’il y ait autant d’engouement autour de ces performances.

«Boateng, un mec génial»

Sur vos cinq réalisations en Championnat, laquelle a été la plus marquante ?
Celle contre Stuttgart. D’abord parce que c’est un joli but, avec un ciseau, et parce qu’il a été inscrit à la dernière seconde (2-1, 90e+3). Ça nous donne la victoire, et je me rappelle qu’elle nous avait fait du bien. D’ailleurs, j’ai reçu le prix du plus beau but du mois, donc ça récompense un peu tout ça.

Question terrain, quelles ont été vos découvertes par rapport à l’Eredivisie, et aux Pays-Bas, où vous évoluiez auparavant ?
C’est un Championnat majeur, donc on sent la différence. Ça va plus vite qu’aux Pays-Bas, bien sûr. Dans le jeu, ça court beaucoup. Mais les différences, c’est surtout au niveau de l’ambiance et de la ferveur. Les stades sont souvent pleins. Nous, on a la chance d’avoir des supporters vraiment très présents, qui nous accompagnent pratiquement dans tous les déplacements.

Parlons du vestiaire : qu’avez-vous chanté pour votre bizutage ?
J’ai chanté "Ouest Side" de Booba. On s’est tous retrouvés en stage, en Italie. On a fait un genre de barbecue. Et comme on était une dizaine de nouveaux, les chansons se sont succédées, c’était assez marrant. Ç’a limite fini en concert.

Vous avez fait la connaissance de Kevin-Prince Boateng, votre nouveau coéquipier. Comment est-il ?
On m’a beaucoup posé la question. C’est un mec génial, un très bon coéquipier. Je suis super content qu’il soit avec nous. Il apporte son expérience et une certaine aura.

 

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Et votre coach, Niko Kovac ?
J’aime bien sa personnalité. On peut discuter et échanger sans problème. Il sait où il veut aller. Il a la réputation d’être quelqu’un d’assez direct. Il vit les matches comme nous, je le sens vraiment impliqué. Il a également apporté son petit grain de gnaque à cette équipe. Aujourd’hui, mentalement, on voit qu'on est une formation assez forte.

De là à se donner des objectifs (Francfort est 7e) ?
L’important, c’est de voir si on est capables d’aller loin. Et ça, on le constatera sur le long terme. À nous de rester concentrés et en forme pour aller chercher de bons résultats. Le premier objectif, c’est de se maintenir et d'aller prendre des points par ci, par là. C’est au mental que ça va se jouer.

Vous évoquiez précédemment de l’engouement avec ces bonnes prestations. Comment cela se traduit-il ?
Si je dois comparer mes deux premiers mois à ces dernières semaines, c’est vrai que ça n’a rien à voir. Les gens me reconnaissent beaucoup plus et sont plus sympas avec moi. On sait que l’adaptation et le fait de se sentir bien dans une ville ou dans un club passent essentiellement par de bonnes performances.

Et Francfort, c’est comment ?
C’est une ville assez internationale. Il y a beaucoup de choses à faire. Ça me fait un peu penser à La Défense, à Paris. Et je trouve qu’il y a une grosse communauté de Français. J’ai eu l’occasion d’en croiser beaucoup. Sinon, il y a le siège de la Banque Centrale Européenne, avec la bourse et la finance. Donc je pense qu’il y a une bonne partie de la population de Francfort qui n’est pas à plaindre (il sourit).

Qu’en est-il de votre niveau d’allemand ?
Ça va pas fort (il sourit). Ce n’est pas évident, ça reste une langue assez compliquée. Je prends des cours deux fois par semaine, et j’ai aussi la chance d’avoir Simon Falette (ex-Metz) et Gelson Fernandes (ex-Rennes) avec moi. Ça m’aide un petit peu. Gelson (qui est suisse) parlait déjà couramment, mais avec Simon, on s’entraide un peu. Et le traducteur du club est français donc c’est assez sympa.

Au niveau des langues parlées par rapport aux clubs où vous signez, entre le hollandais et l’allemand, ce ne sont pas les choix les plus faciles…
Si j’avais dû choisir mes clubs par rapport à la langue, c’est sûr que je ne serais pas allé là-bas (il sourit). Mais bon, il faut savoir connaître les priorités : et pour moi, la langue vient au second plan.

«Les gens me reconnaissent beaucoup plus et sont plus sympas avec moi».

«Si j'avais dû choisir mes clubs par rapport à la langue, c'est sûr que je ne serais pas allé là-bas».

Avec vos 45 buts en deux ans et demi en Championnat des Pays-Bas, on imagine que d’autres clubs vous suivaient…
C’est difficile à dire car j’ai signé avant le début du mercato (15 mai). Ça s’est passé très vite. Je n’ai pas cherché à avoir 10 000 offres pour ensuite garder la meilleure. Francfort s’est positionné et m’a montré cette confiance. Ça m’a tout de suite plu.

Vous dites : «Je suis encore jeune». Certains vous diront que, dans le foot, on n’est plus tout à fait jeune à 23 ans… 
Je ne suis pas vraiment d’accord avec ça. Après, ça dépend ce qu’on appelle jeune. Pour des gens, à 30 ans, vous êtes vieux alors que… Tout ça ne veut pas vraiment dire grand-chose. Je considère que je suis jeune.

Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes joueurs franchissent (parfois trop vite) les étapes, avec l’envie d’aller tout de suite très haut. Vous, non…
Quand je regarde Mbappé, je suis d’accord avec son choix de rejoindre Paris. Il a 18 ans, mais il faut voir le joueur que c’est. Au-delà du niveau technique, il y a ses qualités en tant qu’être humain. Il fait partie des joueurs qui sont assez solides en dehors du football pour supporter une pression pareille. Il est assez entouré et intelligent pour jouer dans un tel club. Il y en a d’autres qui sont talentueux et qui pourraient rapidement prétendre à ce genre d’équipes… Mais les qualités footballistiques ne sont pas les seules à entrer en compte dans un transfert. Pour réussir sa carrière, la chose essentielle est de se connaître soi-même, savoir ce qu’on est capable ou non de faire. On est ainsi plus à même de faire des choix.

Mais vous, avez-vous confiance en vos qualités pour viser plus haut ?
Il y a avoir confiance et avoir l’opportunité d’aller plus haut. Et c’est différent. Personnellement, j’essaie de faire des choix plutôt intelligents. Le plus important n’est pas de se dire ce que j’aurais pu avoir, mais ce que j’ai. Et aujourd’hui, je suis très content et satisfait de cette étape-là. Je me concentre sur ce que j’ai à l’heure actuelle, pour la suite, on verra.

 

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Depuis un an, pendant les trêves internationales, vous ne mettez plus les pieds à Clairefontaine puisque vous avez atteint l’âge limite pour les Espoirs. Ça ne vous manque pas ?
(Il sourit) Ce qui me fait rire avec Clairefontaine, c’est la phrase prononcée par Antoine Griezmann comme quoi il n’y avait rien là-bas (Au magazine Le Point, le Français avait expliqué : «Clairefontaine, c’est horrible. T’as le château, et c’est tout. On est là-bas tout le temps et on ne sort jamais»). C’est vrai que c’est un peu ennuyeux pour les joueurs. Sinon, non, ça ne me manque pas. Il faut surtout être réaliste : je ne pense pas mériter quoi que ce soit à l’heure actuelle. Ce sont des choses qui doivent venir avec le temps et les performances. Pour l’instant, ce n’est pas au goût du jour. Je suis surtout focus sur mon début de saison à Francfort.

Mais signer en Bundesliga vous permet aussi d’être davantage mis en lumière qu’aux Pays-Bas…
Oui, aussi. Tout arrive à un moment donné. Ce n’est pas pour être forcément dans la lumière (qu'il a signé à Francfort), mais pour évoluer à un niveau supérieur où je peux également exprimer mes qualités.

Vous avez déjà reçu une préconvocation ?
Non.

Il y a énormément de concurrence à votre poste chez les Bleus…
Je ne peux pas être déçu de ne pas être en équipe de France. Il y a tellement de supers joueurs que si cela arrive, ça sera avec plaisir, mais sinon il faut se concentrer sur sa carrière en club. C’est surtout ça qui permet d’aller en sélection ensuite.

Etre appelé chez les A un jour, vous y croyez ?
Pourquoi pas !»

S'il y a un choix qui a été réfléchi, c’est celui de quitter Utrecht pour rejoindre Francfort. Comment cela s’est décidé ?
C’était le bon moment pour sauter le pas. Le club d’Utrecht savait qu’il pouvait récupérer une somme intéressante (NDLR : Haller a été transféré pour six millions d’euros), et moi, j’avais besoin d’une étape supérieure. Le Championnat allemand et Francfort étaient le meilleur choix possible. Ils m’ont montré une confiance assez grande dans les négociations, avec des garanties, c’est aussi ça qui m’a fait prendre cette décision. Continuer à jouer était important. Je suis encore jeune, j’ai 23 ans, et disputer tous les matches à Utrecht m’a fait apprendre. Je me suis senti important dans l’équipe, avec aussi l’opportunité d’appartenir à un projet, d’être soutenu par tout un club et tous les supporters. Tout ça me tenait à cœur. Mais aujourd’hui, il ne faut pas se mentir, si on veut avoir des ambitions, et faire un minimum de chemin, ça passe par le terrain. Je voulais donc jouer, et évoluer dans une ligue majeure.

«Je n'ai pas cherché à avoir 10 000 offres pour ensuite garder la meilleure».

Haller et ses partenaires après leur victoire face au Werder, le 3 novembre (2-1, Haller a inscrit le but de la victoire à la 89e minute). (Reuters)

«Je ne peux pas être déçu de ne pas être en équipe de France».

Timothé Crépin